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24 juin 2023

Michael Hudson
LE REVE DE YELLEN

par Michael Hudson *

 

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Discussion de Michael Hudson avec Kin Chi Laudan dans la Hong Kong Global University

Un grand barrage sur le Dniepr, qui fournit toute l’eau à la Crimée, explose. Des milliers de maisons ont été inondées. Naturellement, les Ukrainiens ont dit que c’était les Russes qui avaient fait ça. Si la Crimée a été attribuée à l’Ukraine par Khrouchtchev dans les années 1960, c’est parce que l’eau et l’électricité provenaient toutes du barrage situé au nord de la Crimée. Tout cela a explosé et a été inondé.

Lorsque vous faites sauter un barrage, imaginez ce qui se passe en Chine et comment on le fait sauter. C’est ce qui s’est passé. Ils l’ont fait sauter. Le barrage sur le fleuve Dniepr, qui alimente la Crimée en eau et en électricité, a sauté. Je pense que ce n’était pas un missile, mais une mine navale qui a été tirée, une sorte de bombe automatique livrée électroniquement par une torpille navale qui l’a fait sauter. Des milliers de foyers ont dû être abandonnés et ont été privés d’électricité.

Le Dniepr étant désormais beaucoup plus large, il sera plus difficile pour l’Ukraine d’attaquer les Russes. Cela entraîne de graves problèmes d’électricité et d’eau pour la Crimée. Il est évident qu’ils essaient de provoquer la Russie à faire quelque chose de violent, de sorte que lorsque la réunion de l’OTAN aura lieu ce week-end à Vilnius, ils pourraient lancer une véritable attaque de missiles sur Moscou et Saint-Pétersbourg et déclencher la Troisième Guerre mondiale. Telle semble être leur intention.

Ils se rendent compte que le seul type de guerre que les Etats-Unis d’Amérique peut gagner est une guerre atomique. Elle n’a pas de troupes propres. Elle ne peut pas organiser une invasion. Elle ne peut pas prendre le contrôle d’un pays. Tout ce qu’elle peut faire, c’est détruire. Telle est la politique US.

Il s’agit d’une démonstration pour la Chine. Qu’arrivera-t-il à vos barrages si vous insistez pour que la Chine reste un seul pays et si vous ne faites pas ce que nous recommandons, à savoir diviser la Chine en cinq parties. Si vous essayez de continuer à contrôler le Xinjiang et d’autres provinces, nous devrons faire sauter les barrages et nous assurer que vous n’êtes plus un seul pays. C’est exactement ce que nous faisons en Ukraine pour la Russie. Telle semble être la stratégie occidentale.

Aux Etats-Unis d’Amérique, on a dit que la Russie n’avait pas de ligne rouge. Poutine n’a cessé de répéter qu’il s’agissait d’une ligne rouge, qu’il s’agissait d’une ligne rouge, et pourtant cela n’a rien fait. Un certain nombre de généraux ont prononcé des discours cette semaine, disant : « Il n’y a pas de ligne rouge pour la Russie, et nous pouvons voir qu’il n’y a pas non plus de ligne rouge pour la Chine. Nous envoyons nos bateaux dans le détroit de Chine et la Chine nous laisse faire. Nous pouvons faire tout ce que nous voulons ».

« Nous ne laisserons pas la Chine s’approcher des Caraïbes, mais nous pouvons y aller. Le fait est que la Chine et la Russie sont des tigres de papier. Ils sont en train de dire que nous avons gagné. Nous pouvons maintenant nous contenter de nettoyer et d’anéantir l’ennemi à l’aide de bombes atomiques ou de détruire tous leurs barrages et leurs infrastructures de base ».

 KC : Ces derniers temps, les généraux étasuniens ont beaucoup parlé en faucon. Pourquoi pensez-vous que ces discours faucons des généraux sont apparus aux Etats-Unis ?

Ce n’est pas le fait des généraux. Ces derniers ont dit que rien de tout cela ne fonctionnerait. Ce sont les politiciens, Biden et les néoconservateurs qui sont à l’origine de la politique de la corde raide. Ce n’est pas le fait des militaires. Les militaires ont dit qu’ils ne voyaient pas comment l’Ukraine pouvait gagner. Et Biden et d’autres, le département d’État, ont dit : « Oui, vous pensez gagner militairement, mais ce n’est pas comme ça qu’il faut voir les choses. Si nous faisons sauter le barrage et l’infrastructure, il ne nous reste plus qu’à bombarder Moscou et Saint-Pétersbourg pour qu’ils cèdent. Et la Chine cédera parce qu’elle verra que nous pouvons faire la même chose pour elle. Nous pouvons gagner le monde entier ce week-end ». C’est le genre de discours que tiennent les néocons avec la « dame aux biscuits » et les autres, Victoria Nuland. Rien de tout cela ne vient des généraux.

 KC : Pensez-vous qu’aux Etats-Unis, l’accord entre les républicains et les démocrates sur le plafond de la dette ayant été conclu, ils se tourneront davantage vers l’Ukraine et Taïwan ?

Non. J’étais à la télévision chinoise il y a deux semaines, vous y étiez. Comme je l’ai expliqué, il s’agit simplement d’une mascarade. Il n’y a jamais eu de problème de dette, mais il a été présenté tous les soirs aux informations, comme un combat de catch entre le bon et le méchant. Le prétexte était que le Congrès devait se réunir et accepter de supprimer le plafond de la dette pour que le Congrès puisse payer les programmes que le Sénat et le Congrès avaient déjà approuvés.

Il n’y a pas eu de crise de la dette. Ce n’était qu’une excuse pour faire semblant qu’il y en avait une, afin de pouvoir réduire les dépenses sociales aux États-Unis, réduire les programmes sociaux pour Medicare et augmenter l’oléoduc.

En supprimant les programmes sociaux, une fois qu’ils ont accepté cela, dès le lendemain, la sénatrice républicaine du Maine, Susan Collins, a déclaré : « Maintenant que tout a changé au cours des 12 dernières heures, qu’il y a une guerre en Ukraine et que l’Europe a utilisé toutes ses armes, nous devons augmenter très fortement les dépenses militaires de 20 ou 30 %, soit quelques milliers de milliards". Nous devons donc réduire les programmes restants aux États-Unis ».

Ils ont déjà réduit tous les fonds destinés à la lutte contre le COVID et à la lutte contre les maladies. Tout cela a été vidé dans le cadre de l’accord, mais rien de tout cela ne devait être fait. C’est comme une sorte de sitcom ou d’émission de télévision où l’on fait croire qu’un problème à résoudre n’en est pas un au départ, qu’il n’en a jamais été un. N’est-ce pas ce que j’ai dit lorsque j’étais à la télévision en Chine la semaine dernière, n’ont-ils pas inclus cette explication ?

 KC : Oui, c’est ce que vous avez dit, et vous avez eu tout à fait raison de parler des prêts étudiants et de toutes ces coupes dans les aides sociales. Pourriez-vous aussi nous dire brièvement ce qui se passe maintenant après la soi-disant résolution de la crise du plafond de la dette ? Qu’est-ce qu’ils essaient vraiment de faire avancer ?

