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Accueil > Argentine > Économie > Privatisées > Services Publics : eau, électricité, ordures, etc > Enquête sur les « concessions » d’eau potable : Choléra au temps des Barons (…)

20 février 2003

Enquête sur les « concessions » d’eau potable :
Choléra au temps des Barons de l’Eau

 

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Ceci est un travail du Consortium International de Journalistes de Recherche (ICIJ), sur l’affaire de la concession du service d’eau potable. Beaucoup de journalistes sympathisent avec la position des ONGs qui mettent en question les processus concession et privatisation de services publics.

Choléra dans l’époque des Barons de l’Eau

Quand le choléra est apparu dans la Côte des Dauphins d’Afrique du Sud, en août 2000, les fonctionnaires du gouvernement ont supposé initialement qu’il s’agissait seulement d’un de ces bourgeons sporadiques qui pendant longtemps ont frappé la côte orientale du pays. Toutefois, avec l’expansion de l’épidémie, le drame qui en a résulté fut une chronique de décès, annoncée par la cécité d’une idéologie.

En 1998, les administrations locales avaient commencé à poser des jalons pour commercialiser leurs infrastructures d’approvisionnement d’eau, en obligeant les résidents à payer les pleins tarifs pour l’eau potable. Toutefois, beaucoup de ces millions de personnes qui vivaient dans les quartiers modestes de la région ne pouvaient pas payer les tarifs. Quand le service leur a été coupé, elles ont été obligées de chercher de l’eau dans la nature, contaminée par des engrais et déchets humains. En janvier 2002, quand a pris fin la pire épidémie de choléra de l’histoire d’Afrique du Sud, celle-ci avait infecté plus de 250 000 personnes, plus de 300 ont été tuées, et elle s’était étendue jusqu’à Johannesburg, à plus de 480 kilomètres de distance.

Faire que les gens payent le coût total de leur eau potable « a été la cause directe de l’épidémie de choléra », a dit dans une entretien David Mesón, un scientifique social envoyé par le gouvernement pour qu’il fasse des recherches sur l’épidémie. « Il n’existe pas de doute à ce sujet". Les semences de l’épidémie avaient été plantées bien avant que l’Afrique du Sud décide d’entreprendre le chemin mortel de la privatisation. Ils ont été ensemencés avant tout par un groupe agressif d’entreprises de services publics, principalement européennes, qui essayent de privatiser l’eau potable du monde avec l’aide de la Banque Mondiale et d’autres institutions financières internationales. Selon ces entreprises, fini l’époque des verres d’eau gratuits et pour cela ils s’appuient sur une campagne de relations publiques qui soutient leurs arguments de ventes. À l’échelle mondiale, et dans beaucoup de pays en développement, l’eau est un bien fragile, précieux et clairement échangeable. "Les gens qui ne payent pas l’eau ne la traite pas comme la ressource précieuse qu’elle est », a dit un dirigeant.

Une enquête d’une année par le Consortium International de Journalistes D’investigation (ICIJ), projet soutenu par le Centre pour l’Intégrité Publique, a montré que les trois entreprises d’approvisionnement d’eau plus grandes du monde -Suez et Vivendi Environnement françaises et la Thames Water, dont le siège est en Grande-Bretagne mais qui est propriété de RWE AGS de l’Allemagne- se sont développées depuis 1990 dans les régions du monde. Trois autres entreprises, Saur de France et United Utilities de l’Angleterre qui travaillent ensemble avec Bechtel, des Etats-Unis, ont aussi obtenu d’importants contrats internationaux pour l’approvisionnement en eau potable. Toutefois la taille de ces dernières trois n’est rien en comparaison des premières.

L’enquête montre que ces entreprises ont fréquemment travaillé avec la Banque Mondiale, en faisant du lobby sur les gouvernements et les organisations commerciales et les standards mondiaux pour qu’on change les législations et les conventions de commerce de sorte qu’on soit obligé d’aller vers la privatisation de l’infrastructure de production d’eau. Bien que les entreprises privées gèrent seulement près de 5 % des plans d’eau du monde, leur croissance pendant les 12 dernières années a été énorme. En 1990, environ 51 millions de personnes étaient approvisionnés par des entreprises privées. Ce chiffre dépasse les 300 millions de personnes actuellement.

L’enquête de l’ICU, qui a suivi les opérations des entreprises d’eau les plus actives au niveau mondial pendant 12 ans, a montré que pour 2002 elles géraient les réseaux de distribution d’eau dans rien de moins que dans 56 pays et deux territoires. En 1990 elles étaient actives dans seulement une douzaine de pays.

La croissance de recettes a progressé de façon égale avec l’expansion des entreprises, comme l’ont montrés les rapports annuels analysés par ICU. Vivendi Universel, la filiale de Vivendi Environnement, a enregistré en 1990 des revenus supérieurs aux 5 000 millions de dollars en relation avec l’eau et pour 2002 la même activité avait dépassé les 12000 millions. RWE, qui est rentré dans le marché de l’eau en acquérant à Thames Water en Grande-Bretagne, a augmenté ses recettes en relation à l’eau de 9,786 %, en passant de 25 millions en 1990 à 2500 millions de dollars durant l’année fiscale 2002. Cet explosif taux de croissance a généré de l’inquiétude sur le fait qu’une poignée d’entreprises privées puisse bientôt arriver à contrôler une substantielle portion de la ressource la plus vitale aux monde.

