Accueil > Notre Amérique > Alerte aux multinationales pétrolières et gazifières en Bolivie.
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Evo Morales a clairement dit que, comme président bolivien, il ne confisquera ni expropriera les biens des compagnies pétrolières internationales qui opèrent dans son pays, parce que "nous avons besoin des partenaires, non de patrons".
Ainsi sonne la solution au pillage des ressources énergétiques de la Bolivie. On entend bien, mais cela va être compliqué, parce que le président n’a devant lui ni partenaires ni patrons, mais un petit groupe de cinq multinationales prédatrices qui contrôlent autour de 80% du pétrole et du gaz naturel de cette nation, de telle sorte que penser à une association équivaut à ce que Dracula pratique une transfusion sanguine.
Les multinationales Repsol, Andines (propriété à 50% de la précédente), Total, Petrobras et British Gaz monopolisent 80 % des réserves trouvées du gaz naturel et de 79% de celles en pétrole, et sont habituées à ce que leurs bénéfices soient trois fois supérieurs à ce qu’elles obtiennent dans d’autres pays et sur d’autres marchés, en plus de la gestion de la politique énergétique bolivienne.
Après le triomphe électoral d’Evo Morales, on a remarqué les premières réactions de ces groupes : du sourire forcé du représentant du Repsol ("nous continuerons à travailler comme jusqu’à présent, pour le bénéfice du pays", tandis que le prix de ses actions en bourse chutaient) jusqu’au "point mort" annoncé par Petrobras ("nous maintiendrons gelés les projets d’investissement en Bolivie jusqu’à ce que soit définie la politique du secteur").
Andine et Repsol monopolisent 36.6 % des réserves trouvées du gaz naturel et de 39.2 % des pétrolières. Petrobras a pour sa part respectivement 16.5 et 12.6 %. La française Totale 12.6 et 10.4 %, et la Britannique BG 14.3 et 16.6 %.
Elles sont sorties non seulement fortifiées de la chute de deux présidents boliviens ("Goñi" et Mesa), mais ont étendu leur déjà abondante part du gâteau énergétique bolivien, et de plus font face à la promulgation d’une nouvelle loi d’hydrocarbures, en vigueur depuis mai 2004. Pour cette raison, il est difficile qu’ elles acceptent de façon civilisée l’invitation d’Evo Morales : "si elles se subordonnent aux normes boliviennes, bienvenues, mais elles ne peuvent pas être celles qui contrôlent le gaz comme des propriétaires".
Carlos Villegas Quiroga, un des conseillers du « Mouvement vers le Socialisme » (MAS) et possible ministre d’hydrocarbures de la Bolivie, a tracé au journal argentin El Clarín (Lire en espagnol : "Hay que revisar el precio del gas que le vendemos a Argentina") quelques lignes d’action une fois qu’Evo Morales occupera la Présidence de la République : Nous allons réviser les prix du gaz, qui sont extrêmement faibles, si on prend la Californie comme valeur de référence. Là-bas le million de mètres cube coute entre 12 et 15 dollars et nous, le Brésil et l’Argentine, dans le meilleur des cas nous recevons 2.30 dollars, voire jusqu’à 1.80. Nous allons par conséquent, converser entre latino-américain, en insistant sur le fait que comme pays exportateurs de ressources naturelles qu’ils sont, le Brésil et l’Argentine veulent toujours obtenir le meilleur prix. Ils devront comprendre que nous avons aussi ces mêmes espoirs avec notre gaz.
Les entreprises étrangères, dit il, ont observé tout ce temps les tensions sociales et ont eu l’occasion de s’asseoir pour négocier avec deux gouvernements et le résultat a été zéro. Maintenant, avec le degré de légalité et de légitimité que nous avons obtenu, nous allons mettre en place la façon de profiter des nos excédents. Je me dépêche de dire que la récupération de la propriété des hydrocarbures aura lieu dans un maximum compris entre quatre et six mois, avant la formation de l’Assemblée Constitutive, puisqu’il ne conviendrait pas de déléguer à l’assemblée un sujet comme celui-ci.
Il se peut que nous connaissions différentes réactions (de multinationales), mais la majorité devra s’en tenir aux nouvelles règles de jeu parce que c’est une ressource énergétique pour le futur, elle est rentable, il y a une grande demande des pays frontaliers, mais aussi dans les pays développés qui ont besoin du diesel écologique. Les pétrolières vont rester parce que nous leur garantissons de récupérer leur investissement et l’obtention d’un bénéfice normal, le même qu’elles obtiennent dans d’autres pays, de 15 à 18 %, alors qu’elles obtenaient ici, entre 35 et 40 %, à quoi il faut ajouter le caractère discrétionnaire dans la gestion de la politique énergétique, qui sera dorénavant entre les mains de l’Etat bolivien.
Repsol illustre dles deux derniers cas cités par le conseiller du MAS (l’exportation bon marché et bénéfices démesurés). Il résulte que la multinationale exporte du gaz à l’Argentine, à un prix entre 1.8 et 2.3 dollars le million de pieds cube. Qui achète ? Facile : Repsol Argentine, qui vend une portion au marché de ce pays et réexporte le reste au Chili, évidemment à des prix beaucoup plus élevés. Résultat : une bonne affaire, pour elle, évidemment.
Le panorama, donc, n’est pas évident, mais le chef indigène pourra en effet appliquer immédiatement la législation en vigueur pour tenir un de ses engagements : récupérer les hydrocarbures pour les boliviens. La « Loi d’Hydrocarbures 3058 » du 17 mai 2004 établit : "on récupère la propriété de tous les hydrocarbures en ’sortie de puits’ pour l’État bolivien ; l’État exercera, à travers YPFB (Gisements Pétrolifères Fiscales Boliviens), son droit de propriété sur la totalité des hydrocarbures. Les directions qui auraient souscrit des contrats ’à risque partagé’ pour exécuter les activités exploration, exploitation et commercialisation et obtiendraient des licences et concessions à l’abri de la Loi d’Hydrocarbures numéraux 1689, du 30 avril 1996, devront se convertir obligatoirement aux modalités de contrats établis par la présente Loi et s’adapter à ses dispositions dans un délai de 180 jours... On refond YPFB en récupérant la propriété étatique des actions des boliviens dans les entreprises pétrolières capitalisées, de sorte qu’ils puissent prendre part à toute la chaîne productive des hydrocarbures... ", ce que n’ont pas fait ses prédécesseurs.
Les parts du gâteau :
Magnanime et au cri "un combat direct contre la pauvreté", le Conseil des Représentants de la Commission Nationale des Salaires Minimaux a autorisé une augmentation pas de 3 mais de 4 % pour le salaire minimum, qui s’est traduit par un généreux accroissement, moyen, de 1.87 pesos quotidien à partir de janvier prochain.
Traduction de l’Espagnol pour El Correo : Estelle et Carlos Debiasi
La Jornada - MEXICO SA . Le Mexique. Mercredi 21 décembre 2005.