Comme il n’y a pas eu de crise et qu’il ne s’est donc rien passé, il n’y a absolument rien. La seule différence est qu’ils ont approuvé l’oléoduc que les écologistes avaient combattu. M. Biden a déclaré que les Etats-Unis d’Amérique n’avait plus de politique environnementale. Le carburant de l’avenir est le pétrole et nous le contrôlons, de sorte que les Etats-Unos ne participera pas, dans la pratique, à la dépollution de l’environnement. Nous n’allons pas lutter contre COVID. Nous allons simplement cesser de communiquer les données.

Ce sont des choses qui se produisaient déjà. Il n’y a rien de particulièrement nouveau. Le Congrès va attribuer un montant énorme au complexe militaro-industriel pour qu’il produise des armes à vendre à l’Europe. Les USA feront pression sur les pays européens pour qu’ils achètent des armes US, ce qui soutiendra fortement le dollar par rapport à l’euro.

L’opinion générale est que l’euro va plonger. Maintenant que l’économie et l’industrie allemandes sont pratiquement anéanties, c’était le principal soutien du taux de change de l’euro. L’Europe elle-même semble s’acheminer vers une récession ou une dépression chronique et un affaiblissement de sa monnaie.

 Ashley : La semaine dernière, on a appris que l’Allemagne était déjà entrée en récession, ce qui n’est pas une surprise, compte tenu de ce qui s’est passé. La situation va donc s’intensifier. C’est ce à quoi vous vous attendez ? La situation va empirer pour l’Allemagne et le reste de l’Europe.

C’était l’intention. Les gens continuent de penser que les Etats-Unis ont combattu la Russie en Ukraine. Il y a quelques années, les planificateurs US ont réalisé qu’il était impossible de suivre le développement de l’Eurasie. Comment peuvent-ils maintenir le niveau de vie des Etasuniens un peu plus longtemps alors que nous ne sommes plus un pays manufacturier ? La réponse est que nous pouvons au moins contrôler l’Europe et en faire une colonie, tout comme l’Europe a fait de l’Afrique et de l’Amérique Latine des colonies. Cette guerre a eu pour effet d’opposer les Ettats-Unis à l’Allemagne et à l’Europe.

Jusqu’à présent, c’est la Russie qui en a profité. Les sanctions l’ont obligée à devenir beaucoup plus autosuffisante, non seulement en matière de denrées alimentaires, mais aussi de produits manufacturés. Apparemment, il y a un afflux d’investissements étrangers en Russie pour commencer à fabriquer les biens de consommation et les produits industriels qui étaient auparavant importés d’Europe. La Russie en est bénéficiaire.

Mais si l’on regarde qui en profite et qui en souffre, on se rend compte qu’il n’était pas difficile de voir, dès le début de la guerre en Ukraine, ce qui se passait. En fait, j’ai écrit dès le début que l’objectif était de subordonner l’Allemagne et l’Europe aux États-Unis. C’est pourquoi le gazoduc a été détruit. C’est pourquoi l’Amérique a attaqué l’Allemagne. Mais bien sûr, l’Allemagne ne pouvait pas dire : « Nous sommes un pays de l’OTAN, nous sommes attaqués par l’Amérique », parce que l’OTAN, c’est l’Amérique.

L’Europe ne peut donc vraiment rien faire. Il n’y a pas de partis politiques qui soient réellement en faveur de l’indépendance européenne, tant qu’ils s’imaginent tous que la menace est une invasion russe - comme si la Russie avait le moindre intérêt à reprendre le contrôle de l’Europe de l’Est ou de l’Europe centrale. Les États-Unis n’acceptent pas d’être désindustrialisés.

 Ashley : Une question sur la situation aux États-Unis. J’ai lu récemment, et je sais que vous préparez un article à ce sujet, qu’avec la hausse des taux d’intérêt aux États-Unis, j’ai également vu un rapport, je ne sais plus dans quel journal, selon lequel le secteur de l’immobilier commercial pourrait être le prochain secteur en difficulté aux États-Unis. Pourriez-vous nous expliquer comment ce secteur en est arrivé là ?

Les grandes entreprises achètent des immeubles commerciaux en recourant massivement au crédit hypothécaire et en versant des acomptes très faibles. Et maintenant que le taux d’occupation moyen des immeubles est tombé à 60 %, voire à 50 % dans certaines villes, les loyers ne génèrent pas suffisamment d’argent pour couvrir les paiements hypothécaires. Les grandes sociétés de capital privé qui ont investi dans l’immobilier - appelées Real Estate Investment Trusts (REIT) aux États-Unis - se retirent donc tout simplement des immeubles commerciaux.

La semaine dernière, l’une des plus grandes entreprises s’est séparée d’un bien immobilier d’une valeur de 800 millions de dollars, et le mois précédent, une autre entreprise s’est séparée d’un bien d’une valeur d’un demi-milliard de dollars. Nous assistons donc à un abandon massif des bâtiments commerciaux, qui sont essentiellement transformés en appartements de luxe. Les immeubles commerciaux s’embourgeoisent. Maintenant que de plus en plus d’employés travaillent à domicile et évitent les transports, les bureaux n’ont plus d’utilité.

Les entreprises n’ont aucune raison de renouveler les baux, et beaucoup d’entre eux arrivent à échéance cette année. Par ailleurs, de nombreuses hypothèques sur les biens commerciaux, contrairement aux hypothèques immobilières, ne sont pas des hypothèques à 30 ans, mais des hypothèques à plus court terme, et elles sont réinitialisées à des taux d’intérêt plus élevés, ce qui entraîne à nouveau des déficits dans les bâtiments.

Ainsi, si vous êtes propriétaire d’un immeuble commercial et que vous avez emprunté de l’argent, que vous avez mis un dollar de côté et emprunté un demi-milliard de dollars, vous pouvez le faire aux États-Unis. Et ce n’est pas vraiment votre argent, c’est de l’argent emprunté qui l’a acheté. Tant que les loyers ne suffisent pas à payer les frais financiers, l’hypothèque, les impôts locaux, les frais d’eau et d’égout, vous abandonnez le bâtiment. Il s’agit donc d’un abandon en bloc de l’immobilier commercial.

Cela signifie que les bilans des banques se dégradent, pour deux raisons. Premièrement, si la banque possède une hypothèque à faible taux d’intérêt, maintenant que les taux d’intérêt sont élevés, le prix du marché de cette hypothèque a chuté de 70 % ou plus. Le pays tout entier ressemble à la Silicon Valley Bank. Le portefeuille de prêts hypothécaires et les obligations d’État voient leur valeur de marché chuter, pour devenir inférieure aux dépôts dus par les banques.

Ce n’est pas un problème tant que les déposants laissent leur argent dans les banques. Mais les déposants retirent leur argent des banques qui ne paient pas beaucoup pour les dépôts, et le placent dans des obligations d’État qui rapportent aujourd’hui environ 5 %, au lieu des 1 % que l’on trouve dans les banques. Certaines banques américaines, même à New York, deviennent désespérées et disent qu’elles vont payer 5 %. Mais les déposants se rendent compte que si elles paient soudain un taux aussi élevé et qu’elles ne perçoivent pas de revenus, c’est qu’elles sont en difficulté et qu’il vaut mieux retirer notre argent. Si nous avons plus de 250 000 dollars, qui sont assurés par la Federal Deposit Insurance Corporation, nous ferions mieux de retirer notre argent. Il n’est pas en sécurité. On a donc le sentiment que les banques ne sont pas très sûres, compte tenu de la décision de la Fed d’augmenter les taux d’intérêt pour renforcer le dollar.

