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4 de enero de 2005

De l’Amérique latine à l’Irak :
Que s’est-il passé ?

 

Par Juan Gelman
Página 12. Jeudi, 8 décembre 2005

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La tradition veut que la désorganisation du chaos précède la formation du monde et ce n’est, évidemment pas, volontaire. Le gouvernement Bush, pour sa part, y contribue délibérément en Irak, ce qui remet en cause cette ancienne conception : et pour cause, il arrive que bon nombre d’atrocités attribuées aux milices chiites ou sunnites soient en fait l’œuvre de forces spéciales et de commandos dirigés par le gouvernement et entraînés par des spécialistes yankee (www.globalresearch.ca, 2-12-05).

Il est fréquent de découvrir des corps de personnes qui ont été menottées, torturées et fusillées. C’est par exemple le cas de ces 17 petits commerçants et chauffeurs de taxi du village de Taji, à 16 km au nord de Bagdad, qui ont été enlevées en mai 2005 par une cinquantaine d’hommes de l’armée iraquienne, qui sont descendus de véhicules militaires pour les chasser de leurs maisons (www.newsday.com, 15-5-05). Ou de ces 15 paysans arrêtés sur un marché de Bagdad, et que l’on a retrouvés, au début de ce même mois, tués d’une balle dans la tête dans la zone industrielle de Kasra-Wa-Atash (BBC, 6-5-05). Tous sont victimes d’escadrons de la mort, qui comparés aux auteurs d’attentats suicide - qui tuent aussi des civils sans discernement - exercent une violence plus systématique.

Il est établi que peu après l’invasion, les Etats-Unis [1] ont commencé à recruter d’ex-membres des forces de sécurité de Saddam Hussein pour faire taire la révolte naissante et rouvrir des centres de torture tels que celui d’Abu Ghraib. Au même moment, des milices chiites radicales se dispersaient sur le territoire iraquien, avec le même objectif. Et chacun de ces groupes a été formellement incorporé au Ministère de l’Intérieur, sous les gouvernements provisoires successifs, instaurés par les troupes de l’occupant. Les chiites et les sunnites, considérés comme des ennemis, partagent les bureaux de ce service, ainsi que les missions qui leur sont confiées par les différentes autorités en poste.

Washington n’a que trop d’expérience en matière d’exécutions extrajudiciaires. La CIA elle-même a informé qu’il y en a eu 21.000 pendant la guerre du Vietnam (www.serendipity.li/cia/operation ph..., 19-2-96). Les conseillers américains enseignent aux nouvelles forces de sécurité iraquiennes en quoi consiste "l’option El Salvador ", le programme contre-révolutionnaire de Reagan qui a fauché la vie de dizaines de milliers de paysans salvadoriens. Il s’avère impossible de savoir avec exactitude combien de civils iraquiens ont été victimes des escadrons de la mort. Faik Baqr, directeur de la morgue centrale de Bagdad, a déclaré que le nombre de décès suspects sous le régime de Saddam était de 200 à 250 par mois, dont 16 tués par balle. Sous l’occupation américaine, ce chiffre oscille entre 700 et 800 morts par mois, dont 500 par armes de feu (www.realcities.com, 27-6-05). On voit qu’il y a bien, maintenant, une démocratie en Irak.

L’actuel Ministre adjoint de l’Intérieur, délégué aux services de renseignements, Hussein Ali Kamal, soutient que les assassins en question ne font pas partie de son personnel mais qu’il s’agit d’insurgés déguisés en policiers qui tuent pour susciter des affrontements entre sectes rivales (BBC, 13-7-05). De leur côté, les journalistes de terrain signalent "l’incroyable sens d’impunité qui règne pour les cas d’enlèvements et les exécutions" (The Observer International, 3-7-05), et montrent du doigt l’armement et les véhicules militaires employés, et qui sont propres aux forces de sécurité du "nouvel Irak".

