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29 octobre 2004

Histoire France-Argentine :
Il y a 120 ans, des Aveyronnais fondaient une colonie en pleine pampa

 

Par Dorothée MOISAN
AFP. Saint-Come D’Olt, Aveyron, 29 octobre 2004

Cent vingt ans après le premier exil de Rouergats partis s’installer à Pigüe, à 600 kilomètres au sud-ouest de Buenos Aires, Rodez se pare des couleurs de l’Argentine pour rendre hommage à ses déracinés, du 16 octobre au 12 novembre.

Si l’exode des Aveyronnais partis faire fortune à Paris est un phénomène bien connu, l’histoire de leur émigration en pleine pampa argentine est moins galvaudée.

Fin 19e, la situation est peu riante en Aveyron, dépeint Jean-Michel Cosson, professeur d’histoire et auteur de "La promesse de Pigüe". Les patrons des mines de Decazeville licencient à tour de bras, le monde rural est surpeuplé et les exploitations agricoles exiguës. Entre 1882 et 1890, la crise du phylloxera densifie les rangs des candidats à l’émigration.
Le 23 octobre 1884, 160 personnes décident de faire le "grand bond" et embarquent à la gare de Rodez. Destination : l’Argentine.

Le projet a germé dans l’esprit de Clément Cabanettes. Parti en 1879 comme instructeur pour l’armée argentine, le sous-lieutenant y découvre des terres vierges, récemment conquises sur les Indiens, qui ne lui semblent pas inconnues : "On dirait l’Aubrac au mois de mai".

Il achète 27.000 hectares, à un prix dérisoire, et envoie un émissaire à Saint-Côme d’Olt -il est originaire d’un hameau voisin-, afin de recruter des colons, à raison d’une centaine d’hectares contre un partage des récoltes pendant six ans.
"Nos bons cultivateurs aveyronnais vont s’extasier devant la bonté et la beauté de la terre que nous allons leur donner", écrit-il alors.

"Un véritable village"

"Au début, on l’a pris pour un fou. Il n’était pas question d’aller dans un pays peuplé de sauvages", relate M. Cosson. Puis, à force de persuasion, "il a réussi à convaincre".

Selon l’association Rouergue-Pigüe, "c’est un véritable village qui s’éloigne en train de Rodez, agriculteurs bien entendu, mais également forgeron, charron, commerçant, curé et même institutrice". Le 25 octobre, ils embarquent à Bordeaux sur un bateau à voiles et à vapeur, le Belgrano, mis à disposition par le gouvernement argentin.

Après 38 jours de traversée et quelques-uns de train, ils arrivent à Pigüe le 4 décembre 1884. Selon les lettres d’émigrés, la "terre promise" est à la hauteur du sacrifice : "M. Cabanettes ne saurait être accusé d’avoir promis plus de beurre que de pain".
Les premières récoltes s’avèrent toutefois insuffisantes pour respecter les engagements.
Cabanettes doit résilier le contrat de vente et ses compatriotes traiter avec l’ancien propriétaire, dont les exigences financières sont nettement plus élevées.
"Pour les premiers arrivants, la vie était très difficile car ils ont dû tout faire : construire des maisons, creuser des puits...", témoigne Maria Bros,
41 ans, arrière-arrière-petite-fille d’émigrés, aveyronnais par sa mère et basque par son père.
Pourtant, quasiment personne n’est reparti et d’autres Aveyronnais sont arrivés. Progressivement, l’élevage de bovins s’est substitué à celui des ovins, et les immigrés se sont adaptés.

Aujourd’hui, Aveyron et Argentine entretiennent le lien et "chacun garde les traces de ses ancêtres comme des trésors. C’est une manière de ne pas perdre notre identité", atteste Maria Bros, de passage à Rodez pour le mois de l’Argentine.

Selon elle, un tiers de la population de Pigüe, aujourd’hui petite ville de 15.000 habitants, a des ancêtres aveyronnais, les autres puisant leurs racines en Italie, Espagne ou encore en Allemagne.

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