Le dollar monte, l’euro baisse, les autres monnaies baissent. Cela crée une vague de défaillances sur les dettes des pays du Sud. S’il y a un défaut de paiement sur la dette étrangère, les banques et les détenteurs d’obligations en pâtiront également. Tout d’un coup, cette dette accumulée depuis 2009, depuis 14 ans, bloque toute forme de reprise.

Maintenant que le Congrès a réduit les dépenses sociales, le problème des sans-abri s’aggrave, le problème de la pauvreté s’aggrave, les mères dépendantes qui vivaient de bons d’alimentation se voient retirer la possibilité d’obtenir des bons d’alimentation et sont obligées de mendier dans la rue. Ils ont supprimé la couverture Medicaid pour les soins médicaux, de sorte que si les gens contractent le COVID, ils ne sont pas en mesure de se protéger et infectent d’autres personnes. Les rapports sur les eaux usées en Amérique montrent une augmentation du nombre de cas de COVID, mais le Centre de contrôle des maladies ne communique plus aucune statistique. Personne ne peut donc vraiment suivre ce qui se passe, mais on a l’impression qu’une catastrophe est en train de se produire. Alors bien sûr, ils doivent se battre en Ukraine. Sinon, les gens commenceraient à regarder ce qui se passe aux États-Unis.

 Ashley : Le peuple étasunien suit-il la guerre en Ukraine ?

Oui, tous les jours. On leur dit que l’Ukraine gagne jour après jour. Elle tue de plus en plus de Russes, les Ukrainiens sont très courageux, l’Ukraine est en train de gagner, et la politique de l’OTAN a fonctionné en leur donnant les super armes qui permettent de vaincre la Russie, qui n’est en fait qu’une station-service avec des bombes atomiques. C’est ce que l’on répète sans cesse. Après avoir montré les Ukrainiens battant les Russes à la télévision, les navires de guerre US en Chine affirment que la Chine ne peut rien faire contre les États-Unis et que nous sommes les premiers.

Il s’agit donc d’un phénomène assez important. La rhétorique contre la Chine est également très présente dans les médias américains en ce moment.

Oui, surtout en ce qui concerne les puces électroniques, Nvidia, ce qui va lui arriver, la pression exercée sur la Corée du Sud pour qu’elle n’utilise pas de nickel provenant de Chine, qui, je pense, raffine 80 % du nickel. Si elle utilise un composant en nickel au lieu du nickel fabriqué aux États-Unis, elle ne bénéficiera pas des avantages fiscaux accordés aux entreprises américaines. Il y a eu toute une série de tarifs spéciaux contre les matières premières russes et chinoises, ou tout ce qui est chinois, qui essaient essentiellement de forcer l’Europe, Taïwan et la Corée du Sud à délocaliser leur production de puces et leur production électronique aux États-Unis plutôt que dans leur propre pays.

Que pensez-vous des satellites et de pays comme l’Australie ? Cela va-t-il fonctionner ? La stratégie US ?

Tout dépend de la réaction des autres pays. Tant que les USA utilisera ses organisations non gouvernementales, ses œuvres de bienfaisance et ses subventions à l’étranger pour promouvoir des hommes politiques favorables aux États-Unis, ces derniers suivront la politique américaine. Les États-Unis ont des découvreurs de talents dans toute l’Europe et l’Asie qui recherchent des diplômés prometteurs dans la vingtaine qui sont très opportunistes et qui ont pourtant un attrait politique apparemment très large. Ils les nourrissent et leur accordent un soutien financier de la part des fondations étasuniennes, les amènent aux Etats-Unis pour les former et les préparent progressivement à devenir des premiers ministres, des politiciens, des chefs militaires ou des administrateurs politiques pro-US.

C’est ce qu’ils font depuis 75 ans, depuis la fin de la Seconde Guerre Mondiale. En Europe et, apparemment, dans une grande partie de l’Asie, il existe une classe dirigeante qui a déjà été protégée par les États-Unis et dont la richesse est liée au soutien des États-Unis et à la propriété aux États-Unis ou dans l’économie US. La direction politique de l’Europe est donc très différente de la perception populaire de ce dont l’Europe a besoin. L’Europe et une grande partie de l’Asie sont dirigées en fonction de ce qui profite aux États-Unis, et non à leurs propres populations. Et bien sûr, c’est ce qui énerve tant les Etats-Unis à propos de la Russie et de la Chine : Elles essaient en fait de gérer leurs économies de manière à soutenir leur propre niveau de vie, leur propre population et leur propre puissance militaire, au lieu de subordonner leurs intérêts à ceux des États-Unis.

 Ashley : Ils sont tous devenus des colonies, vraiment, beaucoup de ces satellites. Et c’est comme ça depuis longtemps, je pense.

Eh bien, ils sont devenus des colonies, non pas officiellement des Etats-Unis, mais des organisations internationales que les Etats-Unis d’Amérique contrôle. Des colonies du Fonds Monétaire International, des colonies de la Banque Mondiale, des colonies de la Cour Pénale Internationale avec des juges pro-US. Ce sont des colonies de ce qui semble être des organisations internationales, mais qui sont en fait des organisations internationales centrées sur les Etats-Unis et contrôlées par les Etats-Unis. Ce n’est pas explicitement étasunien. C’est juste que les USA ont un droit de veto dans chacune de ces organisations et qu’elle contrôle leurs finances.

 Ashley : Et puis aussi, je pense que c’est le cas non seulement pour l’Europe mais certainement pour l’Australie, notre armée est devenue tellement intégrée à l’armée US et le renseignement est devenu tellement intégré au renseignement US et dépendant des USA pour les armements et pour les réparer et les entretenir, que nous ne pouvons pas opérer militairement sans les États-Unis. Voilà pour la dimension militaire. J’imagine que c’est la même chose en Europe, en Corée et au Japon.

Ce qui préoccupe la Turquie et l’Arabie Saoudite, c’est leur dépendance à l’égard de l’armement militaire. Ils dépendent des réparations d’armement et des pièces de rechange, car les chars et les avions s’usent toujours. Si les Etasuniens vous coupent les vivres et que vous suivez votre propre voie, même si vous avez beaucoup d’armes Made in Usa, vous n’aurez pas les pièces de rechange ou les réparations nécessaires. Vous devrez commencer à découper l’un de vos avions pour obtenir les pièces de rechange nécessaires à la réparation d’un avion qui en a besoin.

Il y a donc maintenant une réaction contre l’achat d’armes US, parce qu’ils se rendent compte qu’ils peuvent tous être coupés et que tant que les armes durent, vous dépendez des États-Unis pour les entretenir. Ils cherchent donc des moyens d’approvisionnement plus sûrs. Et il faut un certain temps pour développer des armes alternatives.

