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Par Jooneed Khan
La Presse. Canada, le 28 novembre 2007.
La profonde réforme de l’État engagée par Evo Morales, premier président autochtone de Bolivie, a polarisé le pays le plus pauvre d’Amérique du Sud entre, d’une part, la majorité indigène et paysanne et, d’autre part, l’oligarchie blanche au pouvoir deux siècles durant [au moins], le plus souvent par l’entremise des forces armées et des putschs.
Après l’adoption du projet par l’Assemblée constituante samedi à Sucre, capitale judiciaire du pays, lors d’une session boycottée par l’opposition, de violentes manifestations ont fait au moins trois morts dans la ville dimanche.
Lundi, Morales a mené une marche paysanne sur La Paz, capitale administrative, à l’appui de la nouvelle Charte et de mesures sociales en faveur des plus pauvres, dont une « Rente de dignité » de 25 dollars (près de 17 €) par mois pour les plus de 60 ans.
Les opposants, qui ont mis en déroute policiers et paysans intervenus contre les émeutiers à Sucre, ont annoncé pour aujourd’hui une grève de protestation. Ils sont menés par les gouverneurs des six provinces les plus riches sur les neuf qui composent la Bolivie, dans un système qui leur reconnaît une large autonomie provinciale.
Le principal opposant, Jorge Quiroga, ancien président conservateur (2001-2002), a affirmé [élégamment] que le projet de Constitution de Morales « n’a pas plus de valeur qu’un papier hygiénique utilisé ».
Les enjeux
« Le peuple en a assez de cette humiliation et il est descendu dans la rue pour défendre sa souveraineté », a déclaré Isaac Avalos, de la Confédération des paysans, à la marche de lundi à La Paz.
« On y voit plus clair », a commenté le vice-président Alvaro Garcia Linera, « nous avons face à face les forces vives, populaires et indigènes, et la classe moyenne, contre le camp de la bourgeoisie et des exportateurs agricoles ».
Porté en 2005 par la vague progressiste qui balaie l’Amérique latine, Morales a placé le secteur énergétique (gaz et pétrole) sous contrôle de l’État et lancé une réforme agraire. Vendredi, le Congrès a haussé de 25% à 37,5% l’impôt sur le revenu des firmes minières.
Appels au dialogue
Le projet de Constitution, qui doit être soumis à un référendum, prévoit un État « unitaire, laïque, plurinational et communautaire », le drapeau indigène « whiphala » pour emblème national, une Chambre unique, et l’interdiction de la « concentration économique ».
La présidente de la Constituante, Mme Silvia Lazarte, a souligné que le texte n’était pas définitif et devra être discuté « plus tard en détails, article par article ».
Le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, a exhorté « tous les acteurs politiques et sociaux à s’abstenir de toute violence et à rechercher le consensus pour renforcer la démocratie et le respect des droits humains en Bolivie ».
Les évêques du pays ont lancé un urgent appel « au dialogue et à la rationalité pour forger l’avenir entre frères et sœurs ».
Face aux médias aux mains de l’oligarchie, les partisans de Morales utilisent les blogues et s’expriment sur Bolivia Indimedia. Un appel, signé aussi par des Canadiens, accuse les États-Unis de cibler la Bolivie, « maillon faible de l’axe de l’espoir » en Amérique latine, et « les vieilles élites qui refusent la moindre parcelle de réforme ».