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13 novembre 2011

La tragédie du capital en Occident
Pepe Escobar

par Pepe Escobar *

 

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Pendant que Rome brûle, les citoyens ne devraient pas glander, mais croire qu’un autre monde peut être possible et travailler ensemble pour ce monde là.

Voici un cours intensif sur la finance globale 2.0. La dette est dans l’Atlantiste, riche Nord. Les ressources sont dans le Sud global. Et le (réticent) banquier suprême du dernier recours est le Royaume du Milieu, personnifié par le « Tout-puissant Hu » (Jintao).

Le nom du jeu - Marx revisité par « Occupez le Monde » - est la lutte de classe. C’est le capitalisme de casino, alias le turbo-néoliberalisme financier, pratiqué par une élite de modernité liquide de « 1 pour cent », versus ceux-qui-ont-un-petit-peu, ceux-qui-n’ont-pas et ceux-qui-n’ont-rien, alias « 99 pour cent ».

Il ne pourrait pas y avoir de démonstration plus parlante que la tragédie grecque de la prise de contrôle la semaine dernière du «  festival de la dette  » de Cannes, de «  la thèse  » de Slavoj Zizek que le mariage capitalisme et démocratie est fini.

S’il y a quelque chose capable de définitivement terroriser l’oligarchie de l’Union Européenne (UE), c’est le concept de référendum populaire.

Comment osez-vous consulter la « populace » sur notre « Politique d’Austérité A Jamais », la seule capable de satisfaire les marchés financiers !

C’est assez pour faire des zombis non-élus tels que Mario Draghi (autrefois le vice-président de Goldman Sachs international) Président Banque centrale européenne (BCE), le Président de Conseil européen Herman van Rompuy (membre de la «  Commission Trilatérale  » et du «  Club Bilderberg  ») et le chef de la Commission Européenne (la Communauté Européenne) Juan Manuel Barroso, pour rêver d’un drone, de Forces Spéciales, de la zone d’exclusion aérienne de l’OTAN pour imposer leur volonté.

Capituler ou quoi d’autre

Le scénario de la BCE, Made in Francfort, vous est fourni par l’école dite TINA (There is no alternative = « il n’y a aucune alternative »). L’action ennuyeuse, monochromatique mélange de façon pré visible des privatisations sauvages avec l’anéantissement social.

L’Europe « démocratique » fonctionne comme au bon vieux temps de Brejnev ; une troïka - FMI, BCE, UE - pratiquant un une autorité totalitaire, même si c’est d’une façon bordélique.

« Merkozy » - pollinisation croisée bâtarde/robotisée de la Première ministre allemande Angela Merkel et du Président français néo-napoléonien Nicolas Sarkozy - peuvent seulement émettre un sinistre cri : « coon.... traaact ». « con… traaaact » - dans la contraction monétaire et fiscale sans fin prescrite par l’UE.

Qu’’importe que l’Italie ait un excédent primaire. Qu’importe que la dette privée et publique jointe de l’Italie soit 250 pour cent de son PIB – nettement moins que la France, le Royaume-Uni, les Etats-Unis et le Japon.

L’Italie est maintenant sous le volcan parce que le monstre UE « Cooon ... traaact » l’a jeté dans la récession.

Et le changement de régime n’y changera rien.

Ce n’est pas étonnant que le meilleur candidat pour succéder au Premier ministre Silvio « bunga bunga » Berlusconi soit Mario Monti ; un ancien patron de la Communauté européenne, président européen de la Commission Trilatérale et membre du groupe Bilderberg. Encore un astre essentiel du « 1 pour cent ».

« L’Europe » - dans une sous-secte des oligarchies Franco-allemandes - pensait que l’eurozone pourrait être sauvée par l’orwelienne Facilité de Stabilité Financière européenne (EFSF).

Mais maintenant même cette goutte - qui n’est rien qu’un bouquet de « garanties » gaspillées sur une société écran au Luxembourg - est sur le point d’être dévorée par le Zombi Suprême, le Dieu du Marché.

Donc un fonds de sauvetage monstrueux établi dans le style Goldman Sachs risque maintenant d’avoir un profond besoin de sauvetage lui-même. Vous ne pouvez pas inventer ce truc - même à Hollywood.

Pendant ce temps, la dame du FMI, vestimentairement irrépréhensible Christine Lagarde, tape couramment les membres des BRICS la Russie et la Chine pour un peu d’argent de poche.

Mais Madame Lagarde, embourbée dans un monologue avec ses boutons Dior, sait très bien que cela ne marchera pas et ne suffira pour « sauver » le modèle que le FMI, la BCE et « Merkozy » tiennent à appliquer.

Regardez au Sud, jeune homme

Les indignés mondiaux - de la Grèce et l’Espagne aux Etats-Unis et au-delà - au moins sont très conscients des machinations du « 1 pour cent ».

