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13 juillet 2012

La reconnaissance d’un plan systématique de vol et d’appropriation d’enfants sous la dictature argentine

par Estelle Leroy-Debiasi *

 

Après un procès historique en Argentine, les condamnations sont tombées il y a quelques jours pour le vol de bébés nés de femmes détenues sous la dictature.

Visés l’ancien général Jorge Videla ( cinquante ans de prison) et huit autres accusés. Ces enfants ont été adoptés illégalement par des familles proches des militaires, et donc soustraits à leur vraie famille. Sur 500 enfants ainsi volés, à ce jour seuls 105 d’entre-eux ont été retrouvés par les Grands-Mères de la place de Mai et ont pu ainsi retrouver leur véritable identité. (Voir notamment les trois précédents articles publiés ces derniers mois dans El Correo sur ce sujet :

Au-delà des condamnations, la « victoire », si l’on peut parler ainsi, fut que les juges ont estimé qu’il y avait bien eu un plan systématique de vol de bébés nés durant la captivité de leurs mères sous la dictature. Ce que réclamaient les victimes, alors que les Grands-Mères de la place de Mai ont mené combat pendant plus de trente ans.

Le plan systématique du vol, de l’enlèvement à leur famille de ces enfants nés lors de la captivité de leur mère montre bien une volonté organisée de la dictature de détruire certains pans de la société. A l’annonce du verdict, « ils n’ont ni regardé les familles, ni montré quelque émotion, ni regret, ni rien que d’un point de vue humain on aurait pu espérer » a souligné Estela de Carlotto, dans Pagina 12.

Certaines condamnations ont paru faibles comme celles du médecin en charge des accouchements à l’Esma (une peine de 10 ans), ou d’une des femmes qui s’est appropriée un des enfants (une peine de cinq ans). Ce qui soulève un point délicat, car le vol de bébés, en tant que tel n’est pas qualifié comme un délit grave, souligne t-on du coté des Grands–Mères de la Place de Mai, or il est particulièrement dans ce cas puisqu’il a eu lieu dans le cadre du terrorisme d’Etat, c’est plus qu’un vol, puisqu’il est étroitement lié à la mort de la mère.

Toutefois, le Tribunal a donc pu dans ce procès prouvé le caractère systématique du vol d’enfants, comme le soulignait la juge María del Carmen Roqueta, presidente de Tribunal Oral Fédéral 6, aux travers des faits d’enlèvement , torture, détention, disparition de la mère, et disparition de l’enfant. La disparition de l’enfant faisait donc partie d’un plan systématique de disparitions de personnes ... Il a pu être démontré que le sort des mères était scellé, qu’elles allaient mourir mais qu’auparavant, on attendait qu’elles accouchent, l’enfant devait du coup disparaître sous une autre identité car le fait d’exister allait générer des questions.

Les procès en cours concernant la dictature et le terrorisme d’Etat marquent toute la société argentine. Une récente enquête a montré que 79% des personnes interrogées approuve la politique du gouvernement en matière de droits de l’homme, ce qui favorise une nouvelle compréhension de que fut le terrorisme d’Etat et comment faire face à ce passé, dans un devoir de mémoire.

Estelle Leroy-Debiasi
pour El Correo. Paris, le 13 juillet 2012.

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