La guerre en Ukraine est une sorte de terrain d’essai pour les missiles et les armes Us contre les armes russes. Vous pouvez constater que les missiles Patriot que les Etats-Unis a fournis à l’Ukraine ont été abattus. La protection antimissile que les Etats-Unis ont fournie à l’Ukraine n’a pas fonctionné. Les Russes ont été en mesure de faire exploser cette prétendue protection. Il s’avère donc que ces armes n’étaient en fait que des produits de luxe. Elles sont comme le vin qui est destiné à être échangé et vendu, mais qui ne doit pas être bu. Car si vous buvez ce précieux vin vieux de 50 ans, vous vous rendez compte qu’il s’est transformé en vinaigre et qu’il n’a plus le même goût.

Les armes ne sont pas destinées à être utilisées au combat. Elles sont destinées à être utilisées dans les parades et à servir de trophées pour montrer « Regardez tous les tanks et les avions que nous avons ». Mais si vous essayez de vous battre avec elles, ça ne marche pas très bien. C’est la raison pour laquelle les Etasuniens sont si contrariés qu’ils ont demandé aux Ukrainiens de bombarder les barrages et de détruire les infrastructures à l’aide de torpilles sous-marines. C’est la seule façon dont les USA peuvent se battre. Elle dispose de moyens de destruction, mais elle ne combat pas des êtres humains et ne se défend pas.

L’Europe est donc pratiquement sans défense à l’heure actuelle, sans armes propres. Elles ont été utilisées en Ukraine. Et les Etats-Unis a dit : « Eh bien, l’Europe doit réduire ses dépenses sociales et faire ce que les Etats-Unis ont fait. Utilisez vos budgets pour acheter des armes US afin de reconstituer les stocks d’avions, de chars, de missiles et de munitions que vous avez envoyés à l’Ukraine. Cela représentera 4 à 5 % de votre PIB. Tout cela sera payé aux Etats-Unis d’Amérique ».

« Nous sommes conscients que c’est votre euro qui paie. Il va perdre de sa valeur. Mais quand l’euro perd de sa valeur, qu’est-ce qui va vraiment perdre ? Vos salaires vont baisser parce que la main-d’œuvre va devoir payer beaucoup plus cher ce qu’elle importe du Sud pour ses matières premières et de la Chine pour ses biens de consommation ».

L’Europe va donc connaître une dépression chronique dont personne ne voit comment sortir. Il est certain que l’industrie européenne dit : « Nous n’allons plus recevoir de gaz russe bon marché. Nous avons le choix. Soit nous nous tournons vers les Etats-Unis où le gaz est bon marché, soit nous nous tournons vers la Russie et la Chine, ou l’Iran ou l’un de ces autres pays. Où vont-ils s’installer ? » Parce que l’Europe est désormais une zone morte. Les Etats-Unis d’Amérique a gagné la guerre ukrainienne contre l’Europe occidentale.

 KC : Ces alliés des États-Unis ne tirent pas les leçons de l’après-Première Guerre mondiale, qui consistaient à être les principaux ennemis des États-Unis.

Je pense qu’ils en ont tiré les leçons et qu’ils se sont dit : « Nous avons perdu au lendemain de la Première Guerre Mondiale avec les dettes interalliées. Nous allons perdre à nouveau. Nous ferions mieux de quitter l’Europe et de nous installer aux USA. L’Europe est morte. Nous devons partir. Nous ne pouvons pas revivre les années 1920 et 1930 ». C’est ce qu’ils ont appris : se rendre.

 KC : Avec l’effondrement de l’Europe, que va-t-il se passer au niveau de la dédollarisation ?

L’Europe ne va pas se dédollariser. La dédollarisation n’est pas simplement une sortie du dollar. Il s’agit d’une restructuration de la structure commerciale. Les échanges se feront de plus en plus entre les pays d’Eurasie et entre l’Eurasie et le Sud, l’Afrique et l’Amérique du Sud. Les échanges seront financés par des swaps de devises, tout comme l’Arabie saoudite et la Chine détiennent leurs devises respectives pour leurs échanges de pétrole et de produits manufacturés. Ce type d’accord sera mis en place avec les pays africains et des pays comme le Brésil.

Le problème à résoudre est que certains pays vont avoir des déficits, en particulier des déficits avec la Chine pour les produits manufacturés et avec la Russie pour les matières premières. Comment vont-ils financer ces déficits ?

La première chose par laquelle remplacer le dollar sera l’or. Toute l’Eurasie est en train de constituer ses réserves d’or et de réduire ses réserves de dollars. Elle dépense ses dollars comme il se doit pour des choses que l’on achète avec des dollars - matières premières et autres. Mais elle ne remplace pas ces réserves en dollars. Elle utilise leurs revenus pour acheter de l’or.

Ils tentent de créer une alternative au Fonds Monétaire International. Ils l’appellent la Banque des BRICS, mais ce sera plus qu’une banque des BRICS. Elle sera capable de créer son propre papier-or, sa propre version des droits de tirage spéciaux, sa propre idée de ce que John Maynard Keynes appelait le Bancor en 1944. Il s’agira d’une sorte de crédit qui sera accordé par les pays excédentaires aux pays déficitaires pour leur permettre d’enregistrer des déficits jusqu’à ce que la Chine et d’autres pays construisent leurs infrastructures et leurs économies pour devenir autosuffisants et faire partie de cette nouvelle zone commerciale et monétaire eurasienne. Il s’agira d’une organisation commerciale, monétaire et militaire.

Le monde entier sera réorienté de manière à éviter l’économie des États-Unis et de l’Europe. L’économie des États-Unis et de l’Europe deviendra une unité, avec l’Australie et la Nouvelle-Zélande en tant que parties anglophones du monde. Le reste du monde suivra sa propre voie. Le monde se divisera en deux parties différentes avec des philosophies différentes. L’Occident sera une zone financiarisée, où la planification centrale sera concentrée à Wall Street. Qui obtiendra le crédit, et pour quoi ? Comment allons-nous répartir l’argent et le crédit ?

L’Eurasie et le reste du monde seront de plus en plus industriels-socialistes. C’est ainsi que le monde évoluait juste avant la Première Guerre mondiale, puis s’est arrêté pour l’Occident. L’Asie va reprendre cet idéal de capitalisme industriel évoluant vers le socialisme, traitant l’argent comme un service public entre les mains du gouvernement, et non entre les mains d’un 1% privé. La politique militaire protège l’ensemble de la région, une sorte de pendant eurasien de l’OTAN pour se protéger des bases militaires américaines.

Les échanges commerciaux s’harmonisent. La production et la consommation vont s’harmoniser entre les pays d’une manière qui sera équilibrée à mesure que d’autres pays développeront leur propre capacité à se nourrir, à subvenir à leurs besoins fondamentaux. Ils considéreront les soins de santé comme un droit public, un service public et un droit de l’homme. Ils considéreront le logement comme un droit public et l’alimentation comme un droit public. Il n’y aura plus de gens affamés dans la rue ou dans le métro, comme on le voit à New York, lorsqu’ils n’ont pas d’emploi. Tout le monde sera protégé au lieu d’être polarisé.