Tandis que les entreprises décrivent l’expansion du secteur privé comme une réponse naturelle à la croissante crise de pénurie d’eau, les observateurs réfléchis indiquent les pièges qu’entraîne cette analyse trop convenue.

 « Nous devons être extrêmement vigilants en n’imposant pas les lois de marché à l’eau, parce qu’il y a beaucoup de décisions critiques en rapport avec le gestion de l’eau -il y a des décisions environnementales, des décisions socioculturelles », dit David Boys de Public Services International, avec siège au Royaume-Uni.

 « Si on mercantilise l’eau, en la soumettant au contrôle du marché, et qu’on laisse de côté tout préoccupation autre que le profit, on perd complètement la capacité de la contrôler ».

Jusqu’à présent la privatisation s’est concentrée sur les pays les plus pauvres, où la Banque Mondiale a utilisé son pouvoir financier pour obliger les gouvernements à privatiser ses entreprises d’eau en échange de prêts.

En Afrique, l’examen des registres d’entreprises d’eau pratiqué par ICIJ a montré qu’elles se sont développées dans plus de 10 pays en partant de seulement de trois en 1990 et qu’elles sont aussi actives dans au moins 10 pays asiatiques, huit latinoaméricains, trois américains, deux des Caraïbes davantage de Port Riche, trois dans Moyen Orient plus la Bande de Gaza, en Australie/Nouvelle Zélande et dans 18 pays européens avec la plus grande expansion en Europe Orientale. Là la Banque Européenne de Reconstruction et Promotion a joué un rôle décisif en stimulant des pays à privatiser en échange de prêts.

Etant fermement établi en Europe, en Afrique, en Amérique latine et en Asie, les entreprises d’eau se sont développées sur le marché beaucoup plus lucratif des Etats-Unis.

Au cours des années récentes, les trois plus grandes entreprises européennes se sont lancées à l’achat des grandes compagnies d’eau des Etats-Unis, y compris US Filter et American Water Works CO Inc. Peter Spillet, dirigeant de haut rang de l’Unité Thames d’eau de RWE, a dit à ICIJ que son entreprise estime que dans 10 ans elle doublera son marché à 150 millions de clients principalement à travers son développement aux Etats-Unis. Jusqu’à présent les Européens ont privatisé les réseaux dans plusieurs villes moyennes des Etats-Unis, y compris à Indianapolis et à Camden, dans New Jersey, et essayent de s’assurer des contrats à la Nouvelle Orléans. Leur expansion a été freinée, cependant, à Atlanta, ville qui a annulé son contrat de 20 années - le plus grand de ce type aux Etats-Unis -avec une filiale de Suez au bout seulement de quatre ans et elle a rendu la gestion à l’entreprise publique de la ville.

Les entreprises d’eau ont aussi augmenté dramatiquement leur campagne de lobby et de dépenses dans les élections fédérales. À Washington elles ont déjà obtenu des modifications en leur faveur aux lois fiscales et elles essayent maintenant de persuader le Congrès pour qu’il approuve des lois qui obligeraient les gouvernements municipaux qui ont des problèmes financiers à considérer la privatisation de leurs réseaux de distribution d’eau en échange des donations et de prêts fédéraux. Des études du gouvernement et du secteur ont estimé que les villes américaines auront besoin entre 150 000 millions et 1 000 000 millions de dollars dans les prochaines trois décennies pour améliorer et étendre leurs réseaux vétustes.

L’enquête, qui s’est focalisée sur les activités de ces compagnies en Afrique du Sud, en Australie, Colombie, Asie, Europe, Etats-Unis et Canada, a montré que tandis que ces entreprises s’affirment « compatissantes, considérées et sûres », comme le dit une d’elles, elles peuvent s’avérer de cruels joueurs sans pitié sur le marché, qu’elles pressent constamment pour des hausses des tarifs, négligent fréquemment leurs engagements et abandonnent un réseau de distribution d’eau s’il ne leur rapporte pas suffisamment d’argent.

Comme dans le cas d’Afrique du Sud, les entreprises de distribution d’eau sont des piliers d’une politique centrée le paiement par l’usager, qui impose des tarifs importants sans s’attarder sur la capacité de paiement des gens. Ces tarifs sont imposés au moyen de coupes du service qui sont effectuées malgré les dangers sérieux qu’elles entraînent pour la santé des gens. Ces entreprises sont derrière un business dont les recettes annuelles potentielles prévues sont entre 400 000 million et 3 000 000 millions de dollars, selon comment on fait les comptes. L’eau est fondamentale pour la vie et, si cela devient obligé, les gens payeront ce qui il faut pour l’obtenir.

