Portada del sitio > Imperio y Resistencia > Santo > Le pape François et les promesses d’un nom.
Ce mardi, le nouveau pape François a célébré la messe d’inauguration de son pontificat devant près de 200 000 fidèles. Elu le 13 mars, quelques semaines après la renonciation de son prédécesseur Benoît XVI, Jorge Mario Bergoglio, archevêque argentin de 76 ans, était déjà le favori du précédent conclave. Loué pour son humilité et sa fibre sociale, critiqué pour son silence durant la junte militaire en Argentine et ses positions conservatrices sur le plan des mœurs, le pape a choisi un nom que Frei Betto, théologien brésilien de la libération, estime plein de promesses.
par Frei Betto, mardi 19 mars 2013
Les relations entre Brésiliens et Argentins sont cordiales malgré des turbulences dans le domaine commercial. Les Argentins adorent les plages du Brésil où ils se réfugient durant les vacances d’été et les Brésiliens submergent Buenos Aires à la recherche de produits bon marché et de ce qu’il reste de la nostalgie du tango dans la voix de Gardel et du son du bandonéon de Piazzola.
La rivalité domine dans le football. Qui est le meilleur ? Pelé ou Maradona ? Si à présent le pape est argentin, notre consolation reste la certitude que Dieu est brésilien…
L’élection du pape François a confirmé une nouvelle fois le proverbe romain : « qui entre pape au conclave en sort cardinal ». L’élu ne figurait sur aucune liste de papabile. Et pour la première fois, l’Amérique latine voit un de ses fils monter sur le trône de Pierre. La seconde surprise, c’est le nom choisi par le cardinal Jorge Mario Bergoglio : François. Aucun pape auparavant n’avait rendu hommage au saint d’Assise (1182-1226), considéré comme la plus grande célébrité catholique du dernier millénaire. Tout comme jamais aucun pape ne s’est fait appeler Pierre II, ni n’a pris le nom des évangélistes Matthieu et Luc.
Qui est Jorge Mario Bergoglio ? Prêtre de la compagnie de Jésus, il a occupé des fonctions de direction parmi les jésuites, ce qui l’a habilité pour l’épiscopat. Il n’y a pas de preuves que Bergoglio, comme tant de prêtres et d’évêques argentins, a explicitement soutenu la dictature militaire (1976-1983), responsable de la mort de plus de trente mille citoyens, de la séquestration et disparition de près de trois mille nouveau-nés, enfants de présumés terroristes.
Le nouveau pape ne s’est jamais singularisé non plus par la dénonciation des violations des droits humains pratiquées par les militaires, comme l’ont fait les évêques Novak et Angelli — ce dernier a péri dans un accident routier en 1976 dont on pense qu’il a été causé par les militaires. L’ancien supérieur des jésuites argentins a préféré, dit-il, agir dans les coulisses en intervenant en faveur des persécutés.
Un conservateur critique
Sur le plan doctrinal, Bergoglio est un conservateur. Il ne faut pas attendre de lui qu’il admette l’union civile des homosexuels ni la fin du célibat obligatoire. Cependant, le choix du nom François symbolise quatre dimensions caractéristiques du saint d’Assise :
Si le pape François, en adoptant ce nom, a aussi pensé à Francois Xavier (1506-1552), le saint jésuite qui prêcha l’Evangile aux Orientaux, alors le nom du nouveau souverain pontife exprime tout un programme de réactualisation de l’église catholique, à commencer par la réforme de la curie romaine, par la formulation d’une nouvelle morale sexuelle et par une nouvelle évangélisation qui réalise les propositions du Concile Vatican II, comme l’œcuménisme et le dialogue inter-religieux, admettant que, en dehors de l’église catholique, le salut existe aussi.
La Valise Diplomatique. Paris, 19 mars 2013.
[1] Le nouveau pape s’est néanmoins toujours distancé de ce mouvement, au nom du refus de la politisation de l’Eglise. Jorge Mario Bergoglio, lorsqu’il était archevêque de Buenos Aires, était pourtant considéré par les médias comme le premier opposant de la présidente argentine Cristina Kirchner, notamment sur la question du mariage homosexuel…