Portada del sitio > Imperio y Resistencia > L’Amérique Latine doit s’en souvenir, réfléchir et choisir entre deux (…)
Cet article peut vous sembler éloigné de notre ligne éditoriale, mais il ne l’est pas tant que ça.
Cette fameuse guerre en discussion entre européens et nord-américains va obliger l’Amérique Latine à se
positionner très vite géopolitiquement. Alors cet article servira peut être d’outil aux dirigeants au sud du Rio Grande (frontière nord mexicaine) pour choisir entre un monde sanguinolant et caduc ou un autre monde en formation aussi cruel "mais" plus diplomatique, pour le moment.
Cordialement, Carlos Debiasi
UNE GUERRE CONTRE L’EURO
Par Rafael Poch
La Vanguardia
L’élan des gens ordinaires pour la paix est plus que clair, mais comment explique-t-on qu’après avoir activement collaboré ou avoir applaudi trois campagnes militaires durant les dernières 13 années (Irak, la Yougoslavie et l’Afghanistan), la matrice de l’Union Européenne s’oppose, maintenant, à la guerre contre l’Irak ? Qu’est-ce que rend "pacifistes" les financiers de Francfort, et pourquoi ne voient-ils pas les éditorialistes de " The Economist" ne voient pas comme « claire » la guerre de Bush ?
La réponse peut être que nous sommes devant un bras de fer décisif, et très significatif, entre le dollar et l’EURO.
Mai 2001
Javier Solana, "ministre d’extérieur" de l’UE, est à Moscou pour le "sommet technique" Russie- UE. Le principal résultat du sommet est la création d’un "groupe mixte" pour étudier la possibilité que le commerce bilatéral soit fait en EURO au lieu d’en dollars. Il résulte que 40% de l’échange commercial russe est avec l’UE (les Etats-Unis 8%) et le principal de cet échange est du gaz et du pétrole. La Russie vend déjà un tiers des combustibles consommés en Europe et la proportion augmentera de 10% durant les prochaines années. Solana est rayonnant.
Il manque huit mois pour que la monnaie européenne soit dans les poches des gens, explique -t-il. Quand cela se produira, "nous aurons des surprises positives". Solana cite "des changements dans le monde du pétrole", qui vont rendre possible le pas russe vers l’EURO et l’abandon du dollar. Le pétrole est acheté et il est vendu dans le monde en dollars, mais la moitié des exportations de gaz russe est déjà effectuée en EURO et quelque chose de semblable se passe avec le bois. "l’Irak est déjà passé à l’EURO et l’Algérie et la Libye, le feront dans le futur", dit Véranda. (Voir LaVanguardia, 18/05/2001: "la Russie décide avec l’Union Européenne d’étudier l’utilisation du EURO dans ses relations économiques").
Effectivement, l’Irak est passé a l’EURO en novembre 2000. Ce fut une mauvaise affaire parce qu’alors le EURO était à 80 centimes de dollar et le changement a entraîné des pertes en millions, mais était dicté par des considérations politiques. Radio Liberty, l’ancien instrument de la CIA pour le bloc soviétique, a expliqué ainsi les nouvelles de ce jour: "Le pas de Bagdad du dollar à l’EURO pour le commerce de son pétrole est une tentative de punir la ligne dure de Washington dans l’affaire des sanctions et d’encourager les Européens à la défier".