Au niveau mondial, la recherche d’ICIJ a montré que l’expansion énorme de ces entreprises n’a pas été possible sans l’aide de la Banque Mondiale et d’autres institutions financières internationales, comme le Fonds Monétaire International, la Banque Interaméricaine de Développement, la Banque Asiatique de Promotion et la Banque Européenne de Reconstruction.

Dans des pays comme Afrique du Sud, l’Argentine, les Philippines et l’Indonésie, la Banque Mondiale a conseillé aux responsables de ces Etats de"commercialisent" les entreprises de services publics comme étant partie d’une politique générale de financement pour la privatisation et de l’économie de libre marché. En Afrique du Sud, des fortes pressions des entreprises multinationales comme Suez, avec des recommandations de la Banque Mondiale, ont contribué à persuader les administrateurs locaux pour qu’ils privatisent leurs réseaux. Quelques Communautés ont commencé à transformer leurs entreprises de service public en entreprises commerciales comme préalable à leur privatisation totale. D’autres ont immédiatement choisi un contrat d’approvisionnement privé d’eau. Pressés par la Banque Mondiale pour qu’ils introduisent une "menace crédible de coupure des services", les responsables locaux ont commencé à couper l’eau aux personnes qui ne pouvaient pas payer. On estime que 10 millions de personnes ont souffert des coupes d’eau pendant les différentes périodes depuis 1998. Le résultat a été le choléra et d’autres épidémies de maladies gastro-intestinales.

En Colombie, Carthagène a été la première à donner en concession son service de fourniture d’eau et des services sanitaires à une entreprise privée. Elle a été suivi par Barranquilla, et ensuite des villes plus petites comme Santa Marta, Palmira, Tunja, Cartago et Montería. Toutes ces villes ont signé des contrats de concession avec des entreprises administrées par des compagnies multinationales. A la suite quelque 50 villes et petites villes ont signé des contrats avec des entreprises privées nationales. La Banque Mondiale a soutenu la vente de l’entreprise publique d’eau vers fin 1994. La banque a non seulement fourni les ressources mais aussi les a aidé à structurer l’affaire avec les multinationale Aguas de Barcelone, une filiale dans laquelle le géant français Suez détient des actions. Ils ont gagné un contrat pour 20 années et ont pris une participation de 44.81 % dans une nouvelle entreprise de réseau d’eau et des égouts de Carthagène appelée Acuacar. Cette entreprise, qui a commencé avec seulement un apport de 2.4 millions de dollars de capital de la société espagnole et une autre partie du Secteur de Carthagène, avait en six ans déjà récupérés tout son investissement. L’entreprise a amélioré de manière dramatique le développement de la couverture du service d’eau potable et la fiabilité du service.

L’effort de privatisation de Carthagène a tôt été, toutefois, entaché d’accusations d’irrégularités dans l’embauche et de manque de transparence. La polémique a aussi touché à la Banque Mondiale, qui a été un des principaux financiers des diverses expansions du service à Carthagène durant les dernières années, avec des crédits atteignant 85 millions de dollars. Les plaintes sont l’objet d’une enquête tant du Ministère public que du Département d’Intégrité Institutionnelle de la même Banque Mondiale. La capitale colombien, Bogota, par contre, a décidé de prendre un chemin différent. Contre les Conseils de la Banque Mondiale, les maires Enrique Peñalosa et Antanas Mockus ont décidé que mieux servir l’intérêt public supposait de renforcer l’Entreprise en fourniture eau et services sanitaires de Bogota (Eaab) au lieu de la privatiser.

En 2002 Planifications Nationales a classé l’Eaab comme le meilleur fournisseur de service d’eau et des égouts du pays. Sa note de 78.37 a été la plus haute entre 148 entreprises du même type en Colombie. La deuxième a été EPM de Medellín, autre entreprise publique, une petite entreprise privée en Girardota a été la troisième et la quatrième est restée l’Acuacar. L’Eaab à Bogota est un exemple de comment une entreprise de services mal en point s’est redressée. En 1993, quand elle était techniquement en faillite, elle couvrait seulement de 78 % de la population pour l’eau p% les égouts. En seulement huit années, malgré la migration massive à cause de la violence, Bogota a réduit de 75 % le nombre de maisons sans eau potable et de plus de la moitié celles qui manquaient d’égouts, selon le rapport annuel de l’Eaab.

L’Eaab a eu du succès malgré la pression continue de privatiser faite par la Banque Mondiale. Dans une réunion en août 1998 entre des fonctionnaires de l’administration Peñalosa et fonctionnaires de la Banque Mondiale à Washington, ces derniers ont insisté sur le fait que la politique de la banque pour approuver de nouveaux crédits supposait d’arrêter les subventions et de privatiser parce que les entreprises privées étaient plus efficaces et apportaient du capital frais que les gouvernements n’avaient pas. La position de Bogota, dans une forte discussion, a été qu’il était important de maintenir le contrôle officiel de l’entreprise pour pouvoir s’occuper des besoins des plus pauvres et de conserver les rênes de la croissance de la ville. l’Eaab a choisi de ne pas solliciter de crédits à la banque, depuis 1996, date à laquelle elle a signé le dernier. (La note complète sur le cas de l’Eaab peut être consultée en Anglais en www.icij.org ).

