Accueil > Les Cousins > Chili > La Loi générale d’éducation au Chili ne respecte pas les droits des Peuples (…)
Courant Septembre 2009 a été promulgué au Chili la nouvelle Loi Générale d’Education, proclamant « les droits et devoirs des membres de la communauté éducative ». L’entrée en vigueur de cette Loi coïncide avec celle de la Convention 169, sur les Peuples Indigènes et Tribaux dans les pays indépendants, de l’OIT (organisation internationale du travail) qu’a signé le Chili.
Bartolomé Clavero, membre du Forum Permanent des Nations Unies sur les questions indigènes dans un texte paru le 12 janvier 2010- Education interculturelle contre les droits indigènes au Chili- dénonce à l’occasion de l’entrée en vigueur de ces deux textes- qu’une fois de plus ce pays ne remplit pas ses engagements internationaux en matière de reconnaissance des droits indigènes. Une question sensible à quelques jours des élections présidentielles.
« La Loi sur l’éducation prévoit la présence indigène, mais seulement dans le cas d’établissements d’éducation qui ont un pourcentage élevé d’élèves indigènes », souligne t-il. Dans ce cas seulement, alors il faut donner un enseignement de la langue correspondante et d’autres éléments comme « leur histoire, la connaissance de leurs origines, la culture de leur peuple » sans spécifier l’objet ou le sujet. Et de montrer que la Loi sur l’éducation se borne à dire par exemple qu’à la maternelle les connaissances en langue indigène doivent permettre à comprendre et exprimer des messages simples, ce qui pourrait laisser supposer comme le fait remarquer Bartolomé Clavero que les langues indigènes ne permettent pas plus, puisqu’une telle remarque n’est pas formulée pour l’enseignement de l’espagnol !
En tant « que modalité d’éducation spéciale » cette Loi sur l’éducation introduit une « éducation interculturelle » qui en fait est destinée aux seuls indigènes ; cette éducation dénommée interculturelle non seulement ne sert pas à établir des relations entre la culture indigène et les autres mais est utilisée pour obliger les peuples indigènes à renoncer à leurs revendications, dénonce Bartolomé Clavero.
La Loi établit la création d’un « Consejo Nacional de Educación », qui succède au « Consejo Superior de Educación », mais ni l’un, ni l’autre ne comprennent dans leurs instances dirigeantes la présence de membres issus des peuples indigènes ; or il reviendra à ce conseil « de se prononcer sur l’adéquation des enseignements envers les populations spéciales, y compris les peuples originaires ».
Comme le fait remarquer Bartolomé Clavero, cette Loi a été élaborée alors que la Convention 169 avait été ratifiée. Dans ce traité sous l’égide de l’OIT sur les Peuples Indigènes, il est bien précisé que leur participation est requise dès qu’une décision les concerne. « La Loi générale sur l’éducation ignore totalement cet engagement international du Chili » souligne-t-il « elle devrait être considérée comme invalide »… « la convention 169 exige non seulement la participation indigène dans la gestion de la loi, mais aussi auparavant de les consulter pour accord ».
Prenant en considération la convention 169, le ministère de l’éducation chilien a élaboré un programme pour une introduction limitée des langues et cultures indigènes dans le système éducatif. Le conseil de l’éducation l’a rejeté sur la base d’arguments soi-disant techniques. A travers l’inter culturalité défendue par le gouvernement est véhiculée l’idée de l’obligation indigène d’avoir un lien harmonieux avec la société non indigène mais la réciproque n’est pas prévue. Or la multi culturalité qui n’est pas retenue propose justement un ordre de relations plus équitables entre culture indigène et culture non indigène. Derrière ces argumentations on voit bien qu’il s’agit d’un problème de droits. « Ils ignorent les droits des peuples indigènes sur leurs propres cultures. On ne cesse de répéter à quel point cela viole la convention 169… » martèle Bartolomé Clavero.
Le réseau pour les droits éducatifs et linguistiques des Peuples indigènes du Chili a rappelé dans un communiqué que les peuples indigènes ne pouvaient rester en dehors de ce qui les concernait directement. Et a fait des propositions au gouvernement et au Conseil National de l’Education. Mais seront-elles entendues ?
Et Bartolomé Clavero de conclure : « le Congrès et le gouvernement chilien se comportent comme si la ratification de la convention 169 était un point d’arrivée , un trophée à brandir devant les institutions internationales, et non un point de départ, un engagement auquel il faut fait honneur ».
El Correo d’après le texte de Bartolomé Clavero. Paris, 13 janvier 2010