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21 janvier 2008

"A quand le débat sur « affaires privées et biens publics » pour la democratie Argentine" Pino Solanas

par Fernando Pino Solanas

 

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Dans le premier mois du gouvernement de Cristina Kirchner deux faits graves pour le pays se sont produits que nous dénoncions pendant la campagne électorale au nom de Proyecto Sur : l’achat de 25% des actions d’YPF par le banquier privé de Santa Cruz, Enrique Eskenazi, avec l’approbation et l’appui des Kirchner et le lancement du méga projet du " train balle " (TGV). Ce sont des mesures aux conséquences stratégiques pour le futur de l’Argentine qui méritent un débat national vaste et profond. Le Gouvernement a contourné le Congrès et les dirigeants politiques - y compris une partie de l’opposition - regardant d’ un autre côté comme s’il s’agissait de quelque chose de peu d’importance. Les deux cas démontrent les choix néolibéraux et privatistes du gouvernement.

La reprivatisation d’une partie d’YPF au bénéfice de la " bourgeoisie nationale " liée au couple présidentiel est un scandale, quand le pays a des réserves publiques suffisantes pour reprendre toute l’entreprise au bénéfice de la Nation. La soit disant expérimentée société " Petersen Énergie " - qui doit permettre l’ "argentinisation " pétrolière - est une légende étant donné qu’elle n’existe pas dans le pays et qu’elle a été enregistrée à Madrid en août 2007. L’achat de 14.9% des actions par Eskenazi a requis à peine 10% en liquide, parce que les 90% restant sont un crédit accordé par Repsol et plusieurs banques. Encore une fois des affaires privées avec des richesses et des biens publics, comme cela se passe avec la répartition de concessions minières dans les provinces alliées au kirchnerisme. Des centaines de gisements sont livrés tous les jours à des sociétés créées par des amis du pouvoir, qui à leur tour les renégocient aux multinationales.

Quant à celui qu’on nomme le " train balle ", ou train de haute vitesse français T.G.V., l’annonce du contrat paraît une plaisanterie de mauvais goût quand les passagers sont abandonnés et sans information dans des gares ou dans des aéroports. S’ils arrivent à voyager, ils le font comme du bétail dans des trains qui ne sont pas dans en condition de circuler à plus de 50 kilomètres à l’heure. Les Kirchner ont approfondi la destruction du système ferroviaire argentin entamée par Menem, à travers des concessions où l’État paye tous les salaires, pannes, remplacements et frais de fonctionnement, et le privé - sans courir aucun risque - est le seul bénéficiaire du partage.
Aujourd’hui le système ferroviaire coûte aux argentins trois fois plus que quand les trains étaient gérés par l’État et nous avions 36.000 kilomètres des voies et 95 000 employés.

Maintenant, c’est tout juste s’il reste 8.000 km. et 14.000 employés. Ils disent que le "balle " nous coûtera 3.600 millions de dollars et que 90% sera fourni par la banque française Société Générale. C’est-à-dire, qu’ encore une fois, nous nous endettons dans une oeuvre pharaonique dont on ne sait jamais ce qu’elle va coûter ni quand elle sera terminée. Il suffit de se rappeler les cas de « l’usine d’Eaux Lourdes », à Arroyito, de la centrale thermique Atucha II, qui est toujours en construction, ou de Yacyretá, qui a fini par coûter dix fois le prix initialement prévu , et dont les travaux continuent encore. Le « train balle » n’a pas fonctionné dans aucun autre pays hors de l’Europe - même pas aux Etats-Unis - parce que parmi ses nombreuses exigences, il a besoin des développements technologiques parallèles. La tentative de l’implanter en Egypte a été un faramineux échec financier.

Il ne s’agit pas seulement des coûts de fabrication, ni du prix élevé du billet pour les passagers de la classe moyenne et de la bourgeoisie , du corridor Buenos Aires-Rosario-Cordoba : ce projet nous attache à la technologie de pointe française et réaffirme le renoncement du Gouvernement à reconstruire une industrie ferroviaire nationale. Celle qui exportait dans toute l’Amérique Latine et qui actuellement peut être dans le pays un des leviers de la reconstruction avec des centaines de milliers d’emplois. Des ingénieurs et des spécialistes argentins démontrent comme il se doit que, avec ce qui est dépensé aujourd’hui et avec tout ce qu’on va dépenser, il est possible de reconstruire un système ferroviaire qui restitue aux villages de l’intérieur et aux économies régionales, un train sûr et confortable qui circule à 120 km/h. Le chemin de fer n’est pas seulement un moyen de transport, c’ est une culture de la communication et un instrument fondamental pour l’intégration nationale.

Il est nécessaire de promouvoir le débat et d’exiger la participation du Congrès : l’abandon est tel que l’Argentine ne dispose pas d’une loi nationale sur les transports. Nous avons besoin de récupérer les ressources naturelles stratégiques et de répondre à la dramatique crise du transport que nous vivons. Un pays de 4 000 kilomètres de long, de base agricole, avec 40 millions d’habitants, sans pétrole ni chemin de fer n’est pas viable : il ne serait pas possible de porter même les récoltes jusqu’aux ports. Le débat entre ce qui est public et privé reste en suspens : l’expérience des dernières années démontre que les privatisations, outre la maltraitance des usagers, ont été et continueront à être un vol.

Fernando « Pino » Solanas : Cinéaste, ex candidat à président pour "Proyecto Sur".

Página 12 , Buenos Aires, 20 Janvier 2008.

Traduction de l’espagnol pour El Correo de : Estelle et Carlos Debiasi

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