La préoccupation du monde pour l’eau

Environ 1100 millions de personnes n’ont pas accès à eau potable.

Environ 2400 millions de personnes n’ont pas accès à des services d’égouts. La majorité se trouvent en Afrique et en Asie. Approximativement un tiers de la population mondiale vit dans des pays avec une pression entre modérée et haute par insuffisance d’eau. La pression par insuffisance d’eau se produit quand la consommation d’eau dépasse 10 % des ressources d’eau renouvelables. L’Asie occidentale fait face à la menace la plus grave. Plus de 90 % de sa population vit dans des conditions de pression sévère par insuffisance d’eau.

Environ 80 pays, qui comprennent approximativement 40 % de la population mondiale, ont éprouvé de sérieuses pénuries d’eau vers le milieu des années 90.
Dans moins de 25 ans, les deux tiers de la population mondiale vivront dans des conditions de pression par insuffisance d’eau. Pour 2020, on estime que l’utilisation de l’eau augmentera dans le monde dans 40 %.
Deux milliards de personnes (près du tiers de la population mondiale) dépendent des eaux souterraines. Des pays du monde entier font face à une réduction rapide de leurs ressources d’eaux souterraines, y compris des parties de l’Inde, la Chine, l’Asie Occidentale, la Péninsule Arabe, l’ancienne Union Soviétique et l’ouest des Etats-Unis.

Le coût pour offrir aux pauvres un accès universel à l’eau pour 2015 est estimé 30.000 millions de dollars annuels, selon Programme Environnemental de Nations Unies, Geo-Global Environment Outlook 3, Past, Present and Future Perspectives.

Environ 1500 millions de personnes n’ont pas accès à eau potable et courent des risques à cause de cela. Des Nations Unies prédisent qu’en 2025 deux tiers de la population mondiale subira un manque d’eau propre. Les experts affirment que des ressources financières énormes devront être dépensées pour suppléer ces besoins.

Les administrateurs de fonds financiers prennent note de l’expansion du marché de l’eau. La seconde banque la plus ancienne que la Suisse, le Pictet Bank, a lancé l’an passé son Fonds Global d’Eau aux Etats-Unis après en avoir lancé un semblable en Europe deux ans auparavant. Il propose un »panier « d’entreprises d’eau et prévoit que pour 2015, 75 % des réseaux européens et 65 % des réseaux américains seront privatisés. Selon les termes du dirigeant de Thames, Peter Spillett : « Avec un marché de croissance tellement sûr, il existe un potentiel énorme d’expansion ».
Il a noté que « les actions des entreprises d’eau se sont mieux comportées que celles d’autres services publics » du fait des contrats à long terme qui durent entre 10 et 30 ans, en offrant un rendement sûr et prédictible sur l’investissement. « C’est pourquoi une quantité de fonds de pensions ainsi que d’investisseurs privés sont disposée à investir de l’argent en ces derniers ».

Suez a dit à ICIJ qu’il a distribué des directives pour que ses entreprises soient rentables dans un délai de trois ans et que son taux de retour sur investissement doit être d’au moins 3 % sur le coût du capital.

Toutefois, les entreprises privées se heurtent à une forte opposition étant donné le caractère vital de l’eau et de la politique qui l’entoure. L’exemple le plus célèbre est la privatisation en Cochabamba en Bolivie. Aguas del Tunari, un consortium de propriété conjointe de Bechtel et United Utilities, y a assumé le contrôle du réseau de la ville en 1999 sans que soit négocié aucun appel d’offres, l’entreprise a annoncé des augmentations des tarifs jusqu’à 150 %. Le directeur Geoffrey Maladroit a menacé de couper l’eau aux gens s’ils ne payaient pas.

Le leader Oscar Olivera

Le contrat accordait à l’entreprise le contrôle des eaux souterraines et lui permettait de clôturer les puits privés des gens à moins qu’ils ne payent pour l’eau à Aguas del Tunari. Le leader syndical Oscar Olivera explique : « Ils voulaient privatiser la pluie ». Quand ont explosé des protestations dans toute la ville de 450000 habitants en 2000, la police et l’armée ont été appelées. Elles ont tué deux personnes.

Le gouvernement a réagi en annulant la concession. Aguas del Tunari exige du gouvernement bolivien, en alléguant des pertes, 25 millions de dollars, bien que Bechtel ait dit qu’il n’a pas chiffré cette demande. La demande se trouve devant le Centre international pour l’arbitrage des conflits sur les investissements, une organisation du Groupe de la Banque Mondiale.

C’est sur la recommandation de la Banque Mondiale que la Bolivie a commencé à privatiser ses services de distribution d’eau vers le milieu des années 90. Les discussions à propos de l’eau de Cochabamba ont commencé en 1995, comme l’a informé à ICIJ Christopher Neal, le fonctionnaire d’affaires externes de la Banque Mondiale pour l’Amérique Latine. « Le gouvernement bolivien a été d’accord, d’un point de vue politique, avec le point de vue de la banque qu’on avait besoin de privatiser », a dit Neal. Toutefois, en accord avec Méname Libhaber, le principal ingénieur de la banque en matière d’eaux pour l’Amérique Latine, la banque s’est opposé à l’affaire de Cochabamba avec Aguas del Tunari parce qu’elle considérait qu’elle n’était pas viable financièrement.

