recherche

Accueil > Notre Amérique > La coopération au développement comme contre insurgence dans les Amériques.

23 novembre 2007

La coopération au développement comme contre insurgence dans les Amériques.

 

Par Raúl Zibechi
La Jornada
. Mexico, le 23 novembre 2007.

Leer en español

Après les attentats du 11 septembre 2001, les stratèges étasuniens ont décidé d’intégrer leur agence pour le développement (USAID) aux plans de guerre contre le terrorisme. La revue Military Review l’analyse ainsi dans son édition de septembre-octobre et considère que « l’aide humanitaire » de la superpuissance doit être focalisée vers « des populations et des régions considérées à haut risque » avec l’objectif de « refuser un refuge et un financement aux terroristes, en diminuant les conditions sous-jacentes qui font que les populations locales sont vulnérables au recrutement de la part des terroristes ».

Les objectifs tracés par la « coopération » du premier monde vers le troisième consistent, selon cette stratégie, à « fortifier une gouvernabilité réelle et légitime, des instruments clés pour traiter avec le contre insurgence ». Le changement a surgi à la suite des attaques terroristes aux États-Unis fut de placer dans un lieu approprié le « développement », pour compléter avec les autres deux D, diplomatie et défense, qui jusqu’à ce moment jouaient un rôle central dans le concept de sûreté nationale dessiné par Washington. Dans le langage militaire, « le développement renforce la diplomatie et la défense, en réduisant les menaces de long terme sur notre sûreté nationale, après avoir aider à renforcer des sociétés stables, prospères et pacifiques ».

Il est bien connu que pour les stratèges étasuniens le concept « d’une guerre asymétrique » est devenu l’inéluctable référant au moment de planifier leur avenir comme superpuissance. Ils acceptent que la globalisation ait modifiée les formes traditionnelles du contrôle social, après avoir affaibli la présence des états nationaux dans de vastes régions de la planète, en particulier au sud. Dans beaucoup de zones, comme les périphéries urbaines, le problème est plus grave, puisque les secteurs populaires urbains se sont souvent coupés de l’économie réelle. D’où ont surgi des acteurs non étatiques qui représentent pour le Pentagone un défi majeur, puisque les généraux se montrent convaincus de ce que les forces étatiques ne pourront pas battre les nouveaux insurgés.

La militarisation des pauvres et des environnements physiques où ils vivent doit être accompagnée donc par « des plans sociaux » et des formes de coopération pour provoquer le développement que génèrent les nouvelles formes de contrôle social capable de se substituer celles que ce même système a participé à neutraliser. Les études de l’analyse du terrorisme et de l’instabilité politique identifient comme un facteur clef l’existence « de grandes populations, soit déjà marginées ou privées du droit de vote et exclues du processus politique, comme causes des clés d’instabilité ».

Dans beaucoup de régions et pays l’USAID et les forces armées se consacrent à édifier ou réhabiliter des infrastructures d’éducation, de santé et de services de base, comme celui de l’eau, et cherchent à renforcer la « capacité institutionnelle » de ces sociétés. Pour pousser le développement ils cherchent à améliorer la « connaissance culturelle » des autres et font appel à des légions de spécialistes en sciences sociales qui eux mettent en application les politiques de développement. Mais il fondamental de comprendre comment l’imposition de la démocratie -en réalité il s’agit d’un système électoral qui donne une légitimité à la domination- et le développement -compris comme les biens minimaux auxquels doit accéder la population pour ne pas mourir- sont les formes de contrôle social subordonnées à une stratégie de contrôle des ressources naturelles, qui maintiennent eu même temps les gens dans un état de dépendance.

Dans la phase actuelle, les puissants ont compris que la paix sociale est la condition pour que les affaires fonctionnent bien. Ne pas le faire ainsi et l’enchevêtrement économique peut s’écrouler. En septembre passé s’est tenue à Arequipa, au Pérou, la convention annuelle d’entreprises minières qui opèrent dans ce pays. Les cadres dirigeants de l’une des activités les plus polluantes du monde, qui pendant des décennies ne s’est jamais préoccupé de la vie des gens et des communautés rurales, ont décidé que le sujet central de leur rencontre devait consister à résoudre « la question sociale ».

À une échelle planétaire, le Pentagone opère avec la même logique. La démocratie et le bien-être de la population sont des objectifs subordonnés à la logique de la suprématie militaire, c’est-à-dire, de la domination de ceux d’en haut. Le général Peter Chiarelli, commandant de la première division de Cavalerie des États-Unis en Irak, a remarqué que la pénétration de son groupe s’est produite le jour des élections organisées par la coalition militaire dans le pays occupé (Military Review, un novembre - décembre 2005). Sur ce point la guerre subordonne tous les autres aspects, y compris les affaires, puisque désormais il est seulement important de soutenir, affirmer et promouvoir le pouvoir des puissants.

La coopération au développement fait partie du passage des sociétés disciplinaires aux sociétés de contrôle, qui se résume dans différentes formes de soumettre dehors (enfermement vs. régulation, selon Foucault). Mais les sociétés de contrôle sont de vrais régimes de guerre, dans lesquels, comme a avancé Walter Benjamin, pour les oppressés « l’état d’urgence est la règle ». C’est la violence qui fonde le droit, l’économie, la démocratie. Elle les crée et les maintient tant qu’elle peut. Ainsi les manuels militaires étasuniens le reconnaissent aussi.

Mais la coopération au développement n’est pas, certes, le patrimoine exclusif du Pentagone. C’est devenu l’une des réponses d’en -haut au pouvoir des mouvements ou des sociétés en mouvement. Elle est complémentaire à la militarisation ou à la répression et, souvent, son autre face. La militarisation des favelas de Río de Janeiro, par exemple, n’est pas du tout contradictoire avec l’implémentation du Programme Faim Zéro.

Traduction de l’espagnol pour El Correo de  : Estelle et Carlos Debiasi

Retour en haut de la page

El Correo

|

Patte blanche

|

Plan du site