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31 mars 2015

Fonds Vautours : le double jeu de la Citibank sanctionné par l’Argentine

par Estelle Leroy-Debiasi *

 

Est-ce une arnaque ? En tous cas cela y ressemble. L’accord signé entre les Fonds Vautours et la Citibank avec l’aval du juge new-yorkais Thomas Griesa, concernant le paiement des intérêts de la dette argentine va sûrement être l’objet de nouveaux rebondissements, financiers et judiciaires.

La Citibank a joué avec le feu, la voilà sanctionnée par le gouvernement argentin et les instances idoines, en l’occurrence la CNV (commission nationale des valeurs) ; cette dernière a décidé vendredi 27 mars la suspension de l’autorisation de la Citibank d’opérer sur les marchés de capitaux, à titre préventif, compte tenu du grave danger et de l’incertitude qui pèse sur les détenteurs de titres de dette argentine, notamment les « Bonos PAR », et dont les intérêts devaient être versés aujourd’hui, 31 mars.

La CNV argentine a indiqué avoir pris cette mesure dans le cadre de l’article Nº 141 de la Loi du marché des capitaux. Cette mesure n’affectant pas le reste des activités de l’établissement bancaire en Argentine. Ainsi la Caja de Valores a été chargée de prendre le relais pour gérer les comptes de dépôts de la Citibank et pouvoir procéder aux paiements prévus auprès des détenteurs de titres de dette, puisque l’argent a été versé par le Trésor argentin dès vendredi dernier ; les modalités devant être précisées ce jour.

Retour en arrière : La Citibank, il y a quelques jours racontait à qui voulait l’entendre qu’elle se trouvait dans une impasse, coincée entre l’interdiction du juge new-yorkais Griesa de verser les intérêts de la dette argentine aux détenteurs de titres, et le respect des lois argentines qui l’obligeaient à le faire. Dans la balance, le risque était bien réel de perdre sa licence en Argentine. (Lire : Argentine/Fonds Vautours :
La Citibank coincée par le juge Griesa
)

Volte-face

Quelques jours après le juge Griesa avait fait mine d’avoir entendu la complainte de la banque étasunienne, et l’autorisait à procéder au versement des dits intérêts, prévu au 31 mars. Mais si l’histoire s’arrêtait là, ce serait bien trop simple. Car il y a eu ce qu’on pourrait appeler un « marché » voire une « arnaque ».

Les Fonds Vautours (qui n’ont pas accepté la restructuration de la dette et dont la bataille avec l’Argentine s’éternise devant la justice depuis des années), auraient participé à cet « accord » donné par le juge, dont la contrepartie était que la Citibank renonçait à faire appel des décisions du juge Griesa ; Or jusque là, cette même banque avait remis en question en tandem avec l’Argentine les décisions du juge Griesa, et cela depuis des mois devant diverses Cour d’Appel. Mais aussi la Citibank s’engageait à se retirer du marché de l’intermédiation des titres en Argentine ; or, il s’agit de titres émis sous législation argentine.

Mais ces deux conditions liées, et le fait que les Fonds Vautours aient en quelque sorte soufflés cette dernière décision au juge Griesa posent problème. Dans cette dernière décision, la Citibank change de bord , fait carrément volte-face et porte bien atteinte aux détenteurs de titres de la dette restructurée, puisqu’ils n’auraient plus la garantie de recevoir leurs fonds à l’étranger.

Une fois partis de Buenos Aires comment s’assurer que les fonds seront versés à leurs destinataires. Mais surtout en laissant tomber sa procédure d’appel, la Citibank laisse sur le carreau les détenteurs de titres qui lui faisaient confiance et en plus signe un accord avec les Fonds Vautours.

Le double jeu de la Citibank laisse craindre une mauvaise surprise. Le juge Griesa de surcroit a émis une décision à l’encontre d’Euroclear, pour empêcher le versement final des fonds. Une fois de plus, à son habitude, il outrepasse sa juridiction.

La Citibank a un rôle d’intermédiaire puisqu’elle reçoit les fonds depuis la Banque Centrale argentine et les distribue aux autres établissements bancaires qui eux-mêmes les redistribuent aux détenteurs de titres de la dette. De plus l’accord ne s’applique qu’à la filiale argentine de la Citibank.

Jusque là, chaque fois que le juge Griesa avait donné une autorisation unique pour le versement des intérêts de la dette argentine, il avait de façon explicite mentionné tous les intermédiaires, notamment Euroclear et Clearstream. Or, dans cet accord final signé avec les Fonds Vautours et la Citibank, les autres intermédiaires ne sont pas mentionnés. Ce flou est inquiétant, d’où la décision de la CNV argentine de suspendre une partie des activités de la Citibank.

Estelle Leroy-Debiasi pour El Correo

* Estelle Leroy-Debiasi est journaliste professionnelle, Diplômée en Economie, ex rédactrice en chef du quotidien économique La Tribune.

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El Correo. Paris, 31 mars 2015

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