Dans un entretien avec ICIJ le porte-parole de Bechtel, Jeff Berger, a accusé le gouvernement bolivien de la débâcle de Cochabamba. Il a affirmé que le gouvernement avait failli en n’ayant pas expliqué à la population les bénéfices de la privatisation au moyen de tracs et d’annonces dans les journaux.

Les hommes du libre marché

Bien que Neal ait dit à l’ICIJ que "la banque n’assume pas de positions idéologiques" sur la privatisation, l’enquête a montré que la privatisation est une caractéristique centrale de beaucoup de ses projets de prêts.

En accordant des prêts pour environ 20000 millions de dollars pour des projets d’approvisionnement d’eau pendant les 12 dernières années, la Banque Mondiale a non seulement été une des principales sources de financement de la privatisation, mais aussi elle a conditionné de plus en plus ses prêts à la privatisation des réseaux de distribution des gouvernements locaux.

L’étude effectuée par l’ICIJ sur 276 prêts pour l’approvisionnement d’eau accordés par la Banque Mondiale entre 1990 et 2002, a montré que 30 % d’entre eux était conditionné à la privatisation. La majorité d’entre eux a été accordée pendant les dernières cinq années.

Dans d’importantes privatisations menées à bien dans le monde -comme celles Buenos Aires, Manille et Djakarta- l’enquête de l’ICIJ a montré que la Banque Mondiale a utilisé sa forteresse financière pour persuader les gouvernements de faire des appels d’offre pour des services fourniture d’eau et des services sanitaires, à long terme en faveur de grandes entreprises privées.

L’enquête a aussi montré que la banque a suggéré aux pays comment privatiser leurs réseaux et fréquemment elle a aidé à financer le processus de privatisation. Dans le cas de Buenos Aires, la Banque Mondiale a non seulement aidé à financer la privatisation mais aussi elle a pris, à travers une de ses filiales, une participation de 7% dans la nouvelle entreprise, Aguas Argentinas, qui est contrôlée par Suez.

La Banque Mondiale a délégué un de ses propres directeurs de haut rang pour qu’il négocie de fortes augmentations de tarifs de distribution d’eau avec le gouvernement argentin. Ce directeur a ensuite dirigé une structure de la Banque Mondiale qui a accordé un prêt de 30 millions de dollars à l’Argentine. Ceci s’est produit en même temps que Aguas Argentinas et ses actionnaires faisaient des profits gigantesques de l’ordre de 25 %. Un actionnaire, un important homme d’affaires argentin, a obtenu des avantages de 100 millions de dollars avec cette privatisation.

La banque affirme que sa politique de privatisation allège la pauvreté en générant une efficience administrative et apporte des capitaux privés à des pays en développement dont les entreprises publiques d’eau qui ont besoin de ressources financières, sont habituellement mal organisées.

La banque fait valoir que les entreprises privées réussissent à améliorer les choses en évitant les obstacles bureaucratiques habituels et le clientélisme politique et la corruption qui corrodent tant d’entreprises de services publics dans des pays pauvres. Bien qu’il soit clair qu’on a obtenu des améliorations considérables dans de nombreuses entreprises à la suite de la privatisation, dans beaucoup de cas, les entreprises privées apportent très peu de capitaux propres, en utilisant principalement des prêts de la Banque Mondiale et des institutions internationales en rapport avec elle pour aider à couvrir les coûts de réparation et d’expansion des réseaux.

Il y a aussi des preuves que si la Banque Mondiale consacrait la même énergie et les mêmes ressources à améliorer les réseaux locaux en laissant leur contrôle dans des mains publiques, les entreprises publiques locales auraient un meilleur résultat que les privées.

Une oligarchie mondiale

L’enquête a aussi montré que les entreprises fournisseur d’eau et de services sanitaires ont conjugué leurs forces avec la Banque Mondiale et avec les Nations Unies pour créer un réseau de bureaux de consultants internationaux, de commissions consultatives et de forums qui ont dominé le débat sur l’eau et qui ont établi la privatisation comme la principale solution aux problèmes mondiaux de l’eau.

« Nous avons assisté dans les 90 à l’installation d’une espèce de haut commando mondial pour l’eau », a écrit en 2000 dans le journal Le Monde, Ricardo Petrella, un important investigateur sur la politique de l’eau.

Objectifs globaux pour l’accès à l’eau

Le Conseil de la collaboration sur la fourniture d’eau et de services sanitaires a présenté les objectifs suivants au niveau mondial, appelées Vision 21, pendant le Second forum mondial sur l’eau réuni aux Pays-Bas en mars 2000, dans le but de résoudre les problèmes de fourniture d’eau et de service d’égouts face au monde en développement.

