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17 mai 2003

Mai est le mois des symboles

par Juan Bazán

 

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Juan Bazan rappelle la date prochaine de la fête de la patrie du 25 mai 1810 et la relie à la situation de l’Argentine actuelle, à quelques années du bicentenaire.

Le vieux Cabildo (Conseil municipal) de Buenos Aires continue à avoir, même si cela passe inaperçu, une valeur symbolique profonde. Souvent je traverse sa cour et perçois ce symbole avec une certaine mélancolie et avec la tristesse brute que la réalité a déposé sur ses parois vénérables. Tous nous savons que nous entourent l’incertitude et la frustration. Mais réfléchissons un peu s’il nous reste encore des forces. Par une intention étrange du destin, c’est dans ce Conseil municipal, que sont nés nos espoirs. Le désir et la nécessité d’une Patrie. C’est arrivé il y a longtemps et maintenant il semble que le temps n’a pas passé puisque le même désir persiste et pour beaucoup d’entre nous, nous envahit la certitude que nous n’avons pas un pays et encore moins une Patrie. Mais peut-être ce qui se passe n’est pas vain.

Le mois de mai a une signification particulière pour les argentins : le 25 on commémore l’instauration des gouvernements de la patrie ; le 10 marque le 150ème anniversaire de la Constitution Nationale et le 18, la citoyenneté devait choisir dans des élections libres. Mai est un mélange d’images d’Epinal et de la terrible sensation de vide que nous offre le présent.

Je me répète souvent qu’il est toujours utile de se rappeler le passé, fondamentalement, à travers l’accumulation d’expériences et d’enseignements qu’il entraîne. Il semblerait que les autres n’écoutent pas cet avertissement. Mais nous devrions écraser la mémoire avec cette remémoration : le 25 mai de 1810 a été constitué le premier gouvernement de la patrie sans verser une goutte de sang, bien qu’ensuite, comme l’a écrit un historien, pendant une longue période qui de 42 ans, la République naissante a été marquée par les horreurs d’une lutte civile sanglante autour de son organisation politique, qui coûtera davantage de vies que ne l’ont exigées les guerres de l’Indépendance ; en outre, cela retardera la nation, avec un préjudice grave sur l’avènement rapide que ses forces spirituelles et matérielles propres lui avaient nécessairement procuré, dans la scène de l’Amérique latine.

Je pense à Moreno qui marchait nerveux en sachant que dans ces couloirs on faisait histoire. Le même homme qui depuis la Gazette enseignait que le peuple ne devait pas être satisfait que ses chefs agissent bien, « le peuple - il doit aspirer à ce qu’ils ne puissent jamais agir mal, que la bonté du gouvernement ne vienne pas des personnes qui l’exercent, ’mais d’une Constitution ferme qui oblige leurs successeurs à être aussi bons que les premiers, sans que, dans aucun cas, leur laisser la liberté de devenir mauvais impunément’. Et il complétait sa pensée en disant que ’tant que les gouvernés ne revêtiront pas le caractère d’un groupe d’esclaves, ou d’une bergerie de moutons, les dirigeants ne peuvent revêtir un autre caractère que celui d’ exécuteurs et ministres des lois que la volonté générale a établie’.

Orlando Carracedo, cet ami et maître de Rosario des lois, soulignait il y a quelques jours ce concept révélateur : « telle était la pensée de mai, qui impliquait la naissance de la patrie, de la citoyenneté et de la liberté, qui allait nous conduire à l’organisation républicaine et démocratique qui consacre la Constitution Nationale établie en 1853, qui s’était déjà concrétisée dans l’Assemblée Générale Constitutive de 1813 qui enferme la véritable déclaration de l’Indépendance parce que s’exerceait le pouvoir constitutif, qui est la souveraineté du peuple exprimée en instance extraordinaire, suprême et directe, concept que l’Assemblée a concrétisé dans des lois et des décrets qui affirment le principe de la nationalité et de l’Indépendance ». Et aussi que : « La période pré constituante de notre histoire (1812-1852) culmina en 1853-1860, à partir de l’installation du Congrès Constitutif qui a organisé la nation sans effacer les provinces et qui a été l’expression constitutive du peuple de la nation Argentine ».

Mais cela n’a diminué pas la frustration du moment actuel jusqu’à ce qu’il ait dit : « Dans les larges plis de la Constitution entrent toutes les avances du progrès et toutes les audaces qui conduisent à un destin meilleur, en solidarité, en paix, en liberté, avec l’arrogance des citoyens libres qui en disant aux constituants de 1853 de descendre devant la loi pour ne pas devoir s’agenouiller devant les tyrans ».

C’était là une clé : s’agenouiller devant la Loi pour ne pas devoir se mettre à genoux ou quelque chose de pire devant le caprice des tyrans.

Quand j’ai médité sur le sens de ces mots ,j’ai compris que le plus important de ce qui est récemment arrivé, fut ce qui s’était produit le 27 avril et ce qui aurait dû être répété le 18 mai : le peuple argentin est allé et doit aller à élections pour exprimer sa volonté souveraine. Qui au-delà du succès ou de l’erreur de sa décision, accepte le mandat d’être en révérence devant la Loi. Quelque chose a changé dans la tristesse des murs du Cabildo. C’est comme si tout à coup, il s’était animé à nouveau. Là, à l’intérieur, se trouvaient les fantômes patriotiques de mai. Encouragés eux aussi par les intentions insondables des générations actuelles, qui sans le savoir peut-être, suivaient leurs pas vers un destin moins incertain que celui de ce présent. Ils savaient que tout restait à construire et nous aussi le savons. Ils se sont demandés s’ils auraient force de le faire. Nous doutons mais de toutes manières nous savons que le défi est présent.

Ont-ils pensé, pourrons-ils ? Et nous, en dépassant l’angoisse et la frustration, nous devrions affirmer : Nous allons essayer ! Avec un cri dans la gorge qui ne mentionne celui d’aucun homme - puisque aucun homme, ni aucun tyran, ni aucun messianique illuminé ne va nous sauver - si ce n’est nous-mêmes : Allez argentins ! Que ce pays soit le nôtre et comme c’est Mai, nous pouvons encore essayer de lever notre Argentine à nouveau.


Traduction pour el Correo
Estelle et Carlos Debiasi

ARGENPRESS.info, 16/05/2003

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