Ce à quoi vous vous attendez, c’est à une hausse des normes en Eurasie et dans les pays du Sud. La production et la productivité augmenteront. La main-d’œuvre sera en meilleure santé, mieux nourrie et mieux éduquée dans ces régions. Et c’est le contraire qui se produira aux États-Unis. La polarisation s’accentuera. Les villes américaines sont en train de se ruiner, notamment en raison de l’abandon des propriétés commerciales. L’assiette fiscale des villes diminue et elles doivent réduire les dépenses de transport parce que les gens travaillent désormais à domicile au lieu de prendre le métro, le train ou le bus pour se rendre dans les villes. Nous assistons à une restructuration économique complète, tant en Asie qu’aux États-Unis, mais cette restructuration va dans des directions opposées.

 KC : Michael, vous avez très bien présenté les possibilités de développement de l’Eurasie. Quels seraient vos conseils ou vos avertissements sur le type de relations entre les différents pays ayant des ressources et des niveaux de développement différents ? Qu’est-ce qui vous mettrait en garde contre une certaine reproduction du type de relations hégémoniques au sein de ce bloc eurasien ?

Il faut d’abord se rendre compte que ces pays sont différents les uns des autres. Parce qu’ils sont différents, le problème de la création d’une banque des BRICS ou de toute autre organisation internationale est de savoir qui en aura le contrôle. Les Etasuniens ont toujours insisté sur le fait qu’ils ne rejoindraient aucune organisation dans laquelle ils n’auraient pas de droit de veto. En commençant par les Nations unies, puis en votant pour le Fonds monétaire international et la Banque mondiale, ils peuvent opposer leur veto à tout, conformément aux règles qui régissent ces organisations. En Eurasie, ils doivent se rendre compte que les pays sont très différents. Il sera donc politiquement difficile de décider de l’attribution de ces crédits pour couvrir les déficits commerciaux et les déficits de la balance des paiements. Qui aura droit à quel montant de crédit ? Y a-t-il une limite à cela ?

Comment allons-nous permettre aux pays de payer ? Si un pays dégage un excédent durable, comme la Chine, et que d’autres pays sont en déficit, comment éviter que les pays débiteurs ne se retrouvent comme aujourd’hui avec des dettes en dollars en Amérique Latine et dans d’autres pays ? Comment créer un système financier qui ne va pas utiliser la finance comme nouvelle forme de guerre économique pour prendre le contrôle du gouvernement ? Comment allons-nous le faire fonctionner politiquement au profit de l’économie réelle de la production et de la consommation, plutôt qu’au profit des investisseurs financiers chargés d’acheter et de privatiser ces moyens de production ?

Les USA et l’Europe vont privatiser de plus en plus le domaine public, comme Margaret Thatcher a commencé à le faire en Angleterre. Les USA et l’Europe finiront par ressembler à l’Angleterre après Margaret Thatcher et au parti travailliste lorsque Tony Blair est allé encore plus loin. Comment éviter la privatisation ? En garantissant certains droits économiques à tout le monde. Comment garantir les soins de santé, le logement et la nourriture ?

Tout cela nécessite une idéologie économique, une doctrine. On ne peut pas le faire au coup par coup. Au début, c’est le cas. On invente au fur et à mesure, on voit quelle est la ligne de moindre résistance, ce qui est le plus facile à faire. Mais à un moment donné, il faut discuter de ce qu’est le socialisme aujourd’hui. Peut-être ne voulez-vous pas l’appeler socialisme. Quel que soit le nom qu’on lui donne, il pourrait s’agir d’une Eurasie avec des caractéristiques eurasiennes. Il faut une déclaration des droits fondamentaux et un guide constitutionnel, pas comme la Constitution US qui est gravée dans le marbre et ne doit jamais être modifiée, mais une constitution qui sera continuellement améliorée, modifiée, pour aller de l’avant.

Comment créer une structure institutionnelle flexible qui puisse évoluer à l’avenir pour répondre aux exigences croissantes et changeantes des sociétés qui tentent de s’industrialiser, qui tentent de faire face aux problèmes environnementaux tels que le réchauffement de la planète et les conditions météorologiques extrêmes ? Comment allez-vous faire face aux nouvelles maladies ? Comment allez-vous affronter les États-Unis et les tenir à l’écart de votre région ? Comment l’Eurasie va-t-elle avoir sa version de la Doctrine Monroe disant : « L’Eurasie pour les Eurasiens » ?

Les Nord-Américains n’ont pas besoin d’être près de l’Asie. Vous pouvez avoir votre propre continent et le détruire autant que vous voulez, mais restez à l’écart de notre territoire, tout comme nous restons à l’écart du vôtre.

C’est comme le clivage qui s’est produit dans la religion il y a 1000 ans. Mais au lieu d’un clivage religieux, c’est un clivage dans la philosophie économique, un clivage dans la décision de ce qui vaut la peine d’être fait et quelles sont les priorités. Comment allons-nous fixer des priorités qui empêcheront le type de dépression et de dégénérescence économique qui se produit aux États-Unis ?

Nous voulons apprendre des États-Unis, mais nous ne voulons pas apprendre à devenir comme eux. Nous voulons apprendre à éviter les problèmes qui se sont produits aux États-Unis. On utilise donc les États-Unis et l’Europe comme une leçon d’objet pour ce que l’on veut éviter. La question est de savoir comment créer un groupe d’organisations internationales exemptes de la polarisation économique, de la privatisation et de la financiarisation qui ont détruit les économies américaine et européenne.

 KC : Vous diriez donc que c’est du « socialisme avec des caractéristiques eurasiennes » ?

Oui, ou le « futur ». Vous pourriez simplement dire « l’avenir avec des caractéristiques eurasiennes ». Peu importe le nom qu’on lui donne, il s’agira d’une économie mixte. Beaucoup de gens pensent que le socialisme signifie que le gouvernement fait toute la planification. Ce n’est pas vraiment ce qu’est le socialisme. Bien sûr, il y aura une économie mixte. Bien sûr, il y aura des entreprises privées. Bien sûr, il y aura la propriété individuelle, mais elle sera soumise à des contraintes sociales afin que la fortune de certains individus ne se fasse pas au détriment du reste de la société. Il y aura des limites et des réglementations pour que les gains privés soient réalisés d’une manière qui crée des gains sociaux et économiques dans le processus, et non aux dépens de l’économie et de la société.

Il faut coordonner les secteurs privé et public. Au lieu de faire comme aux Etats-Unis et en Europe, où l’objectif du secteur privé est de prendre le contrôle du gouvernement pour privatiser et vendre le domaine public, vous avez une économie unidimensionnelle, privatisée et financiarisée. Vous avez une économie unidimensionnelle, privatisée et financiarisée. L’Asie ressemblera beaucoup à ce que fait la Chine : une économie mixte. Le rôle du gouvernement est de fournir des services et des biens qui, autrement, seraient des monopoles. Vous ne voulez pas de monopole. Vous ne voulez pas d’une classe à la recherche de rentes. Vous ne voulez pas d’une classe qui gagne des revenus et des richesses sans travailler et sans fournir de produit économique. C’est ce qu’est une société de rentiers. C’est ce qu’est une société de rentiers. C’est ce qu’était une société de propriétaires en Europe jusqu’au 19e siècle, et ce qu’est une société de recherche de profits financiers au 20e siècle aujourd’hui en Amérique du Nord.