Janvier 2002
Romano Prodi, président de la Commission Européenne, première autorité de l’UE, présente l’EURO dans la bourse de New York, capitale mondiale du dollar. L’événement est entouré d’une atmosphère malsaine. La presse américaine élude l’affaire. Le directeur de la bourse ne va pas passer à l’acte "par maladie". Les Etats-Unis n’ont pas pris l’EURO au sérieux ? Au contraire, ils le prennnent très au sérieux. Là où ils ne le prennent pas au sérieux c’est en Espagne; dans la presse espagnole l’introduction de l’EURO est réduite à une succession d’anecdotes sur l’utilisation populaire de la monnaie et les problèmes liés au changement. Au contraire, à Moscou, où ils ont l’habitude des problèmes, ils ont l’habitude de penser global, je rassemble des réflexions sur les conséquences de l’introduction de l’EURO avec la corrélation de forces globales. Je cite l’avis compétent de Fabian Estapé dans ce journal (La Vanguardia, "le jour où le commerce de pétrole sera fait en EURO, je croiraisdans l’EURO") et je écris mon article :
"Ouvrir une brèche qui déplace le dollar dans les affaires énergétiques est quelque chose de sérieux et lourd d’implications". "Les Américains savent de ce quoi il s’agit et vont être implacables, comme ils le sont toujours quand il s’agit d’argent et de concurrents". Ensuite je mentionne deux avis d’experts russes :
"Il est plus que probable que les Etats-Unis feront usage des nombreux moyens dont ils disposent, y compris ce qui est extra-économiques, pour empêcher un pas massif de l’utilisation du dollar vers l’EURO", dit Olga Butorina, de l’Institut de l’Europe de l’Académie de Sciences. "L’affaiblissement de la zone euro", sans limite des moyens, va être une des lignes maîtresses de la politique américaine, et, même, "la condition stratégique pour la survie des Etats-Unis comme chef géopolitique mondial", pronostique Mijail Deliaguin, directeur de l’Institut de problèmes de la globalisation de Moscou. (Véase "EURO", Journal de Moscou, 24/01/2002). La prochaine guerre fait partie de cette réponse (une réponse vraie "de rogue state" - état voyou -) et c’est pourquoi celle-ci il est inadmissible pour l’Union Européenne.
Jusqu’à aujourd’hui
L’économie des Etats-Unis traverse une phase sensible avec un déficit de 6.3 milliards de dollars équivalent à 60% du PNB et avec un retour aux déficits budgétaires de centaines de milliers de millions. Tout cela suffit pour dévaluer le dollar, mais, depuis 1945, la monnaie américaine dispose des "subventions globales énormes" qui incombent à sa position dominante. Quatre cinquième des transactions internationales, la moitié des exportations et deux tiers des réserves globales en devises sont faites et sont en dollars. Le commerce pétrolier en dollars est un de pilier de ce statut. Depuis qu’il existe l’EURO et la zone euro, cette situation a été rendue plus anormale parce qu’elle ne correspond pas au poids réel de l’économie des Etats-Unis dans l’économie globale.
La zone euro a déjà une plus grande participation sur le marché global que les Etats-Unis et ses comptes sont plus assainis. Mais ce qui est véritablement une menace pour les Etats-Unis est l’important commerce de l’Union Européenne avec le Moyen-Orient. Après l’extension du 2004, l’Union Européenne aura 450 millions d’habitants et achètera plus de la moitié de ce qui est brut à l’OPEP. C’est une question de peu de temps pour que l’EURO remplace le dollar dans le commerce pétrolier, dit le chef du département d’analyse de marché de l’OPEP, Javad Yarjani.
Après l’Irak, aussi l’Iran il a étudié son transfert vers l’EURO et sa banque centrale a déjà fait des réserves en cette devise. Le ressentiment pour les Etats- Unis dans la région pourrait avoir des effets d’avalanche. Et non seulement dans la région ; La Corée du Nord a aussi cessé d’utiliser le dollar dans son commerce extérieur pour des raisons politiques. Le Vénézuéla de Chavez voit avec des yeux très bons cette perspective, ce qui peut avoir un rapport avec l’applaudissement des Etats Unis au coup d’Etat qui a essayé de renverser en avril le Président vénézuélien. Le Vénézuéla, la Russie et la Chine ont diversifié les réserves de leurs banques centrales. Jusqu’aux bons du trésor du Brésil, vendus en EURO, m’explique un diplomate brésilien à Pekin...
