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17 octobre 2005

La tendance au chaos de la Bolivie

 

Par Antonio Peredo Leigue
Rebanadas de Realidad
. Bolivia, La Paz, le 26 septiembre 2005.

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Pendant 180 ans, depuis la fondation de cette république, les classes dominantes ont oscillé entre deux extrémités : un modèle d’ordre, paix et travail ou bien une tendance au chaos. Il est évident qu’ils proclament d’abord l’ordre quand ils ont dans leurs mains les rênes du pouvoir et, en revanche, ils se laissent glisser vers le désordre quand ils cherchent à créer des conditions pour le chaos, sentant que leur pouvoir se trouve en danger.

Aujourd’hui, sous l’impulsion des secteurs populaires mobilisés depuis l’an 2000, les groupes de pouvoir se contorsionnent. Une partie essaye de pénétrer les milieux dans lesquels les auitres se déplacent, une autre s’est abritée au sein des institutions qu’ils peuvent gérer en faveur de leurs manœuvres ; Rares sont ceux qui comprennent qu’ils doivent assumer une réalité nouvelle.

Un peu d’histoire

Il suffirait de rappeler deux épisodes de l’histoire républicaine, pour comprendre ce processus. Le premier est la transition au modèle libéral, à la fin du XIXe siècle : les conservateurs, qui ont maintenu la structure du pouvoir colonial avaient épuisé leurs réserves politiques, sociales et aussi économiques ; la guerre du Pacifique (1879) qu’ils ont perdu en quelques mois, leur a porté l’estocade. Une tendance rénovatrice, le libéralisme, luttait pour changer toute la structure du pouvoir. Le conservatisme, encore conscient dans son agonie, a résisté au changement et a provoqué un climat d’instabilité par les actions les plus comiques. Sa tentative finale fut le début d’une guerre civile ; cela n’a pas gêné la classe dominante agonisante que ses jeunes plus brillants meurent dans la tentative. Le triomphe, comme il était prévisible, fut pour les libéraux.

L’autre cas s’est produit au milieu du siècle dernier : la révolution nationale de 1952. Encore une fois, une guerre (1932-1935), a consommé les énergies du groupe dominant, bien qu’il soit certain que son agonie ait été beaucoup plus longue. Durant ce passage, le groupe dominant a entraîné deux présidents (Busch et Villarroel), a provoqué une guerre civile, n’a pas reconnu une élection et a voulu, donc, confirmer son obstination en résistant à mort à l’insurrection populaire. Seulement après trois jours de confrontations sanglantes, la classe dominante s’est rendue et a fini par expirer. Ces histoires montrent que, plus elles ont résisté à l’avancée de secteurs rénovateurs, pire a été leur sort.

Cinq ans de destruction

Quand, en 1985, le modèle néolibéral a commencé à se mettre en place, la classe dominante a célébré ce démarrage en construisant les alliances qui lui assuraient, selon ses analystes, cinquante ans de pourvoir. Le MNR de Paz Estenssoro, l’ADN de Banzer et le MIR de Paz Zamora, avec d’autres groupes arrivistes, se sont préparés à gouverner pour un demi-siècle, de la seule manière qui savent le faire, en se distribuent le pouvoir.

Quinze ans après, ils se sont réveillés face à une réalité qu’ils ont refusé de voir pendant tout ce temps : ils avaient fait soumettre trop de gens et ils se sont soumis à l’excès aux pouvoirs transnationaux. La « guerre de l’eau » en mars-avril 2000 (Voir : Bolivie : situation de rébellion populaire contre le concessionnaire du Groupe Suez), a condamné le modèle ; depuis lors une longue agonie a commencé, qui continue à provoquer de multiples destructions.

Les dirigeants ont perfectionné la politique du cynisme : ils ont fait face à tous les conflits sociaux avec des promesses et jusque dans des documents officiels, dont tout de suite ils se chargeaient de ne pas tenir compte, en provoquant de nouvelles mobilisations qui prenaient fin avec d’autres accords qui n’étaient pas appliqués non plus. Durant cinq années, ce processus a généré une telle irritation populaire, au point qu’il ne reste aucune de forme de crédibilité, de confiance, ni de respect envers les organismes de l’État. On est arrivé à un degré tel, que tous les secteurs - y compris les secteurs patronaux- sont convaincus que seules des mobilisations publiques peuvent obliger à ce que leurs demandes soient assurées ; pire encore : les mesures de pression ne sont pas suspendues jusqu’à ce que débute l’application des engagements de l’Etat.