Yasser Salihee, un journaliste du groupe de presse Knight Ridder, a réuni plusieurs témoins disposés à dénoncer la participation de commandos officiels dans 12 meurtres de civils. Steven Castel, principal conseiller américain du Ministère de l’Intérieur iraquien et chef du service d’intelligence de la DEA, a nié les accusations, mais l’affaire n’en est pas restée là : quelques jours après, un franc-tireur américain a mis un terme à la vie du journaliste. (Moscou Times, 2-12-05). Comme par hasard…

La Maison Blanche parle de retirer 50.000 soldats l’année prochaine, mais n’a pas abandonné son objectif principal : contrôler militairement l’Irak par l’intermédiaire d’un gouvernement fantoche pour tirer profit de ses richesses énergétiques, et éventuellement même, nourrir le chaos et les conflits sectaires afin de maintenir le pays occupé dans l’instabilité. Pour cela, elle n’a pas hésité à engager et à former des assassins professionnels : les "rapaces" ne peuvent pas se permettre de voir un gouvernement iraquien convoiter de trop près l’idée fantaisiste de mettre fin à la vague de "privatisations" pétrolières en cours, ni d’annuler l’ouverture des réserves d’or noir prévue à destination d’investisseurs étrangers sélectionnés d’avance, ouverture qui selon The Independent, reviendrait à faire gagner aux compères de W. Bush, quelque 200 milliards de dollars.

On comprend mieux maintenant ce que voulait dire le président américain quand il parlait de "la libération" de l’Irak.

L’imaginaire exalté des « néoconservateurs » ne s’arrête pas là. Le Pentagone a élaboré il y a quelques années un plan secret destiné à servir de prétexte pour intervenir militairement dans des pays où des groupes terroristes "mettraient en danger leur souveraineté" (www.collectioncf72.blogspot.com, 15-405). Et ce plan consiste, comme par hasard, à contribuer à intensifier intentionnellement le terrorisme.

Seymour Hersh, journaliste du New Yorker réputé, a révélé au mois d’avril qu’en plus d’infiltrer ces organisations par le biais d’agents provocateurs qui financent et stimulent leurs attaques, le Pentagone créait lui aussi ses propres groupes terroristes et autres escadrons de la mort, comme ceux qui existent en Irak. C’est un W. Bush très enthousiaste qui a signé à D. Rumsfeld des ordres secrets qui lui donnent pleine autorité pour transformer le monde entier en "zone libre" dans le cadre de ces opérations secrètes, qui ne sont pas supervisées par les chefs militaires et dont ils n’apprennent l’existence qu’une fois qu’elles sont exécutées. A ce sujet, notons que le Pentagone dispose d’un budget de 500 millions de dollars pour recruter des "milices" locales dans différentes parties du globe.

Son modèle de référence, note Hersh, est la répression brutale lancée dans les années 50 par Londres à l’encontre des Mau Mau du Kenya : les troupes britanniques avaient alors mis en place des camps de concentration, organisé leurs propres groupes terroristes, et assassiné des milliers de civils catalogués comme "rebelles" combattant la domination coloniale du Royaume-Uni. Il s’agit là de la deuxième étape de soi-disant « guerre antiterroriste » dans laquelle Washington organise davantage de terrorisme contre "l’insurrection planétaire". C’est-à-dire, davantage de terrorisme d’État contre des peuples et des pays qui ont des intentions de souveraineté. Et surtout des pays qui ont du pétrole, comme l’Iran.

Traduction de l’espagnol pour El Correo: Pierre Molines


Notas:

Notas

[1John Dimitri Negroponte l’ambassadeur des Etats-Unis en Irak a été l’organisateur à cette époque comme il l’avait fait en Amérique Centrale avec la "Contra".
Lire dans El Correo : L’ambassadeur en Iraq de Bush, John Dimitri Negroponte reste l’ombre impunie de la terreur au Honduras de 1980 NDEC

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