Et derrière tout cela apparaissent des mots plus grands; vacillements japonaise sur le pari de la plus grande réserve bancaire (en dollars) du monde, fin du monopole global en dollars, diminution du pouvoir global américain.
"La guerre est une stratégie des USA pour prévoir une fuite de l’OPEP vers l’EURO comme monnaie de référence dans les transactions du pétrole. Le contrôle (militaire) du pétrole de l’Irak permettra aux Etats-Unis de démonter le contrôle des prix de l’OPEP. Cette guerre n’a rien à voir avec la menace des vieilles armes de destruction massive de Saddam, ni avec le terrorisme. Cette guerre sera faite pour la devise globale pour le pétrole ", explique le Professeur William Clark de l’université Johns Hopkins, dans un article assez clair (http://www.ratical.org/ratville/CAH/RRiraqWar.html).
Et dorénavant
Compte tenu de la rivalité commerciale entre les Etats-Unis et de l’Union Européenne, l’actuelle crise de l’OTAN est une conséquence logique. L’Union Européenne peut-elle avoir une politique économique et extérieure propre, quand la structure de sécurité continentale sera hypothéquée à une superpuissance dominante qui est son principal rival commercial ? Si la réponse est "non", il faut se défaire de l’OTAN, cet OTAN là que les Etats-Unis veulent transformer en instrument de leur stratégie d’intervention globale.
Une autre réflexion est de savoir si l’Union Européenne est disposée et formée pour assumer les conséquences de son propre impact. Si la réponse est "en effet", c’ est le calendrier que citait l’année passée dans "Die Zeit" un experte de la Société Allemande de Politique Extérieure; "2004 extensions à l’est de l’UE ; 2007, Constitution Européenne; 2010, mise en commun de la participation européenne à le FMI, et, par conséquent, je transfère de la centrale du Fonds de Washington à Bruxelles ; 2012, création d’un poste commun européen dans le Conseil de la sécurité de l’ONU.... ".
Je ne sais pas si les Etats-Unis sont disposés à reformuler des piliers tellement fondamentaux de l’actuel "ordre". Il n’y a rien de plus imprévisible qu’une superpuissance mondiale mise à pied de son statut historique. Nous venons de le voir en URSS, avec des résultats étonnamment pacifique.
Une Europe plus articulée et plus émancipée de son demi - siècle de tutelles et servitude (la tutelle soviétique a disparu il y a 13 ans de la moitié orientale de l’Europe, l’américaine continue là), se comportera en accord avec le défi des temps, ou rééditera le vieil ordre qui l’a déjà détruite par deux fois le siècle passé ?
Les actuels niveaux, européens, de consommation des ressources épuisables que refusent les générations futures et son prix "de marché", essence même de l’actuelle rupture nord-atlantique, font partie de ce vieil ordre destructif sans futur.
Nous sommes dans le principe d’un nouveau monde et l’actuel militarisme des Etats-Unis seul est une donnée entre beaucoup d’autres possibles. Il se passe ce qu’il se passe, dans la guerre du dollar contre l’EURO non seulement il y a des catastrophes mais aussi de grandes occasions sous forme d’espaces autonomes ; pour les pays en développement comme la Chine, pour un monde multipolaire et pour la majorité des gens qui sont là pour un monde moins injuste, comme démontrent les manifestations énormes contre la guerre du pétrole.
À court terme, il est probable que la publicité autour de la prochaine guerre ne présente déjà pas ce bloc uni de pensée unique d’occasions précédentes. Il se peut, même, que les journalistes modèrent leur habituelle publicité autour de la guerre et imbibés pour des causes plus décentes, qu’ils nous informent, non de ce que souhaite l’establishment, mais de ce qui arrive en réalité. Ou, tout au moins, de ce qu’ils croient qu’il se produit depuis l’entendement plurielle de l’éthique professionnelle.
Titre original: Una guerra contra el Euro
La Vanguardia, est un quotidian catalan de Espagne.