Vous voulez éviter la recherche de rente économique, la recherche de rente immobilière et la recherche de rente de monopole. Ces secteurs de la finance, de la propriété foncière, de la recherche et du développement, de la santé publique, appartiennent au domaine public et ne doivent pas être privatisés. Sinon, vous finirez par ressembler à ce qu’est devenue l’Angleterre après que Margaret Thatcher a privatisé les logements sociaux et chassé la population londonienne de Londres parce qu’elle ne pouvait pas s’offrir les logements sociaux privatisés qui avaient été achetés et financiarisés. Regardez ce qui s’est passé à Londres avec Thatcher. Pourquoi l’économie néolibérale ne fonctionne-t-elle pas ?

Il faut avoir une alternative pour dire qu’il y a une alternative à l’économie néolibérale. Nous pouvons constater que nous avons inventé l’alternative sans vraiment disposer d’un schéma directeur sur la manière de le faire. Mais maintenant que nous avons vu ce qui commence à fonctionner, certainement en Chine, nous pouvons développer une sorte de modèle de base pour une alternative à ce qui se passe dans l’Occident financiarisé et privatisé.

 TY : Michael, quand pensez-vous que les institutions des BRICS seront suffisamment solides pour que ce que vous dites devienne une réalité ?

Il n’y a aucun moyen de le savoir. Je ne fais pas partie du processus de mise en œuvre, et comme j’ai 84 ans et que j’évite le COVID, tout ce que je peux faire, c’est faire des commentaires depuis New York. Je peux expliquer ce qui n’a pas marché en Occident, ce qui n’a pas marché aux États-Unis et en Europe depuis la Première Guerre mondiale. Je peux écrire que les problèmes qui se posent aujourd’hui sont très similaires à ce qui s’est passé au XIXe siècle. Je peux expliquer l’économie classique, la théorie classique de la valeur avec l’idée que la rente est un revenu non gagné, un revenu prédateur. L’objectif classique d’un marché libre est de rendre les marchés exempts de rente économique, de rente foncière, de rente de monopole et de frais généraux financiers. Ces objectifs des économistes classiques du 19e siècle, Adam Smith, John Stuart Mill et Marx, devraient servir de guide pour ce qui se passe actuellement.

Pour cela, il faut connaître l’histoire économique. C’est ce que j’ai écrit. Je viens de publier mon livre sur les raisons de la chute de la Grèce et de Rome à la suite de leur crise de la dette et de la concentration de la propriété foncière et immobilière entre les mains d’une classe de créanciers. Tout ce qui se passe actuellement s’est produit à maintes reprises dans l’histoire du monde. La meilleure façon de créer une alternative en temps utile est de se familiariser avec l’histoire de l’Europe ancienne, avec l’histoire du 19e siècle et avec la lutte pour une économie plus démocratique en Occident qui a échoué.

Vous voulez l’empêcher d’échouer comme il l’a fait auparavant. Pour ce faire, vous devez mettre en place votre propre programme d’études. Je ne sais pas si vous l’appellerez « économie » ou « comment le monde fonctionne », mais vous ne voulez certainement pas que vos planificateurs économiques soient formés aux États-Unis, où l’on dit que la façon de rendre une économie riche est de laisser Wall Street et les centres financiers faire la planification et de concentrer la richesse dans les mains des milliardaires de la finance. C’est le message de la théorie économique américaine, et vous voulez l’éviter.

Vous allez vraiment avoir besoin de votre propre corps de théorie économique et d’un corps de statistiques économiques pour décrire ce qui se passe dans votre économie. Vous aurez besoin d’une alternative aux comptes nationaux des revenus et des produits. Les statistiques américaines du produit national brut ne font aucune distinction entre les revenus gagnés et non gagnés, ni entre la production et les frais généraux. Elles pensent que plus il y a de frais généraux, plus la contribution à la production économique est importante. Étant donné qu’il y a tant de gaspillage et de frais généraux aux États-Unis, leur PIB semble être beaucoup plus élevé que celui d’autres pays. Mais cela prend la forme d’armements, de déchets, de charges financières et de loyers qui ne font pas vraiment partie de la production. Ils pèsent sur la production et viennent en déduction du revenu national, ils ne s’y ajoutent pas. Vous devez reconceptualiser vos comptes économiques nationaux afin de refléter cette réalité et de pouvoir retracer ce qui se passe réellement dans les différents pays qui rejoignent cette nouvelle communauté eurasienne.

 TY : Merci, Michael. C’était très bien. Il y a quelque chose que vous avez dit tout à l’heure qui est, bien sûr, très révélateur. Il s’agit du fait que les États-Unis, par le biais de leurs diverses organisations, se sont essentiellement emparés de la sphère du savoir, du domaine du savoir où ils parrainent un grand nombre d’intellectuels et d’hommes politiques jeunes et prometteurs du Sud. C’est un autre problème que nous devons surmonter, je suppose, parce qu’ils transplantent ensuite ces mêmes institutions du savoir dans leur pays d’origine. Peu importe que les locaux aillent à l’étranger pour obtenir un doctorat ou une formation en Occident. Il s’agit donc d’un autre défi très pratique auquel nous sommes confrontés.

Il s’agit en quelque sorte de dénicheurs de talents pour les traîtres, à la recherche d’individus opportunistes prêts à se ranger du côté des États-Unis afin d’obtenir des revenus d’organisations non gouvernementales, de fondations et de groupes de réflexion US, et d’apprendre peu à peu la ligne du parti qu’ils doivent représenter. Ils se rendront compte qu’ils ont besoin de l’appui des États-Unis pour progresser, même au point de devenir président ou homme politique, en raison de tout l’argent investi dans l’achat de traîtres. Lorsque Victoria Nuland a déclaré en 2015, nous avons dépensé 5 milliards de dollars en Ukraine pour prendre le contrôle des kleptocrates et des politiciens afin de nous assurer qu’ils servent les politiques US.

Si 5 milliards de dollars sont investis rien qu’en Ukraine, vous pouvez imaginer le montant investi en Chine, en Inde et dans d’autres pays asiatiques, tout cela pour acheter le contrôle de ces pays. Sans parler du prestige que confère un diplôme universitaire américain, même si les universités US essaient toutes de vous apprendre à ne pas vous développer au lieu de vous apprendre à vous développer, même si elles vous enseignent que la façon de se développer est de privatiser et de laisser les financiers et les banquiers prendre le contrôle de votre économie et la diriger pour les banquiers, et non pour la population dans son ensemble. Eh bien, si vous êtes sponsorisé et acheté par les Etats-Unis, si vous recevez de l’argent pour étudier cela à l’université, c’est ainsi que vous penserez. Le problème est de savoir comment les pays d’Eurasie vont développer un système éducatif, des médias publics, une idéologie et des valeurs morales qui placent la population au premier plan, et non les 1 % de banquiers au premier plan.

 KC : La question est donc la suivante : vos commentaires sur le discours de Yellen à l’université Johns Hopkins ont fait l’objet de vidéos et ont été diffusés à l’antenne. De nombreux spectateurs chinois ont fait remarquer que la stratégie économique de Yellen à l’égard de la Chine n’était qu’un rêve éveillé, car nous n’avons pas besoin de nous préoccuper de ce qu’elle dit, puisque le montant des échanges commerciaux des États-Unis ne représente que 10 % des échanges commerciaux de la Chine. Les sanctions américaines à l’encontre de la Chine n’ont donc rien de bon pour les États-Unis. Et les alliés européens n’écouteront certainement pas les stratégies américaines et ne sanctionneront pas la Chine, car cela nuira aux intérêts de l’Europe. Par exemple, Macron a déclaré que l’Europe devrait se débarrasser du contrôle US et faire preuve de bonne volonté à l’égard de la Chine. Et après avoir dit cela, il a obtenu les gros contrats d’Airbus de la Chine. Cela montre que les alliés des Etats-Unis n’écoutent pas vraiment les Etats-Unis. Comment réagissez-vous à de tels points de vue ?

