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Cette visite, ainsi que l’accélération de la collaboration militaire entre le Chili et les États-Unis, indiquent les limites géopolitiques du « gauchisme » libéral-progressiste de Gabriel Boric.
La générale Laura Richardson est revenue en Amérique du Sud fin août, confirmant que cette région constitue aujourd’hui une zone d’intérêt plus immédiatement vital pour les États-Unis qu’elle ne l’était, par exemple, il y a 20 ans. Comme nous l’avons commenté à d’autres occasions, jamais un commandant américain du SOUTHCOM n’a effectué autant de visites sur le continent que Richardson.
Cette fois, la visite de Laura Richardson, accompagnée du général Charles Q. Brown de l’US Air Force, s’est concentrée sur le Chili, où l’événement principal de son agenda était la participation à la Conférence sud-américaine de défense (Southdec).
Cet événement annuel, parrainé par SOUTHCOM, vise à discuter des questions de défense et de sécurité collective en Amérique du Sud… sous la tutelle des USA. En ce sens, derrière le discours officiel qui justifie l’événement, en parlant de « questions de défense et de sécurité collective en Amérique du Sud », il doit s’interpréter comme faisant référence aux questions que les États-Unis (et non les pays de la région) considèrent comme prioritaires.
Ce n’est pas un hasard, qu’alors que le thème officiel de l’événement était « les nouvelles technologies », avec un accent sur leur instrumentalisation pour la « défense de la souveraineté hémisphérique » (un concept qui devrait être traduit par « défense de la souveraineté US dans l’hémisphère occidental »), le général Richardson s’est lancé dans une tirade ennuyeuse et répétitive contre les « gouvernements communistes autoritaires » qui étaient censés « infiltrer » l’Amérique du Sud pour propager la corruption, la désinformation, la cybercriminalité et les violations des droits de l’homme.
C’est un discours hors du temps, qui rappelle excessivement la guerre froide, mais c’est le ton que les satrapes occidentaux utilisent avec leurs clients en Amérique du Sud. Ces propos délirants qui font appel à une « menace rouge », faisant une référence discrète mais claire à la Chine et à la Russie, s’ajoutent aux attaques directes contre le Venezuela, dont le président, Nicolás Maduro, a été accusé par Laura Richardson de « saboter la volonté démocratique du peuple vénézuélien » et d’ être responsable de la crise migratoire dans son pays.
Bien entendu, aucune mention n’a été faite de la politique de sanctions hostiles que les États-Unis ont imposée au Venezuela, ni des effets possibles que cette politique aurait pu avoir sur les flux migratoires vénézuéliens.
Bien qu’elle ne mentionne pas les termes classiques tels que « menaces hybrides », Richardson fait référence à divers éléments de conceptions plus contemporaines de la guerre, qui impliquent des engagements dans de multiples dimensions, mentionnant spécifiquement l’utilisation de l’intelligence artificielle et le contrôle de l’espace.
Concernant le deuxième point, il nous semble évident qu’il est dirigé contre la coopération spatiale croissante entre la Chine et les pays latinoaméricains, ainsi que contre les projets conjoints de satellites, comme le satellite météorologique sino-brésilien qui sera lancé en 2028, et des initiatives similaires que la Chine a tenté de développer en association avec d’autres pays de la région.
Tout cela est présenté dans une rhétorique infantile de « défense de la démocratie », qui serait représentée par les États-Unis et les pays qui collaborent avec les États-Unis dans le cadre du SOUTHCOM.
Les pays en question, présents à Southdec, sont l’Argentine, le Brésil, le Chili, la Colombie, l’Équateur, la Guyane, le Paraguay, le Pérou, le Suriname et l’Uruguay, ainsi que les observateurs du Canada, de la France et du Royaume-Uni. Les pays sud-américains indiqués, qui correspondent à tous, sauf la Bolivie et le Venezuela, constituent ceux dans lesquels les États-Unis ont investi dans le but de les attirer vers une position de collaboration avec l’atlantisme dans l’hémisphère occidental, àtravers une reprise de la doctrine Monroe .
Naturellement, cela se produit avec plus ou moins de succès, l’Équateur et l’Argentine étant les pays où la stratégie américaine a été la plus efficace.
Mais le Chili n’est pas en reste.
Presque simultanément à cette conférence, les États-Unis et le Chili ont organisé deux exercices militaires : SouthernFenix 2024 , au cours duquel les armées des deux pays se sont entraînés dans le désert d’Atacama (une région riche en lithium), et UNITAS LXV, un exercice maritime qui a impliqué 24 pays et a eu lieu cette fois au Chili.
Le général Laura Richardson, cependant, lors d’une précédente visite au Chili, s’est rendue dans des endroits stratégiques tels que Punta Arenas, une zone importante à la fois pour le détroit de Magellan, qui permet le passage de l’Atlantique au Pacifique, et pour son accès à l’Antarctique.
Cette visite, ainsi que l’accélération de la collaboration militaire entre le Chili et les États-Unis, indiquent les limites géopolitiques du « gauchisme » libéral-progressiste de Gabriel Boric, qui semble se contenter de garder son pays comme un appendice des États-Unis, aussi longtemps que possible, car cela se fait dans le respect des « droits de l’homme », de la « démocratie » et de « l’idéologie du genre ».
Raphael Machado* pour Strategic Culture
StratégicCulture , le 11 septembre 2024
Traduit de l’espagnol pour El Correo de la Diáspora par : Estelle et Carlos Debiasi