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19 octobre 2025

L’Argentine et plusieurs pays européens vivent dans :
« L’ERREUR »

par Gabriel Fernández*

 

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Certains pays vivent dans l’erreur véhiculée par les médias, désormais relayée par les réseaux sociaux, et élaborent leur avenir sur la base d’un diagnostic faussé qui suppose que celui qui tombe est debout et que celui qui trotte est assis. BRICS et désinformation.

L’influence des médias m’a toujours semblé à la fois vaste et limitée. À toutes les époques, y compris au début de l’expansion d’Internet, j’ai reconnu leur large portée sur les différents espaces de la société, ainsi que leur caractère relatif, considérant que la réalité avait un impact sur les récits et contribuait à démêler divers mensonges. Au fil du temps, jusqu’à arriver à la période troublée que nous vivons actuellement, je dois apporter quelques corrections à ma propre approche et essayer de réfléchir aux climats politiques et culturels qui se sont installés.

Avec des similitudes et des différences, la concentration des espaces de communication en Argentine a un lien à ce que l’on observe en Occident, tout en présentant des aspects qui s’étendent à d’autres régions. Ces deux actions de communication ont eu un impact sur notre pays avec énergie et conviction, au point de démembrer l’image de facteurs qui sont visibles dans de vastes zones sociales, dont certains ont une incidence directe sur celles-ci.

Cette affirmation n est pas figée ; tout est en évolution, en particulier le nouvel équilibre planétaire. À moyen terme, celui-ci aura une influence partielle mais efficace sur notre pays, même si son issue est incertaine : il ne sera pas facile de coordonner ce qui restera après l’expérience [d’extrême droite] miléiste. Surtout parce que la destruction des ressources naturelles, de la souveraineté territoriale, de la recherche scientifique et technique et des secteurs liés à la santé et à l’éducation sont des éléments qui nécessiteront des efforts, une planification et des investissements pour être repositionnés.

Alors que notre pays démantèle ces secteurs et d’autres, une grande partie des nations s’efforce de les renforcer, ce qui crée un écart qui, au fil du temps, deviendra de plus en plus difficile à combler. C’est peut-être dans cette direction qu’il convient d’insérer la remarque développée dans ces pages : il n’est pas vrai que les nations ne peuvent pas disparaître ; les décisions officielles sont orientées, entre autres, vers la dissolution. Il est logique que cela se produise, car celui qui dirige l’État se présente - et agit - comme quelqu’un qui souhaite le détruire.

Au cours des trois derniers siècles, grâce à des liens préexistants et à des projets esquissés, de nombreux pays ont œuvré avec une certaine maturité à la configuration d’États qui prennent en compte la représentation des intérêts géoéconomiques profonds des peuples et des régions. Au cours des décennies qui ont façonné le monde actuel, l’essor des sociétés financières - armes et drogues - a déterritorialisé les États centraux de l’Occident. Il s’agit essentiellement des États-Unis et de leurs principaux alliés de l’Union européenne.

Les pays autrefois périphériques l’ont compris, chacun à leur manière, et ont pris des mesures visant à consolider leurs institutions, à garantir le contrôle fiscal, à transformer leur maigre PIB en dimension industrielle et à se regrouper pour assurer la sécurité, mener des recherches, commercer et investir. C’est ainsi qu’ont vu le jour, comme je l’ai décrit dans les deux volumes de « Fuentes Seguras  », l’Organisation de coopération de Shanghai, les BRICS et diverses associations régionales qui les ont renforcés et ont affaiblis sans volonté belliqueuse mais avec des résultats indéniables, le tandem DAVOS-OTAN qui semblait diriger le monde selon ses besoins.

Bien, pour ne pas m’étendre sur ce qui serait un autre domaine d’analyse, je précise : en Argentine, comme dans plusieurs pays européens, les médias – désormais confortés par divers réseaux sociaux - ont raconté une autre histoire. Avec une intensité profonde au cours des cinq dernières années, ils ont « informé » sur l’isolement de la Fédération de Russie et de la République islamique d’Iran, sur les difficultés de la République populaire de Chine et sur les intentions néfastes de ceux qui se sont rapprochés, d’une manière ou d’une autre, des nouvelles configurations.

La propagande introduite dans plusieurs communautés s’est avérée, dans une plus ou moins grande mesure, crédible pour des espaces qui, jusqu’à présent, se caractérisaient par leur capacité à observer, comprendre et traiter la réalité. Cela se constate dans plusieurs pays européens et, de manière très éloquente, dans notre puissance sud-américaine. Dans ces contrées, on a supposé que le péronisme était corrompu et on a même qualifié ce grand mouvement de responsable des maux du siècle dernier ; cette absurdité s’accompagnait de notions en totale contradiction avec ce qui s’était passé et ce qui était en train de se passer.

Mais il y a plus. Il faut le souligner. Dans cette partie du sous-continent, presque personne n’accepte que l’Allemagne soit passée du statut de moteur économique du Vieux Continent à celui d’un pays en déclin persistant.

Ni que la France s’effondre au milieu de plans d’ajustement dont le seul but est d’élaborer des « solutions » fondées sur davantage de coupes budgétaires. Et encore moins que le Royaume-Uni, avec sa City absorbante, détériore son propre environnement économique et social.

Sans parler de la nécessité de comprendre la formidable crise qui déchire les États-Unis de l’intérieur.

