Portada del sitio > Imperio y Resistencia > « Gringolandia » (USA) > Le G 7 épluche les comptes des Etats Unis
Par Jean-Pierre Robin
Le Figaro. Washington, 16 avril 2005
Une fois n’est pas coutume, l’opinion publique américaine et le Fonds monétaire international (FMI) sont totalement en phase pour reconnaître que les Etats-Unis devraient sans attendre mettre de l’ordre dans leurs comptes. Sondage Gallup exclusif à l’appui, le quotidien USA Today titre à la une de son édition de ce week-end : «De l’avis de beaucoup de ménages américains, il est temps de se mettre au régime financier.» Et le journal de stigmatiser «le taux d’épargne des ménages, au plus bas depuis vingt-cinq ans. Et les faillites personnelles, qui ont atteint un record en 2004».
C’est le message que le FMI a martelé tout au long de cette semaine préparatoire aux réunions du G 7 des ministres des Finances et des assemblées de printemps du Fonds et de la Banque mondiale qui se tiennent aujourd’hui. Sans désigner nommément les Etats-Unis, en déficit extérieur de 665 milliards de dollars en 2004, Rodrigo Rato, le directeur général du FMI, a tiré la sonnette d’alarme sur l’ampleur des «déséquilibres des comptes courants». Il y voit le principal risque de ralentissement de l’économie mondiale, au même titre que la flambée des prix du pétrole. L’économiste en chef du FMI, Raghuram Rajan, considère que «les Etats-Unis doivent épargner plus», tout en accusant par ailleurs les Américains de gaspiller l’énergie et de taxer insuffisamment les carburants.
Cette convergence entre l’un des journaux les plus représentatifs de l’Amérique profonde et les analyses du FMI, qui assurent le secrétariat de l’économie mondiale, anticipe-t-elle un accord au G 7 portant sur rééquilibrage des échanges mondiaux et donnant une réponse à l’envolée du brut, qui vient de frôler les 60 dollars le baril ? Rien n’est moins sûr.
Le secrétaire américain au Trésor, John Snow, en prélude au G 7, a accusé ses partenaires Japon et Europe de contribuer aux déséquilibres commerciaux du fait de l’insuffisance de leur demande intérieure : «Ils ont besoin de se débarrasser des obstacles à la croissance.» Et de façon plus insidieuse, alors que l’Europe s’interroge sur les moyens d’endiguer la marée de textile chinois, le grand argentier américain porte le débat sur le terrain commercial : «Ces voix isolationnistes sont inquiétantes.»
Il n’est pas non plus de bon augure que le ministre des Finances chinois et le gouverneur de la Banque de Chine, qui avaient participé aux deux précédentes réunions du G 7 de septembre et de février, aient cette fois décliné l’invitation qui leur avait été lancée. Ils ne participeront pas non plus aux autres réunions financières de ce week-end à Washington. Ils éviteront ainsi d’avoir à s’expliquer tant sur le textile que sur leurs intentions vis-à-vis de leur monnaie. Le président George Bush lui-même a encore demandé jeudi que Pékin laisse flotter le yuan, afin, dit-il «de garantir des échanges commerciaux équitables au reste du monde».
Sur le dossier du pétrole aussi, les positions restent très disparates. Certes, une évolution se dessine et désormais le déséquilibre offre-demande est envisagé dans une perspective de plus long terme, plutôt que de se contenter de demander à l’Opep de relever ses quotas de production. Mais comme le note John Taylor, le sous-secrétaire américain au Trésor, «les Européens veulent un vrai plan d’économie d’énergie, alors que les Américains préfèrent parler d’une hausse de l’offre», des investissements de recherche et dans le raffinage.