Pour 2015, le Conseil a proposé :

** Réduire à la moitié le nombre de personnes qui n’ont pas accès à des installations sanitaires.
** Réduire à la moitié le nombre de personnes sans accès à des quantités adéquates d’eau potable et à un coût payable.

Et pour 2025 :

** Fournir de l’eau et des services sanitaires et d’hygiène pour tous. Le Conseil Mondial de l’Eau (CMA) est le principal organisme d’études sur la question d’eau et le principal conseiller de la Banque Mondiale et des Nations Unies. Il a été fondé en 1996 par la Banque Mondiale et les Nations Unies. A son siège principal à Marseille, la France, et un de ses trois membres fondateurs est René Coulomb, un ancien directeur de Suez Lyonnaise.

En 1998 le CMA a créé la Commission Mondiale de l’Eau pour promouvoir la conscience publique sur les problèmes de l’eau et pour soutenir l’élaboration de politiques mondiales sur l’eau. La Commission organise des réunions sur l’eau partout dans le monde et canalise ses déclarations de politique par le biais de forums internationaux qui se réunissent tous les trois ans.

La Commission est dirigée par des hommes avec de solides précédents favorables à la privatisation. Entre eux se trouve l’ancien CEO de Suez, Jérôme Monod, le président de la Banque Interaméricaine de Développement, Enrique Iglesias, et le CEO de l’Organisme pour l’Environnement Global de Banque Mondiale /, Mohamed T. El-Ashry. Le président de la Commission est le vice-président de la Banque Mondiale Ismael Serageldin. Les deux institutions soutiennent fortement la privatisation et la politique « utilisateur payeur ». « L’expérience mondiale montre que l’argent est le moyen de produire la responsabilité et le contrôle », a dit la Commission dans un rapport de 2000.

La Commission a organisé deux forums internationaux sur l’eau et un troisième a eu lieu en Kyoto, Japon, en mars de 2003. Au forum de la Haye, en 2000, la Commission a émis une déclaration dans laquelle elle disait que la gestion de l’eau était le principal problème auquel faisait face l’humanité et que la solution consistait à traiter l’eau comme tout autre marchandise et à ouvrir gestion à la libre concurrence du marché.

Serageldin a déclaré que l’approvisionnement d’eau devrait être en possession privée ; mais que les normes qui le régleraient devaient être publiques, de la même manière que les entreprises privées gèrent le secteur alimentaire. Les liens qui unissent la Banque Mondiale aux principales entreprises de l’eau incluent des positions partagées dans les assemblées dirigeantes de plusieurs institutionsgénératricesde politiques, ainsi que des relations personnelles et d’affaires.

Monoda été consultant spécialdu directeur du Fonds Monétaire International, Michel Camdessus, à la même époque où il a été CEO de Suez. Après la retraite de Camdessus en 2000, a été nommé président du Panel International pour de Nouveaux Investissements en Eau, un organisme organisé par les entreprises fournisseur d’eau et de services sanitaires. Parmi les directeurs de ce panel on trouve William Alexander, exécutif en chef du groupe de Thames Water de Londres, appartenant RWE et Gérard Payen le vice-président de Suez.

Dans sa première réunion à Paris en février 2002, le groupe s’est concentré sur « comment augmenter le taux de retour sur les projets d’eau et la difficulté en rapport de percevoir effectivement le prix du coût total de récupération de l’investissement en eau ».

Un autre membre du panel est l’Association Globale de l’Eau (AGA). La présidente de ce comité est Margaret Catley-Carlson, ex vice-ministre canadien de santé. Elle est aussi présidente du Comité consultatif sur les ressources en eau de Suez. L’AGA est une association de gouvernements, et d’organisations patronales et professionnelles qui examine des sujets de l’eau.

L’AGA affirme que : « La crise de l’eau est une crise gouvernementale, caractérisée par manque d’une évaluation correcte de la ressource eau et par un manque de transparence et de définition de responsabilités dans sa gestion. On espère que la réforme du secteur de l’eau, dans lequel les tarifs et prix jouent un rôle essentiel permette que les investisseurs reconnaissent le véritable coût de l’eau et agissent en conséquence ».

Par ailleurs, les entreprises de production et la distribution d’eau travaillent en collaboration étroite avec l’Union Européenne pour élever des barrières commerciales contre tout pays qui refuse d’ouvrir ses réseaux à la privatisation.

En travaillant avec les fonctionnaires du commerce de l’UE, les entreprises de l’eau essayent aussi de persuader l’Organisation Mondiale du Commerce pour qu’elle oblige les pays à ouvrir leurs entreprises d’eaux aux forces libres du marché. Des documents obtenus par ICIJ montrent que le bureau de commerce de la Commission Européenne travaille en association étroite avec Thames, Suez, Vivendi et autres entreprises d’eau privées pour faire pression pour une réduction des barrières dans l’OMC.

Par une lettre de mai 2002, le commissaire de commerce de l’UE, Ulrike Hauer, a écrit à Thames, à Suez et Vivendi, en les remerciant pour leur contribution dans les négociations pour réduire les barrières commerciales « aux services de fourniture d’eau potable et d’élimination d’eaux sales » en vue d’ouvrir ces marchés aux entreprises européennes.