Quand Macron dit que l’Europe doit être indépendante des États-Unis, il fait de la démagogie. Il dit ce que les électeurs veulent entendre. Et les électeurs européens veulent effectivement être indépendants des États-Unis. Mais Macron ne veut pas être indépendant des États-Unis. Macron sait qu’il est soutenu par les États-Unis. Ses intérêts ne sont pas ceux des électeurs. Son intérêt est d’être élu, bien qu’il ait des intérêts contraires à ceux des électeurs. Il n’est pas digne de confiance. C’est un pur démagogue qui essaie de faire semblant d’être en faveur de l’Europe pour pouvoir utiliser sa position de président pour doubler l’Europe et soutenir les États-Unis autant qu’il le peut. Il s’agit simplement d’un opportuniste, et non d’une position de principe.

Je suppose que l’on peut dire cela de n’importe quel politicien. Mais Macron, dès le début, en prétendant être un socialiste, est en fait un financier néolibéral et il est dans la poche des États-Unis. Donc, au lieu de regarder ce qu’ils disent, il faut regarder ce qu’ils font.
Je pense que c’est la raison pour laquelle la Chine a déclaré ces dernières semaines : « Nous ne parlons pas aux militaires US ». Quel est l’intérêt pour la Chine de parler à des généraux qui ne font que mentir et inventer des choses ? La Chine dit : « Vous dites une chose, vous en faites une autre ». C’est ce qu’a déclaré l’un des responsables du ministère chinois des affaires étrangères il y a deux jours. Et ils ont tout à fait raison.

Les Etasuniens disent ce qu’ils pensent que le monde veut croire, mais ils font autre chose. Vous pouvez donc tout aussi bien regarder ce que font les Américains, en particulier le terrorisme qu’ils pratiquent en Ukraine. C’est un exemple de ce qu’ils pourraient faire en Chine, tout comme ils l’ont fait en Libye, en Irak et en Syrie. Regardez la façon dont ils traitent les autres pays, la façon dont ils ont même traité leur principal allié, l’Allemagne, en s’attaquant à ses importations de pétrole, de gaz, d’engrais et d’autres produits en provenance de Russie, ce qui a étranglé l’économie allemande.

Comme l’a dit Kissinger, il est dangereux d’être un ennemi des États-Unis, mais il est fatal d’être leur ami. Il ne faut pas être trop ami avec les États-Unis, comme l’est M. Macron, ni croire ce que disent les politiciens pro-étasunien. Il faut regarder ce qu’ils font. Et parfois, ils sont tellement sûrs d’eux. Il faut regarder ce que dit Victoria Nuland. Elle dit carrément que nous sommes prêts à tuer tous ceux qui ne sont pas d’accord avec nous. Nous sommes prêts à faire ce que les Etats-Unis d’Amérique a fait à Salvador Allende au Chili lorsque nous avons mis en place Pinochet. Nous sommes prêts à soutenir un coup d’État en Ukraine. Nous leur disons de tuer les russophones. Nous sommes vraiment prêts à détruire le monde.

Et puis il y a les chrétiens étasuniens qui disent, vous savez, faire exploser le monde avec la guerre atomique n’est pas une si mauvaise chose, parce que quand vous aurez fait exploser le monde, Jésus viendra. Il enverra les Etasuniens au paradis et tous les étrangers en enfer, c’est-à-dire les chrétiens au paradis et tous les non-croyants en enfer. Et les non-croyants sont ceux qui ne croient pas que les économies devraient être dirigées par les banques, en gros.

C’est le genre de souhaits de mort que l’on entend de la part des États-Unis. C’est pourquoi l’armée US est un peu plus hésitante que le Département d’État lorsqu’il s’agit de savoir ce qu’elle va faire sur le plan militaire. Mais encore et encore, lorsque le Département d’État et les politiciens, le Secrétaire d’État Blinken, disent : « La Russie n’a pas vraiment de lignes rouges. Si elle avait une ligne rouge, elle aurait déjà fait quelque chose. Nous pouvons faire ce que nous voulons parce que nous sommes les Etats-Unis d’Amérique ». C’est la même politique qui peut être utilisée contre la Chine ou tout autre pays.

 Jade : Michael, j’ai une question sur la dédollarisation. Et maintenant, nous discutons de l’ancrage du RMB. Comment se fait-il qu’il soit lié aux ressources naturelles ?

Je pense que lorsqu’il est question de lier la nouvelle monnaie artificielle qui sera utilisée par les gouvernements, comment va-t-on fixer le prix de ce nouveau droit de tirage spécial ? Il semble juste de l’évaluer en fonction de la valeur des ressources naturelles, car c’est ce que le Sud produit actuellement. Le prix doit être fixé de manière à fournir suffisamment de crédit aux exportateurs de ressources naturelles pour qu’ils puissent élargir leur économie - et ne pas simplement se retrouver avec un trou dans le sol lorsque leurs ressources naturelles auront disparu, mais utiliser leurs exportations de ressources naturelles pour les remplacer par des moyens de production industriels, des moyens de production agricoles, des moyens de production commerciaux.

Comment leur permettre d’utiliser leurs exportations de matières premières pour lesquelles ils obtiendront des crédits et qui seront titrisées pour pouvoir les échanger contre une aide à la création d’une sorte d’économie industrielle, comme c’est le cas en Chine, mais aussi dans d’autres pays qui ont dépassé le stade de producteurs de ressources naturelles et qui veulent aboutir à une économie permanente et autosuffisante au lieu de se vider dans un trou au fond du sol ?

Je ne sais pas comment l’élaborer davantage, mais je ne peux pas aller plus loin pour l’instant. Dans les grandes lignes, il s’agit de faire en sorte que ces pays deviennent des économies globales équilibrées. Vous ne voulez pas qu’ils deviennent des monocultures. Les monocultures ont été déformées comme elles le sont à cause du soutien de la Banque mondiale aux seuls secteurs d’exportation de matières premières, sans que ces pays ne se nourrissent de leurs propres céréales, sans qu’ils ne produisent leurs propres biens de consommation, mais en devenant dépendants des États-Unis pour leur alimentation et leurs biens de consommation.

Vous voulez rendre le reste du monde indépendant de l’Amérique du Nord et de l’Europe, sa colonie, afin que l’Amérique du Nord et l’Europe ne puissent plus vous menacer de sanctions, ne puissent plus déstabiliser votre économie en ne vous vendant tout simplement plus de nourriture et que vous mouriez de faim. Les pays peuvent produire leur propre nourriture, comme lorsque les États-Unis ont sanctionné la Russie et que celle-ci a fini par produire sa propre nourriture, son propre fromage, son propre vin et d’autres produits agricoles. Et vous voulez vous assurer que les sanctions visant à perturber les économies n’auront aucun effet sur les économies eurasiennes, mais qu’elles n’affecteront que l’Europe, qui est la partie du monde que l’Amérique essaie d’enfermer dans la dépendance comme elle a enfermé l’Amérique Latine dans la dépendance.

