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13 décembre 2007

Lettre d’Adolfo Pérez Esquivel à Madame la Présidente Cristina Fernández de Kirchner sollicitant un Audit sur la dette argentine avec le Club de Paris.

par Adolfo Pérez Esquivel

 

Toutes les versions de cet article : [Español] [français]

Madame la Présidente de la Nation Argentine
Dra. Cristina Fernández de Kirchner
S/D

De notre plus grande considération :

Recevez en premier lieu, nos salutations fraternelles et l’expression de nos souhaits les meilleurs pour votre gestion, dans l’espoir qu’elle aboutisse à une meilleure qualité de vie pour toute la population et en particulier, pour les millions d’hommes, femmes et enfants, pour lesquels l’accomplissement de leurs droits humains de base est encore à peine un rêve.

Nous nous adressons à vous avec un certain empressement aujourd’hui, afin de vous faire part de notre préoccupation et interrogations devant l’accord annoncé entre le Gouvernement qui vient d’entrer en fonction et le dénommé Club de Paris. Nous ne pouvons pas cesser de manifester notre refus, face aux déclarations du responsable du Fonds Monétaire International, avec lequel vous allez avoir une réunion aujourd’hui même, sur l’idée que l’Argentine devrait signer un nouvel accord avec cette institution avant de prendre toute décision, quelle qu’elle soit.

Hier au Parlement National, dans votre discours d’investiture, vous avez défendu le remboursement anticipé au FMI, effectué par le gouvernement précédent, comme une mesure qui nous restituait souveraineté et autonomie. Alors nous nous permettons de poser la question suivante : Comment est-il possible si ce paiement nous a donné de l’autonomie pour décider de notre politique financière, que nous soyons aujourd’hui à nouveau face à un nouvel accord avec le FMI ? Quels seront les coûts et les possibles bénéfices d’un semblable accord ? Après l’expérience des trois dernières décennies avec cet organisme, qui a débuté par le soutien du FMI à la dictature civico-militaire et qui a continué avec les politiques d’ajustements et de libéralisation si tragiquement connues. Comment est-il possible que le gouvernement argentin considère un nouvel accord avec celui qui n’a pas encore assumé ses responsabilités criminelles et administratives pour la dévastation provoquée à notre peuple et pays ?

Dans le même sens, devant la décision déjà avancée par Vous d’arriver à un accord pour payer la dette réclamée par le Club de Paris, nous ne pouvons pas moins que demander, Qu’est-ce qu’on prétend payer et pourquoi ? Parce qu’il existe des indices selon lesquels ce « Club » de pays prêteurs, qui se sont unifiés pour faire pression avec une plus grande force sur les pays demandeurs de crédits, prétend au remboursement de crédits qui n’ont eu aucun bénéfice pour le peuple argentin. Des crédits qui sont même payés depuis le temps de la dictature, souillés du sang du peuple et avec un coût démesuré pour toute la nation. Nous comprenons que c’est le cas, par exemple, d’une partie de la dette qui a commencé avec un prêt accordé par le gouvernement des Pays-Bas, pour les activités d’une entreprise privée. Est-Il vrai que cela inclut aussi des crédits de l’Espagne qui ont fait partie d’un blindage financier et qui ont encouragé la fuite de capitaux à l’extérieur, et des crédits de la France qui ont servi à promouvoir la privatisation ratée de l’eau dans la Province de Tucuman ?

Nous comprenons que le peuple argentin ne peut pas, ni doit continuer à payer des dettes sans savoir de quoi il s’agit, ni à qui il est supposé devoir et combien, qui en a tiré profit, combien a déjà été payé ? Nous comprenons qu’il n’est pas non plus possible de solder une dette qui porte atteinte aux Droits de l’Homme et y même la Justice argentine, comme par exemple dans l’affaire Olmos, a vérifié ses irrégularités.

Sur le chemin de la Vérité et de la Justice, défendu aussi par Vous hier devant le Parlement National, il est nécessaire que le peuple argentin sache, avant d’avancer avec tout processus de négociation tendant à décider les termes du paiement de la dette réclamée par le Club de Paris, ce qu’on prétend payer. Pour cette raison nous proposons que soit effectué un Audit Public et intégral de ces crédits, avec la participation nécessaire du Parlement National, des organisations et des mouvements de la société argentine préoccupés par ce sujet. Un Audit qui permettrait au peuple et au gouvernement argentin, aux pays prêteurs et à tous les parties prenantes, savoir que ce qui est proposé est adapté surtout au droit et, au respect de tous les droits de l’homme qui comme c’est reconnu, doit avoir primauté sur tout autre demande dans la conception et la mise en œuvre des politiques publiques. Il faut avoir entête qu’ il est nécessaire de privilégier le paiement de la Dette Sociale, Historique et Écologique vis-à-vis notre peuple, bien avant la Dette Externe immorale et illégitime.

Nous attendons votre soutien en ce sens et nous nous mettons à votre disposition pour ensemble mettre en chantier les mesures nécessaires.

Avec la fraternelle salutation de Paix et du Bien

Beverly Keene / Adolfo Pérez Esquivel

Coordinatrice / Prix Nobel de la Paix

Buenos Aires, le 12 décembre 2007.

Traduction libre et non officielle pour El Correo de : Estelle et Carlos Debiasi

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