Sur un troisième front, le gouvernement français a récemment fait une proposition à l’Organisation Internationale de Standards (ISO), qui est pratiquement gouvernementale -il s’agit d’un auxiliaire de l’Organisation Mondiale du Commerce- pour qu’elle établisse les normes internationales aux entreprises d’eau. Effectivement le comité va développer des normes sur comment gérer tous les aspects du service et de la livraison d’eau. Les critiques considèrent que cela contribuera à ce que l’OMC invente des normes commerciales qui s’appliquent aux pays qui ouvrent leurs entreprises publiques à la privatisation.

« Les entreprises ont une stratégie très claire basée trois éléments : l’OMC (WTO), la Wipo (World Intellectuel Property Org. -Organisation Mondiale pour la Propriété Intellectuelle) et l’ISO", a dit Petrella à l’ICIJ. "À travers le commerce, la propriété intellectuelle et la standardisation, elles vont conquérir le monde de l’eau ».

Titans financiers, corruption et fraude

Outre leurs contacts politiques, chacune des principales entreprises possède des ressources financières gigantesques. Toutes figurent parmi les 100 plus grandes entreprises du monde. Dans l’ensemble, elles ont obtenu en 2001 156.700 millions de dollars de recettes et continuent à croître à un taux de 10 % annuel, en dépassant le poids de certaines des économies des pays où elles opèrent. Le Produit Interne Brut de la Bolivie, par exemple, est de 21400 millions de dollars.

Ces entreprises comptent aussi davantage d’employés que la majorité des gouvernements. La seule Vivendi Environnement emploie 239 000 personnes partout dans le monde et Suez 173 000.

Tant Suez que Vivendi ont doublé leur base de clients au cours des dernières 10 années. Suez couvre 125 millions d’utilisateurs eau et de Vivendi 110 millions. La Thames Water de RWE vient loin en troisième place avec 51 millions ; mais sa récente acquisition d’American Water Works CO Inc, fait passer ce chiffre à 70 millions.

En France tant Suez comme Vivendi ont des liens politiques étroits avec les gouvernements tant au niveau local que national.

Les dirigeants des deux entreprises ont été accusés et, dans quelques cas, condamnés pour des contributions illégales à des campagnes politiques et pour utiliser la corruption et la fraude pour obtenir des contrats municipaux pour l’approvisionnement d’eau et d’autres services. Il y a eu des témoins qui ont impliqué l’ex CEO de Suez Monod qui est actuellement conseillé principal du président français Jacques Chirac. Monod n’a été jamais accusé et a nié tout comportement incorrect.

Bien qu’elles soient concurrentes, les entreprises forment fréquemment des associations d’investissement pour obtenir des concessions d’eau dans des pays étrangers. L’enquête d’ICIJ, par exemple, a révélé que Thames et Vivendi ont formé une alliance d’affaires en 1995 pour investir le marché asiatique. Suez et Vivendi partagent des intérêts à Buenos Aires. Thames et Suez, avec l’appui de la dernière dictature d’Indonésie, se sont réparties Djakarta.

Finalement, les entreprises de l’eau privées font des promesses qu’elles ne peuvent pas accomplir - une tactique appelée de « surenchères » - par un fonctionnaire de la Banque Mondiale. Ils promettent essentiellement d’offrir un meilleur service à un prix plus petit. L’enquête de l’ICIJ a trouvé, toutefois, que les gouvernements fréquemment augmentent les prix de l’eau juste avant la privatisation pour offrir aux entreprises privées une marge suffisante pour effectuer une réduction et gagner ainsi l’approbation populaire.

Une fois que la compagnie gagnante obtient le contrat et réduit initialement les prix, elle ne tarde pas à en renégocier les tarifs pour les augmenter et réduire les objectifs d’exercice. Le fait de contrôler déjà le système d’eaux des villes donne aux entreprises un énorme pouvoir de négociation en l’occurrence. Dans beaucoup cas, les prix de l’eau explosent et les objectifs initiaux d’expansion des services d’eau potable et d’égouts ne sont pas remplis.

Par exemple, à Buenos Aires, Aguas Argentines - entreprise contrôlée par Suez - a fait pression presque immédiatement sur le gouvernement pour qu’il renégocie le contrat de concession pour obtenir des termes plus favorables.

Expansionnistes globaux

Ayant établi des avancées dans six continents, les trois grandes entreprises de l’eau disent qu’elles sont disposées maintenant à concentrer la plupart de leurs efforts sur des marchés potentiellement lucratifs de l’Amérique du Nord, la Chine et de l’Europe Orientale. Les trois ont dit à ICIJ qu’elles espèrent augmenter de plus du double leurs recettes et leurs bases de clients au cours des prochaines 10 années.

Spillet, de Thames, a dit que la Chine est ouverte parce que la Banque Mondiale est prête à investir là bas, ce qui la rend plus attrayants pour les entreprises privées.