Le plus difficile sera de faire en sorte que l’Amérique Latine participe à la croissance mondiale au lieu de s’affranchir de l’impérialisme financier US. À un moment donné, ces pays devront cesser de payer leur dette en dollars. Ils devront dire que la dette que nous avons envers les détenteurs d’obligations étrangères était une dette prédatrice, une mauvaise dette contractée par un gouvernement d’occupation. Nous n’allons pas payer la Banque Mondiale. Nous n’allons pas payer le FMI et nous n’allons pas payer les détenteurs d’obligations. Nous faisons désormais partie d’un monde différent. Nous avons quitté le monde du dollar pour entrer dans le nouveau monde du 21e siècle.

 KC : Je pense que Michael a soulevé un point très important tout à l’heure, à savoir que dans ce nouveau bloc, peut-être ce que nous appelons le bloc BRICS ou le bloc eurasien, les relations entre les différents pays devraient être différentes, qu’ils ne devraient pas répéter le statu quo selon lequel l’un fournit les matières premières et les ressources naturelles et les autres en tirent profit. Je pense que cela doit également être lié à ce que Samir Amin proposait à propos de la dissociation, afin que chaque pays établisse son propre programme de développement, d’industrialisation et ne soit pas soumis à la logique ou aux règles de ces puissances hégémoniques dans la division du travail au niveau mondial. Vous proposez donc un autre type de relations et un autre paradigme de développement. Pourriez-vous nous en dire un peu plus ? Je pense que ce que vous venez de dire est très important : il ne s’agit pas seulement de construire un bloc contre le bloc États-Unis-Europe, mais de répéter le même type de logique.

Le problème est que les bureaucraties et les départements administratifs des gouvernements d’Amérique Latine, d’Afrique et d’Asie ont été formés non seulement aux États-Unis, mais aussi dans le cadre d’une doctrine économique, d’une théorie néolibérale promue par la Banque Mondiale, le Fonds Monétaire International, le système scolaire des États-Unis et les personnes qui décernent le prix Nobel pour la pensée néolibérale financiarisée de l’École de Chicago. Il faut une bureaucratie formée pour comprendre qu’il existe une autre façon de développer. L’Eurasie et la majorité mondiale ne doivent pas se contenter de dire qu’elles seront indépendantes de l’Amérique et de l’Europe, mais qu’elles seront exactement comme les USA et l’Europe. Nous allons essayer de faire mieux.

Nous ne serons pas financiarisés comme les Etats-Unis et l’Europe, mais nous le serons par nous-mêmes, pas par les États-Unis. Ce serait un désastre parce que l’Asie et la majorité mondiale finiraient comme les États-Unis et l’Europe, sans industrie, polarisés économiquement avec quelques milliardaires au sommet de l’économie, dominant l’économie appauvrie et criblée de dettes dans son ensemble.

Il faut donc toute une structure administrative, une organisation d’agences gouvernementales et de bureaucraties qui visent à créer un type de société très différent de celui des États-Unis et de l’Europe. Il ne s’agit pas simplement de dédollariser, d’être comme les Etats-Unis d’Amérique et l’Europe mais d’utiliser sa propre monnaie. Il s’agit d’une nouvelle civilisation, d’un nouveau type de civilisation différent du détour qu’a pris la civilisation occidentale.

C’est pourquoi j’ai écrit l’histoire de l’effondrement de l’Antiquité, pour montrer comment la civilisation occidentale, il y a 2000 ans, a pris un tournant différent de ce qui s’est passé en Asie et dans le reste du monde. Il faut se rendre compte que l’Occident a pris un détour et revenir à un développement doté d’un gouvernement suffisamment fort, pas un palais mais quelque chose comme un parti gouvernemental qui sera chargé de structurer les marchés de manière à ce que l’ensemble de l’économie en profite.

Il faut veiller à ce que chacun puisse subvenir à ses besoins fondamentaux sans s’endetter. Si quelqu’un doit s’endetter pour obtenir des soins médicaux, se nourrir, se loger, comme c’est le cas aux États-Unis, il finira par devenir une classe dépendante et perdra sa liberté. Vous voulez créer un autre type de société - pas seulement une économie différente, mais une société différente où les gens ne perdront pas leur liberté. Ce sera un droit public que d’avoir une santé publique, la possibilité d’avoir son propre logement, d’avoir sa propre éducation sans s’endetter.

Aux États-Unis, le fait de s’endetter à vie signifie que l’on doit accepter un emploi, aussi peu rémunérateur soit-il, et que l’on se retrouve à travailler dans la version financière de la dépendance à l’égard de la dette et du féodalisme. L’Occident est retombé dans une sorte de féodalisme, un féodalisme financiarisé, un néo-féodalisme. Vous voulez une économie qui ne soit pas une société féodale de rentiers, et vous y parvenez en empêchant les familles et les entreprises de s’enrichir par la recherche de rentes, de s’enrichir sans rien produire, mais simplement par des moyens d’exploitation.
Vous voulez établir des statistiques économiques qui distinguent l’exploitation prédatrice de la réalisation d’un profit.

Vous ne voulez pas considérer que ce que reçoit un propriétaire absent ajoute au produit national, car cela revient en fait à siphonner le revenu des locataires. Vous voulez que tout le monde puisse avoir sa propre propriété, en fin de compte sans s’endetter.

La meilleure façon d’y parvenir, au lieu de financer la propriété par un crédit hypothécaire, est de taxer les ressources qui rapportent des loyers. Il faut une taxe foncière, une taxe sur les monopoles, une taxe sur les ressources naturelles et une taxe financière. Le système fiscal est absolument essentiel pour créer un véritable « marché libre » tel que les économistes classiques cherchaient à le créer. C’est le contraire du type de marché libre dont parlent les États-Unis et l’Europe, c’est-à-dire un marché où Wall Street est libre de faire ce qu’elle veut du reste de l’économie, où les monopoles sont libres de facturer ce qu’ils veulent, où les créanciers sont libres de saisir les biens de leurs débiteurs. Vous avez un concept totalement différent de ce qu’est un marché libre, un concept différent de ce qu’est la liberté, un concept différent de ce que sont les droits de l’homme et les droits naturels, et un concept différent de ce que devrait être l’infrastructure publique.

Il s’agit là d’une façon différente d’envisager l’évolution du monde, et il faut développer cette alternative et la partager pour que d’autres pays puissent se rendre compte que « oui, il existe une alternative à l’économie US gérée par les banques ». Voici les grandes lignes d’une alternative et nos gouvernements vont créer des agences administratives et des principes de régulation qui favorisent le bien-être général, et pas seulement le bien-être financier. L’économie réelle, et non les créances financières sur l’économie réelle.

Hong Kong, 5 juin 2023

Michael Hudson* pour son blog personnel

Michael Hudson. Usa, le 20 juin 2023.

Traduit de l’anglais par et pour : El Correo de la Diaspora->http://www.elcorreo.eu.org]. Paris, le 24 juin 2023.

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