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29 avril 2021

« Parfum de femme dans la coordination US de la ‘Sous-Amérique’ »
LE COMMANDO SUD S’EN VA EN GUERRE

par Jorge Elbaum*

 

Toutes les versions de cet article : [Español] [français]

Le chef du Commandement sud du Pentagone, l’amiral Craig Faller, a conclu sa tournée d’adieu en République dominicaine la semaine dernière, participant à la Conférence sur la sécurité des nations des Caraïbes (CANSEC) avec les chefs militaires des pays engagés dans les objectifs de Washington d’isoler Cuba, le Venezuela et Nicaragua, et en même temps d’ entraver et/ou de réduire les liens de coopération de la Chine et de la Russie avec la région.

Il y a un mois, l’amiral Faller s’est exprimé devant le comité de suivi des activités de défense du Sénat, à Washington, pour donner sa vision de la situation dans la zone où le Pentagone prétend êtendre sa souveraineté, comme le montre le bouclier présenté par le Commandement.

Subamérica en las garras del Comando Sur


La Sous-Amérique dans les griffes du Southern Command
Subamérica en las garras del Comando Sur


Dans ce rapport du 16 mars, le chef du SOUTHCOM met en garde les parlementaires :

« Cet hémisphère est attaqué. Les principes et valeurs démocratiques qui nous unissent sont activement sapés par les violentes organisations criminelles transnationales (ECT), la République populaire de Chine et la Russie. »

Plus tard, il ajoute :

« Nous perdons notre avantage de position dans cet hémisphère et une action immédiate est nécessaire pour inverser cette tendance. »

Selon la position de Faller, les menaces détectées incluent des acteurs étatiques régionaux malveillants (ARE) - tels que Cuba, le Venezuela et le Nicaragua - qui perpétuent la corruption et défient la liberté, ouvrant la porte à la Russie et à la Chine.

Faller a demandé au Sénat un financement spécifique pour déployer des attachés militaires dans les ambassades, étant donné que :

« Dans l’hémisphère, il vaut mieux ne pas avoir de bases permanentes mais des endroits où nous pouvons aller et venir et travailler avec nos partenaires dans leur formation et leur préparation. »

Dans le même rapport, il prévient que :

« Le renseignement est une autre capacité nécessaire pour vaincre nos adversaires dans la région. Nous devons collecter des informations à tous les niveaux et les partager avec nos partenaires si c’est possible. »
Laura Jane Strickland Richardson
Teniente General (r)


Laura Jane Strickland Richardson Lieutenant-général (r)

Le rapport fourni par Faller était le dernier de son mandat. Le 8 mars, le président Joe Biden a annoncé que le prochain chef du Southern Command serait le lieutenant-général à la retraite Laura Jane Strickland Richardson .

SOUTHCOM est l’un des neuf commandements militaires dans lesquels l’armée des Etats-Unis d’Amérique est divisée, et comprend une zone d’influence qui va du Mexique à l’Antarctique, avec un quartier général à Miami (le Mexique correspond au Commandement du Nord). Le jour de la nomination de Richardson, lors d’une réunion à la Maison Blanche à laquelle Biden, le vice-président Kamala Harris et le secrétaire à la Défense Lloyd Austin ont participé, ils ont cherché à externaliser une fausse perspective de genre, en ligne avec les emblèmes à la mode du néolibéralisme culturel. La présentation de Richardson et du nouveau chef de l’armée de l’air, le General Jacqueline Von Ovost, fait partie de la tentative de déguiser l’accent belliciste explicite de la politique étrangère de Washington, totalement étrangère à une éthique du « care », la praxis historique de la résistance des femmes au modèle d’appropriation et de contrôle des territoires et des corps.

Jacqueline Von Ovost

Le modèle mondialiste des démocrates cherche à se légitimer sur la base de la promotion de la diversité et de la validation des droits de l’homme, tout en surjouant une argumentation décisive susceptible d’être digérée par le Trumpisme toujours largement apprécié. Dans cette perspective, Biden fait appel de manière démagogique - comme Obama l’a fait auparavant - à l’iconographie des libertés civiles afin d’encourager les agitateurs de la Région administrative spéciale de Hong Kong et de promouvoir, en même temps, le sécessionnisme de la minorité musulmane de les Ouïghours, dans la région du Xinjiang. À cette fin, différentes ONG et fondations mènent un travail intense sur les deux territoires, autonomisant et finançant les groupes mécontents et les médias qui leur fournissent diffusion et couverture .

La confrontation géopolitique a été soulevée par Washington face à la croissance incessante de l’économie de Pékin et au renforcement de ses capacités technologiques. Alors que le Département d’Etat cherche à rendre invisible la détérioration de sa compétitivité dans les zones productives les plus dynamiques, il insiste pour couvrir le conflit comme un choc des civilisations entre démocraties et autocraties. Cependant, les causes qui expliquent la position du Département d’État se réfèrent essentiellement au fait qu’en 2019, la Chine a dépassé les États-Unis en tant que principal partenaire commercial de quatre pays de la région (Brésil, Chili, Pérou et Uruguay), puisque Pékin est passé au deuxième rang en tant que partenaire mondial de la région derrière Washington.

