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1er mars 2011

La Libye, l’OTAN et les dangers de troubles politiques.

par Guillermo Almeyra *

 

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Tout d’abord, quelques données historiques. La rébellion contre la colonisation italienne en Libye a uni les tribus bédouines et les occupants de la Cyrénaïque, dans la moitié du pays la plus proche de l’Egypte, où fut très influente la secte fondamentaliste xénophobe des Senoussi. L’Italie vaincue pendant la Seconde Guerre mondiale, les anglais ont mis au pouvoir le chef de la secte, Idriss Senoussi, comme roi de la Libye et, comme les Etasuniens, ils ont installé dans le pays une importante base navale et militaire. Le pays de fait, en 1951, est devenu une colonie britannique avec un roi et, officiellement « indépendants ». Seulement en 1957/58, la richesse pétrolière libyenne fut découverte, passant de 700 000 tonnes dans ces années là à 122,5 millions en, modifiant la structure sociale et politique du « Royaume ». Ce fut les années de la poussée du nationalisme socialisant arabe (avec la révolution algérienne) et le nationalisme bourgeois arabe, avec Nasser en Égypte, et la révolution palestinienne couvait. D’autre part, ce sont aussi les années de la guerre froide (la guerre du canal de Suez, l’écrasement des conseils ouvriers hongrois en 1956 par l’Union soviétique, l’écrasement de l’indépendance de la Tchécoslovaquie et de son Parti communiste en 1968.) En 1969, un groupe hétéroclite de l’armée nationaliste, dirigé par un Bédouin, ancien chef des services de renseignements formé par les Britanniques, anticommuniste, le colonel Mouammar Kadhafi, a renversé la monarchie corrompue et peu après a chassé les bases impérialistes. Puis Kadafi a éliminé de son gouvernement l’aile marxisante, qui a dû émigrer, son aile Nasserienne et son aile droite et a pris le pouvoir à part entière à partir de 1977 et c’est maintenu par des purges dans l’armée et des exécutions continues d’Officiers.

Depuis le bombardement de Tripoli en 1986 par l’administration Reagan, rien ne reste de sa première position islamique de la « troisième voie ». Il devient actionnaire de Fiat et Infinvest et de grandes entreprises italiennes, suisses et françaises, c’est une pierre angulaire de l’OTAN dans la région et il a été utilisé par elle comme garantie contre les révoltes populaires toujours latentes. De la tentative de se fédérer avec le Soudan, la Tunisie, l’Algérie , la Mauritanie jusqu’à l’Egypte , il ne reste rien ; mais il a joué avec l’opposition d’intérêts entre l’ENI (Ente Nazionale Idrocarburi) et la compagnie pétrolière italienne AGIP, d’une part, et les Sept Sœurs, dirigé par Shell et Esso, de l’autre, la bataille âpre a été menée principalement en Libye et a couté la vie au fondateur de la société italienne AGIP [ Enrico Mattei ]. Kadafi a été et est un dictateur corrompu et messianique, soutenu par l’impérialisme comme l’un de « nos bâtards » et dans l’Union européenne, Berlusconi littéralement lui baisa la main quand Kadafi arrivait en Italie.

C’est donc gravissime, de confondre Bolivar avec Kadafi – comme fit en son temps Hugo Chavez-, ou de l’appuyer quand il massacre indistinctement des milliers de Libyens, en utilisant pour cela, en plus de ses fidèles dans les forces armées, des mercenaires d’Afrique. Le conflit central n’est pas entre l’OTAN et Kadafi, défenseur supposé de l’indépendance de la Libye et, en réalité, un homme de l’OTAN dans la région. C’est entre la révolution démocratique arabe et des gouvernements corrompus et les agents de l’impérialisme, comme Ben Ali, Moubarak, Kadhafi, Bouteflika et le roi du Maroc. Couvrir ces despotes en crise avec l’autorité de la révolution cubaine, c’est discréditer celle-ci devant le peuple arabe, c’est l’associer avec des dictateurs. L’identification entre les gouvernements et les peuples, l’idée que n’existent pas en eux de divisions de classe et de conflits politiques, mais la fiction d’une unité nationale impossible n’importe où dans le monde et la méthode qui consiste à juger les événements par les déclarations verbales des dirigeants et non pas la contradiction essentielle entre eux et leurs victimes, conduisent inévitablement à des erreurs graves, en se mettant du coté des dictateurs (comme l’a fait, une grande partie de la gauche mondiale et le nationalisme anti-impérialiste avec la sanglante dictature argentine pendant la guerre des Malouines en lui apportant un soutien contre l’Angleterre plutôt que de s’opposer aux deux).

Les effets de la crise capitaliste mondiale et de la perte d’hégémonie des États-Unis ont conduit à une nouvelle flambée de révolution nationale, démocratique et anti-impérialiste des peuples arabes. Sauf le Maroc et l’Egypte, formellement indépendante jusqu’à la Seconde Guerre mondiale, ils ont tous été colonisés. Sa première tentative de libération sous la bannière du nationalisme a connu ses moments les plus importants dans les années 1950 avec la révolution algérienne, l’Irak et l’Autorité palestinienne et dans une moindre mesure, le nassérisme. Nasser a pendu ouvriers communistes en grève en disant « les travailleurs ne demandent pas, c’est nous qui leur donnons » et il a mis au centre de sa politique la construction verticale du pouvoir d’Etat. L’unité de la nation arabe n’a pas pu être atteinte à cause des conflits entre les clans dirigeants nationalistes. Maintenant, cette révolution alors vaincue, revient à nouveau se présenter avec le drapeau de la démocratie, qui est de fait anti-impérialiste et, par conséquent, casse le dispositif de domination du capitalisme mondial. Il est vrai que sur elles, pèsent les intérêts du séparatisme régional, les clans, les sectes religieuses, les secteurs bourgeois modérés opposés au monopole des affaires par des dictateurs et pas seulement les roturiers. Il est vrai que les divers impérialismes ont plusieurs plans d’action en Libye et que à Bengassi et dans toute la Cyrénaïque se trouve l’héritage politique et social jamais payé de la relation avec ce qui reste de la secte des Senoussi, qui est tribale et monarchique. Mais encore une fois, l’essentiel n’est pas cela : c’est la rébellion qui commencé –toujours- avec des formes confuses. Et, comme l’écrit Zibechi, la défense de l’éthique. C’est sur cela qu’il faut parier.

U>La Jornada. Mexico, Février 27 mai 2011.

Traduit de l’espagnol pour El Correo par  : Estelle et Carlos Debiasi

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