Malgré la violence installée dans le pays, produit par cette politique, le peuple est resté à l’intérieur de certaines marges à caractère institutionnel qui encerclent la classe dirigeante. Ses derniers dirigeants ont dû s’abriter derrière la démission (Sanchez de Lozada, Mesa Gisbert), face à l’impossibilité de contenir le courrant rénovateur de la société.

La somme des pertes provoquées par l’agonie du système est écrasante : plus de 200 morts, des blessés par centaines et les victimes se comptent par milliers. L’économie du pays est arrivée à un point de rupture, bien que ses indices montrent un progrès qu’on peut seulement expliquer par les profits des multinationales (étrangères, bien sûr. NDLT), qu’elles sortent du pays. Les noyaux de la société : la famille et la communauté, ont été sérieusement affectés et une longue période pour recomposer sa structure sera nécessaire.

Les tentatives légalistes

Au niveau politique, la classe dominante s’est défendue becs et ongles. En 2002, quand les élections générales l’ont menée à l’échec, elle a encore pu remuer ses vieux pions pour composer un gouvernement faible et contradictoire qui a réussi à se maintenir à dures peines 14 mois. La sagesse populaire avait prévenu le gouvernement, en prévoyant que sa rupture créerait des conflits inutiles. Le successeur, disposé d’abord à s’adapter à la nouvelle situation, ensuite s’est révélé comme un défenseur tenace du modèle agonisant. Vingt mois plus tard, il a du s’en aller, poussé vers la sortie avec des manifestations dans la rue.

De fait, la classe dominante dont la représentation a prétendu ne pas reconnaître le successeur de Carlos Mesa, s’est regroupée quelques mois plus tard au sein d’une institution très connue : le Comité Civique pro Santa Cruz, auquel l’oligarchie crucegna fait la révérence et le peuple de ce département obéit avec très peu de résistance. De là, il a obligé d’abord le président à reconnaître son autorité et ensuite elle a aligné ses pions politiques et légaux pour attaquer le mouvement populaire.

Pour freiner la récupération de la propriété étatique des hydrocarbures comme la réalisation de l’Assemblée Constitutive, les conspirateurs ont levé le drapeau de l’autonomie départementale. Cette demande réfléchie des régions dont le centralisme condamne à retarder des aspirations, leur sert maintenant pour s’opposer à de plus larges conquêtes du peuple.

Cette demande introduite au calendrier national, ils ont cherché l’élection d’autorités départementales, avec le but à peine voilé de gérer les ressources produites par l’exploitation des hydrocarbures. Comme la dite élection a été intégrée dans les élections générales qui doivent avoir lieu en décembre, ils ont trouvé une nouvelle argutie légale pour provoquer instabilité et chaos : la répartition des sièges parlementaires en accord avec le dernier recensement, en suspens depuis 2002. Avec l’imposant verdict du Tribunal Constitutionnel et un complice béni oui-oui de la Cour Nationale Électorale, en procédant à une telle distribution, on modifierait le calendrier électoral. Si le retard provoque un malaise dans tous les secteurs, la possibilité d’une nouvelle distribution a déjà motivé la crispation des esprits dans les départements concernés. Le nombre total de députés est invariable ; par conséquent, en modifiant la répartition, quelques uns gagnent et d’autres perdent. De cette manière, on crée des conditions de confrontation entre des régions ; l’alternative d’une guerre civile plane à nouveau dans l’air.

Après la « guerre du gaz » (septembre-octobre 2003), avec sa cohorte des morts et de blessés, et le blocus dur de mai-juin de cette année, les forces populaires analysent comment faire face à la tendance au chaos vers lequel bascule la classe dominante. Cette tendance est utilisée comme stratégie : on a recourt à toutes les possibilités, on prépare les arguments et les contre-arguments, on établit les calendrier. Il semblerait que, la tendance au chaos, utilise leurs derniers restes de vitalité.

Sur leurs positions, les forces populaires se barricadent dans la défense de la démocratie et la lutte pour l’unité du pays, comme principes de base. Il s’agit d’entamer une grande campagne de prise de conscience qui rassemble le peuple autour de ses intérêts majeurs. Depuis cette position, il faudra arriver à une solution concertée au conflit qu’a déclenché l’action intéressée du Comité pro Santa Cruz. Toutefois, si la classe dominante ne comprend pas ce message, la guerre civile qu’ils prétendent déclencher, leur portera l’estocade.


Traduction pour El Correo : Estelle et Carlos Debiasi

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