Armes et économie

Entre 2002 et 2019, les échanges de Pékin avec l’Amérique Latine et les Caraïbes sont passés de 17 000 à 315 000 millions de dollars. Et depuis que la pandémie s’est déclarée en 2020, la Chine a engagé 1 milliard de dollars de prêts pour acheter des fournitures de santé, améliorer l’infrastructure médicale et fournir des vaccins pour faire face au Covid-19. Au cours de la même période, Washington a fourni à la région un financement pour un dixième de celui accordé par Pékin, soit environ 100 millions de dollars. Les visites de Faller en Uruguay, en Argentine et en République dominicaine n’ont pas inclus le don ou la fourniture de vaccins, malgré le fait que Washington a un pourcentage plus élevé de vaccinés que la Chine. Ce dernier pays a inoculé 16% de sa population et les États-Unis 60%. Depuis l’approbation des vaccins par l’Organisation mondiale de la santé, le pays asiatique a tiré 50% de sa production totale vers l’Asie du Sud-Est, l’Afrique, l’Amérique latine et les Caraïbes.

Malgré d’énormes dépenses militaires, Washington est le seul membre du club des 36 pays les plus riches de l’ Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) qui n’offre pas de couverture sanitaire universelle. Près de 30 millions d’étasuniens n’avaient pas d’assurance maladie avant la pandémie et 25 autres millions avaient perdu leur couverture pendant la pandémie en raison de licenciements.

L’hostilité des États-Unis envers le géant asiatique a plus de deux décennies d’histoire. Dans les premières années de ce siècle, George W. Bush (Jr.) a financé le réarmement militaire de Taiwan afin de générer des conflits fratricides. En 2009, Barack Obama a tenté d’entraver la coopération sino-japonaise et le Pentagone s’est opposé à l’aspiration de Tokyo de fermer la base militaire d’Okinawa. Sous la présidence de Donald Trump, la guerre commerciale et technologique s’est intensifiée et les sanctions contre les entreprises et les dirigeants d’entreprise se sont multipliées. Parmi ces derniers, les membres du conseil d’administration de Huawei, la société qui détient le plus grand nombre de brevets liés à la technologie 5G. Pour interrompre le développement de l’Asie du Sud-Est, l’actuelle administration Biden poursuit l’objectif fixé par Trump de former une OTAN du Pacifique, en articulant les 25 bases que Washington possède au Japon ainsi que les 15 qu’elle maintient en Corée du Sud. Il est prévu de compléter ce réseau guerrier avec la contribution de l’Australie et de l’Inde.

À la fin de 2019, le budget militaire des États-Unis atteignait 732 milliards de dollars et celui de la Chine, 261 milliards de dollars. Washington a 4500 ogives contre les 260 de Pékin. Les investissements dans l’appareil de guerre ordonnés par la Maison Blanche s’élèvent à un montant plus élevé que les dix pays qui suivent en termes de financement militaire. Son budget est 10 fois supérieur à celui de la Russie et, pour l’exercice 2021, les dépenses devraient dépasser celles fournies par Donald Trump au cours de son mandat de quatre ans. Washington est présumé avoir 800 bases militaires dispersées dans le monde, dédiées à la gestion de divers projets.

Malgré le danger dénoncé par les référents du Commandement Sud vis-à-vis de la Chine, en Amérique latine et dans les Caraïbes, il n’y a que le déploiement de forces militaires américaines. Sept bases sont établies en Colombie et deux à Aruba et Curaçao. La base aérienne de Soto Cano opère au Honduras ; à Lima, le « Naval Medical Research and Development » et au Chili, le Fuerte Aguayo Training Center situé à Valparaíso. Ils ont également développé des programmes innovants tels que celui proposé dans les académies de l’application du droit international (ILEA), financé directement par le Département d’État, avec le soutien académique du ministère de la Justice et du Pentagone, qui offre une formation aux juges, aux agences de sécurité, aux journalistes et aux responsables politiques dans la matière la plus innovante déployée sur le continent : la guerre juridique-médiatique Un autre siège de l’ILEA se trouve à Bangkok, en Thaïlande, où des centaines d’étudiants de la région administrative spéciale de Hong Kong sont formés à l’art de défendre les droits de l’homme et de résister aux politiques de Pékin.

La guerre froide du XXe siècle s’est exprimée en termes militaires, géographiques et idéologiques, bien qu’elle comprenne les éléments structurels évidents de nature économique. Le conflit actuel posé par les États-Unis est clairement présenté comme productif et technologique. Ce scénario remet en cause le leadership financier-néolibéral établi depuis le milieu des années 1970 alors qu’on cherchait à anéantir l’État-providence et la classe ouvrière qui s’y développait.

La logique capitaliste a fait appel pendant plusieurs périodes des deux derniers siècles au conflit guerrier pour maximiser ses modèles d’accumulation. Aujourd’hui, cette conception est limitée, comme pendant la guerre froide, par la surabondance de missiles nucléaires. Mais - contrairement à la confrontation qui a eu lieu avec l’URSS, lorsque les structures productives possédaient des vitesses et des complexités différentes - le temps ne semble pas jouer en faveur de Washington. L’innovation, la productivité et la synergie entre la science et la technologie sont passées de l’Atlantique au Pacifique.

Antonio Gramsci a identifié des périodes de transition telles que celles observées :

« Le vieux monde meurt. Le nouveau prend du temps à apparaître. Et dans ce clair-obscur émergent les monstres ».

Jorge Elbaum* pour [El cohete a la luna->https://www.elcohetealaluna.com/]

El cohete a la luna. Buenos Aires, le 25 avril 2021.

*Jorge Elbaum est sociologue, Docteur dans Siences. Économiques. President du « Llamamiento Argentino Judío ».

Traduit de l’espagnol pour El Correo de la Diáspora par : Estelle et Carlos Debiasi

El Correo de la Diaspora->http://www.elcorreo.eu.org/Parfum-de-femme-dans-la-coordination-US-de-la-Sous-Amerique-LE-COMMANDO-SUD-S-EN-VA-EN-GUERRE]. Paris, le 29 de avril de 2021

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