Tous ces pays qui dirigent le centre occidental sont accablés par l’augmentation des dépenses consacrées à la défense et par le prix du carburant, après l’attaque contre Nord Stream.

Comme dans l’imaginaire argentin, ces pays restent prospères et puissants, la conclusion diffusée par les médias et les réseaux sociaux, imprégnée dans d’énormes pans de la société, est qu’il faut suivre leur exemple et s’associer à eux. En réalité, alors que la multipolarité progresse et que les modèles productifs s’imposent, on mise ici sur le repli et l’établissement de partenariats avec ceux qui sombrent inexorablement. En conséquence, entre une version historiographique qui inverse les termes et identifie le péronisme à la débâcle, et une vision globale qui inverse les termes et identifie le néolibéralisme à la croissance, la confusion règne au niveau local.

Mais ce n’est pas tout. Croyez-moi. Dans le domaine de la psychologie, on dit que les erreurs peuvent toujours avoir une solution, si l’on a le courage de les admettre, et que celui qui a commis une erreur et ne la corrige pas commet une erreur encore plus grave.

Pourquoi ces prémisses ? Eh bien, l’autre élément qui témoigne du succès narratif occidental repose sur le fait que, parallèlement à ces points, notre pays continue de supposer que l’Amérique latine est totalement subordonnée aux États-Unis et qu’il est inapproprié d’essayer d’emprunter ici une voie qui serve ses propres intérêts. L’existence d’un bras de fer de grande ampleur est ignorée.

Il convient de mentionner certaines des nations qui ont choisi, à des degrés divers, de tracer leur propre voie.

À vol d’oiseau : le Mexique, la Colombie, le Venezuela, le Nicaragua, Cuba, le Brésil, l’Uruguay, la Bolivie, le Pérou. Le seul acteur important qui a choisi la subordination et la récession est l’Argentine.

Nos compatriotes ne le croient pas : ils ignorent même que le Venezuela est en tête de l’indicateur de croissance du PIB dans la région, que la Bolivie n’a pas pris le virage attendu mais se tourne vers son intérieur pour résoudre la transition, que le Pérou - malgré son oligarchie canalisée au Congrès et ses injustices palpables - a lié son économie à celle de la Chine grâce au méga-port de Chancay. Sans parler de l’orientation adoptée par le gouvernement aztèque, ou du positionnement décidé par le voisin le plus proche après s’être débarrassé du bolsonarisme et s’être engagé fermement dans la construction multipolaire.

En d’autres termes, notre cher pays vit dans l’erreur. Il élabore son avenir sur la base d’un diagnostic extraordinairement déformé. Il suppose que celui qui tombe est debout et que celui qui trotte est assis.

Les délégations chinoise et indienne, rien de moins, l’ont clairement expliqué en leur temps et ont invité cette puissance du sud à se joindre au signe + de l’histoire naissante. Depuis ces lignes, j’ai soutenu cette déclaration car elle était conforme à l’intérêt national. Les dirigeants et les entrepreneurs, mais aussi de nombreuses références politiques populaires, de nombreux journalistes et quelques analystes internationaux, tant d’économistes, toute la clameur scandaleuse qui émerge des écrans les plus divers, sont restés enfermés et gouvernés par la propagande qui brouille le présent, et ont continué à utiliser leurs métiers comme des drones destinés à désagréger l’une des régions les plus importantes du monde.

Tout cela est une erreur. Une erreur commise intentionnellement et dont les bénéficiaires sont identifiables. Il est impossible d’avancer si la vérité se dissout et si des routes mal tracées dès leur origine sont mises en place.

Gabriel Fernández* pour La Tecl@ Eñe .

La Tecl@ Eñe . Buenos Aires, le 13 octobre 2025.

*Gabriel Fernández. Directeur de La Señal Medios. Il est responsable du département journalistique de Radio Gráfica FM 89.3./ Sindical Federal. Il a été directeur de la rédaction du magazine « Questión Latinoamérica », chef de la section Politique nationale du quotidien « La Voz », chef de la section Coordination du quotidien « Sur », directeur de la rédaction du journal des Mères de la Place de Mai et de l’agence Telam. Il a travaillé à l’agence de presse latino-américaine « Prensa Latina » et au supplément Zona du quotidien « Clarín ». Il a réalisé plusieurs émissions de télévision sur Canal Metro, Telemax, Argentinísima Satelital et à la radio sur Splendid, Argentina, La Tribu, Cooperativa, Onda Latina, El Mundo, Rock and Pop.

 Auteur de : « La claudicación de Alfonsín » (1986), « El sindicalismo en la era menemista » (1990) et « Reportaje a las Madres de Plaza de Mayo » (1997), entre autres livres. Il a reçu le « Prix Jauretche 2005 » pour son travail dans le domaine du journalisme écrit.

 Il a reçu les prix « Sin Anestesia », « Oesterheld » à dix reprises et « Juana Azurduy ».
Il a travaillé au service de presse de la députation de Buenos Aires et au service de presse du Secrétariat National aux Droits de l’Homme. Enseignant, il donne des cours, des conférences et des exposés sur des thèmes politiques et de communication sociale dans différentes régions du pays.

Traduit de l’espagnol depuis El Correo de la Diáspora par : Estelle et Carlos Debiasi.

El Correo de la Diáspora. Paris, le 19 octobre 2025.

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