En apprenant de la performance stupéfiante de l’indice des matières premières de Goldman Sach - sommet du commerce à travers le monde. Cet indice essentiel du « 1 pour cent », double et triple même le prix de blé, riz et maïs, plongeant ainsi des centaines de millions de gens parmi les « 99 pour cent » à travers le globe dans une faim définitive.

Comment ne pas penser qu’un autre monde doit être possible ?

Les « 99 pour cent » des Occupez le Monde sont des rêveurs dans le sens de mai de 1968 – « Soyez réalistes, demandez l’impossible ». Rêveurs d’une manière rafraîchissante horizontale - pas verticale ou pyramidale-

Ils veulent sauver la politique - quand les politiciens ont perdu toute légitimité - comme débat d’idées, pas d’égos ou d’idéologies. La farce pitoyable du G20 la semaine dernière a montré encore une fois qu’ils ont raison.

Ils veulent une république de sens commun. Ils veulent une assemblée populaire dans chaque quartier et chaque village. Contre l’argent comme valeur morale et la finance casino comme Dieu courroucé, ils veulent sauver le pouvoir de l’’intelligence collective.

De quoi ont-ils besoin maintenant pour atteindre la masse critique à travers le monde entier.

Dans un sens, c’est comme s’il y avait eu une lecture collective de « L’homme révolté » d’Albert Camus, publié il y a soixante ans. Le « 1 pour cent » du temps très méprisé de ce qu’ils ont vu comme un petit Algérien, fils d’un travailleur et sans diplôme, se faisant passer pour un philosophe.

Mais avant la génération Google et Twitter Camus a montré comment la révolte émigre inévitablement de l’individu à une réponse collective, enchâssée dans sa belle formule « Je me révolte, donc nous sommes ».

Ne faites pourtant pas d’erreur. La contre-révolution du « 1 pour cent  » turbo-capital est déjà là - et ce sera sans pitié. L’histoire montre que chaque crise du capitalisme est « résolue » par la répression absolue.

Ce qui presse c’est la recherche de stratégies efficaces. Cela inclut tout, des appels à la grève générale à la discussion précédant la création de nouveaux groupes politiques.

Nous sommes tous responsables

L’Amérique du Sud, qui a survécu aux torrents des terribles « adaptations structurelles » du FMI et façonne maintenant lentement son intégration et indépendance, toujours niée par le « 1 pour cent » néocolonial et leurs satrapes locaux, peut être tout à fait utile.

Dans une discussion très éclairante avec les dirigeants du MST brésilien - le Mouvement des Paysans Sans Terre, un des mouvements sociaux les plus importants dans le monde - ils m’ont expliqué comment ils se sont adaptés de la lutte pour la réforme agraire à une bataille beaucoup plus subtile contre les intérêts des puissantes multinationales des l’agro-business qui ont passé une alliance compliquée avec le gouvernement de Lula.

Cela montre comment même un large mouvement social avec une énorme base populaire doit constamment ajuster sa lutte stratégique.

Sur un font parallèle, il faut une traduction urgente en français de « La Potencia Plebeya » (« Le Pouvoir plébéien »), recueil d’essais du vice-président bolivien Alvaro Garcia Linera, un des intellectuels les plus importants en activité en Amérique Latine.

Linera montre essentiellement comment le « 1 pour cent » et ses subalternes ont « vendu » le concept d’intérêt public comme une sphère séparée de la société civile. Et comment la société civile peut exister seulement comme politique si elle est subordonnée aux médiateurs ou aux prêtres politiques.

Cela, Linera argue, est un archaïsme qui renvoie à Hobbes et à Montesquieu. Et les « 99 pour cent » devraient en être conscients - et lutter contre cela.

Linera invente le concept de « citoyenneté irresponsable » pour décrire les masses votantes en état de confusion sous le charme d’une farce néolibérale.

Pour la « citoyenneté irresponsable », « l’exercice de droits politiques est juste une cérémonie de renoncement à la volonté politique et volonté de gouverner, pour la mettre entre les mains d’une nouvelle caste de propriétaires privés de la politique, qui s’attribuent à eux-mêmes la connaissance de techniques sophistiquées et impénétrables de décision et de gouvernement ».

Donc la lutte cruciale est contre ces « propriétaires privés de la politique » - et leurs maîtres du « 1 pour cent », au Caire ou Manhattan, Madrid ou Lahore. Le G20 ? Oubliez-le ; il ressemble plus à un « G7 milliard ». Si nous sommes vraiment indignés vis à vis d’un système qui doit être renversé, nous sommes tous responsables.

* Pepe Escobar
est l’auteur de :
« Globalistan : How the Globalized World is Dissolving into Liquid War
 »
(Nimble Books, 2007) ; « Red Zone Blues : a snapshot of Baghdad during the surge
 »
 ; « Obama does Globalistan  » (Nimble Books, 2009).

Titre Original : « The West’s tragedy of capital »

Al-Jazeera , novembre 2011.

Traduit de l’anglais pour El Correo par  : Estelle et Carlos Debiasi

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El Correo. Paris, le 13 novembre 2011.

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