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Le président brésilien Luiz Inácio Lula da Silva est revenu lundi après son cinquième voyage en Afrique, alors que la controverse sur les quotas pour les étudiants noirs et indigènes dans les universités publiques du Brésil continue de faire rage.
Por Mario Osava
IPS. Brésil, 15 février 2006
Les liens plus étroits qui sont en train d’être noués entre le Brésil et le continent africain constituent un développement positif, tant en termes de politique étrangère que de ses effets sur la lutte contre la discrimination subie par des Brésiliens noirs, a déclaré à IPS, Geraldo Rocha, directeur du Centre pour la mobilisation des populations marginalisées (CEAP).
Le président Lula ’’a ouvert une nouvelle ère dans les relations du Brésil avec l’Afrique’’, contribuant ainsi au renforcement de l’identité brésilienne, qui est fortement influencée par la population noire du pays, a souligné Rocha. ’’C’était plus que nécessaire de rétablir ces relations, qui étaient précédemment ignorées par les gouvernements brésiliens’’, a-t-il indiqué.
Lula a visité l’Algérie, le Bénin et le Botswana, de mercredi à samedi, avant de prendre part au Sommet sur la gouvernance progressiste à Pretoria, la capitale de l’Afrique du sud, pendant le week-end. Il avait déjà été dans 17 pays en Afrique pendant quatre voyages différents depuis qu’il a pris fonction en janvier 2003.
Le Brésil ne va plus négliger l’Afrique, a déclaré Lula à Gaborone, la capitale du Botswana, où il a offert une aide brésilienne pour lutter contre l’épidémie du VIH/SIDA qui affecte 30 pour cent de la population, qui est de 1,8 million d’habitants. Dans cette nation d’Afrique australe, le président a parlé de la ’’dette’’ du Brésil envers les Africains qui ont aidé à donner naissance à ’’l’un des peuples les plus joyeux et les plus magnifiques sur la terre’’.
Les liens historiques et culturels du Brésil avec l’Afrique avaient déjà été mis en exergue au Bénin. Dans cette nation ouest-africaine, Lula a visité la ’’Porte du non-retour’’, où les esclaves étaient embarqués, mais par laquelle certains sont revenus, après que le Brésil - le géant de l’Amérique latine - a aboli l’esclavage en 1888. Le président a rencontré également les descendants de l’une des familles qui sont revenues, et dont le nom de famille est également Silva. Par ailleurs, il a pris part à une cérémonie locale du vodoun.
Son périple a débuté en Algérie, le seul pays sur son itinéraire où le Brésil a des intérêts économiques. La visite a été d’une importance capitale en raison de la nécessité de réduire le déficit commercial de près de 2,5 milliards de dollars vis-à-vis de ce pays d’Afrique du nord, a souligné Lula dans un résumé de son voyage au cours de son programme radiodiffusé hebdomadaire, lundi.
L’Algérie est le plus grand fournisseur étranger de pétrole du Brésil. Pour parvenir à un commerce plus équilibré avec ce pays, l’administration Lula cherche à accroître des exportations de produits alimentaires, en particulier le bœuf, et de biens industriels.
Parmi ses offres d’aide, Lula a promis, unilatéralement, de supprimer graduellement les taxes sur toutes les importations venant des nations les plus pauvres d’Afrique, et d’apporter la technologie agricole brésilienne ainsi que l’assistance sanitaire, en particulier dans la lutte contre le VIH, le virus du SIDA.
La politique étrangère de Lula est ’’l’un des aspects intéressants de son gouvernement, où il est resté fidèle à ses racines de gauche’’, contrairement à la politique économique, a déclaré Joel Rufino dos Santos, un historien et écrivain noir.
Ses visites répétées en Afrique sont en conformité avec les mesures de discrimination positive de son gouvernement en faveur de la population noire, a-t-il commenté à IPS.
Au nombre de ces initiatives, figurent la création d’un secrétariat pour la Promotion de l’égalité raciale, qui a le statut d’un ministère du gouvernement, et l’incorporation de l’histoire et la culture afro-brésilienne dans les programmes d’enseignement à partir de 2003.
Toutefois, la mise en œuvre de cette mesure a rencontré des difficultés, a indiqué Rocha, à cause du manque d’enseignants ayant la formation dans ces domaines. Les objectifs du CEAP incluent la promotion des cours de formation aux enseignants et la publication de livres et matériels didactiques sur la culture et l’histoire africaine et afro-brésilienne, a-t-il noté.
Une autre mesure appuyée par l’administration Lula, l’adoption de quotas pour les étudiants noirs, fait l’objet d’un débat passionné. Des commissions au sein de la Chambre basse ont approuvé un projet de loi qui réserverait la moitié de toutes les places dans les universités publiques aux étudiants qui ont fini leurs trois dernières années du cours secondaire dans le système éducatif public.
Le projet de loi a pour but de favoriser les étudiants défavorisés dont les familles n’ont pas les moyens de les envoyer dans des écoles privées qui donnent l’avantage aux enfants de milieux riches et de classes moyennes lorsqu’il s’agit de l’admission dans les meilleures universités, qui sont publiques.
Le quota réservé aux diplômés des écoles publiques inclurait une part exclusivement destinée aux étudiants noirs et indigènes, proportionnelle à leur présence dans chacun des 26 Etats du Brésil, selon le projet de loi.
L’administration Lula ’’est sur la bonne voie’’, malgré les difficultés et insuffisances, dans ses efforts pour venir à bout de la discrimination que les Noirs ont toujours subie au Brésil, un pays marqué par une inégalité sociale et économique extrême, a déclaré Rocha.
Les visites du président en Afrique ont contribué à ’’donner de la visibilité à ces questions’’, a-t-il souligné.