La Chine est quelque chose comme un géant endormi parce que pour les gens de la Banque Mondiale elle a toujours eu des difficultés en matière financière. Ils ont essayé récemment de clarifier un peu plus cet aspect.

Quelques pays sont définitivement sortis de l’agenda de privatisation. Yves Picard, directeur de Vivendi en Afrique du Sud, a dit que son entreprise ne souhaite pas obtenir de concessions dans le sud de l’Afrique, à moins que la Banque Mondiale ou d’autres institutions ne financent les coûts. D’une autre manière, il a dit, il n’y a pas rentabilité pour l’entreprise, parce que les gens sont trop pauvres pour payer les tarifs importants que les entreprises privées fixent pour couvrir leurs coûts en capital.

La dépendance de la Banque Mondiale paraît aller en s’accroissant. Il existe une préoccupation croissante parmi les entreprises que les marchés de capitaux ne leur sont pas ouverts dans la mesure où l’eau s’avère être un sujet politique tellement crucial que volatil, et parce que nombre de pays pauvres ont des monnaies très instables.

Dans une présentation devant la Banque Mondiale sur le lien du secteur privé à l’activité de l’eau, effectuée en février 2002, J.F. Talbot, président et CEO de Saur, la troisième entreprise d’eau en France, a signalé que sans une augmentation de la part dans le financement des institutions comme la Banque Mondiale, les grandes entreprises internationales de l’eau « resteront a la maison ».

Une bonne partie de leurs plans d’expansion dépendent finalement du fait que les gens acceptent l’idée que l’eau est une marchandise. Autrement dit, terminés les verres d’eau gratuits. Tout le monde doit payer pour l’eau, tel est le principal message émis par le Conseil Mondial de l’Eau et ses organisations affiliées. Le fait que les personnes s’habituent chaque fois davantage à acheter de l’eau mise en bouteilles peut s’avérer stimulant pour les grandes entreprises marchandes d’eau.

Toutefois, préoccupées par les répercussions que peut avoir la privatisation, comme celles de Cochabamba, les entreprises commencent à mettre en avant une terminologie moins mercantiliste. Après tout, quelque chose qui distingue l’eau est que, tout comme l’air, elle est irremplaçable. Il n’existe pas d’alternatives qui permettent aux consommateurs de rejeter le service s’il ne leur convient pas. Comment quelqu’un peut marchander quelque chose qui est à la fois vital et qui ne comporte pas d’alternatives ? Comme le savent bien les victimes du choléra en Afrique du Sud, rien peut remplacer l’eau propre.

« Tous ceux qui ont pensé que l’eau était une marchandise ont perdu, a dit à ICIJ Olivier Barbaroux directeur chez Vivendi. Nous ne vendons pas de l’eau. On prend l’eau et ensuite on la restitue, précisément dans la même quantité. Ce que nous faisons est apporter l’eau à votre maison, en la nettoyant pour que vous puissiez ensuite l’utiliser et en la ramenant de retour, pour la nettoyer, à la nature. Voilà le service que nous rendons ».

Payen, de Suez, a déclaré sèchement : « L’eau n’est pas une marchandise. C’est un bien public. C’est aussi un bien social. Il est essentiel pour la vie ». Alors, Qu’est-ce que vend Suez ? « Nous fournissons l’essentiel pour la vie ». Thames se maintient, toutefois, dans une optique de marchandise. « L’eau est à la fois une marchandise et un service (public) », a dit Spillett. Il a ensuite comparé le commerce de l’eau avec une brasserie.

« Il est clair que les gens ne comprennent pas la valeur de l’eau et attendent que celle-ci tombe du ciel et ne coûte rien. Mais si nous utilisons une analogie avec la bière -qui est à 90 % eau- nous voyons que les brasseries ont ajouté leurs ferments et leur Malte, et que la boisson a parcouru tout un processus assez coûteux et que le produit final contient beaucoup de valeur ajoutée et que les gens sont disposés à payer beaucoup d’argent pour elle. En un certain sens, purifier l’eau à partir de son état brut, la traiter ensuite et la porter aux gens pour être ensuite recycler avec les déchets constitue presque le même produit industriel. Vous produisez là beaucoup de valeur ajoutée et si les gens ne se rendent pas compte de cette valeur et ne payent pas par elle, ils ne la traiteront pas comme la ressource précieuse que, de fait, elle est ».

Les entreprises affirment aussi qu’elles ne privatisent pas réellement l’eau ; mais, plutôt, qu’elles administrent des plans en association avec des gouvernements. Elles appellent ces associations, des Associations Publiques- Privées ou d’Economie Mixte (Public Private Partnerships o PPP). Toutefois, pour les critiques de la privatisation, la question essentielle n’est pas l’eau elle même ; mais l’accès. Et la clef de l’accès est le contrôle, c’est à dire, celui qui possède la clef dans sa main.

VO : Cholera and the Age of the Water Barons

Traduction de l’espagnol pour El Correo de : Estelle et Carlos Debiasi.

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Semana->http://www.semana.com/archivo/articulosView.jsp?id=68191] . Bogotá, Colombie. 18 février 2003.

<U>El Correo. Paris, fevrière 2003

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