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3 octobre 2013

La prison politique aux États-Unis et les courageuses femmes portoricaines

 

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Les condamnations cruelles et injustes des cinq héros cubains, dont quatre d’entre eux sont encore en prison aux États-Unis, constituent le moteur de ces plaintes. Je considère que participer modestement à ce que le monde ait connaissance des horreurs de la prison politique étasunienne est le meilleur hommage que je puisse leur rendre.

Introduction

L’emprisonnement pour des raisons politiques fut la norme et non l’exception à travers l’histoire des États-Unis d’Amérique. Sans remonter trop loin dans le temps, je rappellerai qu’à partir de 1955, quand le mouvement afro-us pour les droits civiques avec le « Boycott des bus de Montgomery » est devenu un mouvement de masses, Rosa Parks a été emprisonnée pour avoir violé les lois ségrégationnistes d’Alabama et, à partir de cette date, a débuté une nouvelle période de répression dans la longue lutte des noirs US pour occuper la place qui leur revient dans la société.

Vers 1960, des centaines d’étudiants noirs ont été arrêtés pour leur participation dans des « sit-ins » et autres manifestations de masse. Le Dr. King et d’autres leaders du mouvement pour les Droits Civiques ont été fréquemment frappés et arrêtés, de nombreuses églises dans les quartiers noirs ont été brûlées, des milliers de militants licenciés de leur travail sans aucune compensation et plusieurs assassinés.

La violente répression a conduit à l’émergence de l’auto-défense armée et, par la suite, à des organisations révolutionnaires. Dans la seconde moitié des années 70 la vague répressive a été marquée par une plus grande violence et ont été assassinés, Malcolm X, le Dr. Martin Luther King Jr., Fred Hampton, Mark Clark et plusieurs autres personnalités. Des centaines de militants et de membres du « Black Panther Party » et du « Republic of New l’Afrique » ont été condamnés à de la prison.

Dans les années 70 , des rébellions ont éclaté dans de nombreuses prisons partout dans le pays, la plus remarquable a été celle de septembre 1975 à Attica. George L. Jackson, assassiné par les gardiens quelques semaines avant les événements est devenu l’étendard des prisonniers noirs.

Actuellement, il y a plus des afro-américains en prison que jamais. Le taux d’emprisonnement a exponentiellement grandi depuis la Mutinerie de la prison d’Attica. Selon le Département de Justice (2009) « À peu près 12-13 % de la population des États-Unis est afro-américain, mais ils representent 40.1 % des 2.1 ‘ a eu l’Afrique du Sud à l’apogée de l’Apartheid.

Mais afro-us ne sont pas les seuls à être réprimés et emprisonnés seulement pour être différents ou pour les maintenir soumis au système. La prison politique des États-Unis se nourrit aussi des indiens, de Mexicains résidant aux US et d’autres minorités qui luttent aussi pour leurs droits civiques ; les objecteurs de conscience qui se sont refusés à participer comme soldats aux guerres impériales ; les immigrants sans papiers d’identité dont l’unique délit a été de traverser vers la terre qui a été volée à leurs aïeux, à la recherche d’un travail digne pour soutenir leurs familles ; des ouvriers syndicalistes ; des militants de gauche ; des portoricains qui rêvent de l’indépendance de leur patrie ; des membres du mouvement « Occupy » qui luttent contre la corruption, le chômage et les inégalités croissantes sociales et économiques ; etc. ; à qu’il faut ajouter les séquestrés et torturés en flagrante violation des accords internationaux et des lois mêmes des États-Unis d’Amérique, à Abu Ghraib, Guantanamo, Bagram, et dans tout un réseau de prisons secrètes dispersées dans le monde.

Au sein du système pénal étasunien on l’a appelé « Prison-Industrial Complex » (PIC) dû à la privatisation croissante des institutions et des services pénitentiaires et aux profits milliardaires des entreprises impliquées dans le gros business de privation de libertés des personnes. Un exemple est « l’Arizona’s Kitchell Construction » qui a obtenu des contrats pour la construction de plus de 70 installations carcérales. Les propriétaires des prisons privées gagnent de l’argent aux dépens des prisonniers qu’on leur assigne. Tandis que plus élevé est le nombre de prisonniers, plus grands sont leurs bénéfices.

Aux USA l’emprisonnement est devenu un système élitiste de régulation sociale. Une idéologie raciste du châtiment a supplanté l’ancienne politique de réhabilitation. Une grande partie des prisonniers ne le sont pas pour avoir commis des crimes mais pour ne pas entrer dans le cadre des lois promulguées pour perpétuer le contrôle sur des pans de la population qui occupent les strates inférieures dans l’échelle sociale. Cette criminalisation des pauvres et des minorités transforme en prisonniers politiques des centaines de milliers de ceux qui composent la population pénale des États-Unis, la plus grande du monde.

De courageuses femmes portoricaines

Le monde est resté horrifié quand il a connu les atrocités commises dans des centres de détention conçus pour casser la volonté des prisonniers, comme ceux d’Abu Ghraib et de Guantanamo. Cependant, les premiers essais de ce type d’installations carcérales ont émergé aux États-Unis il y a plusieurs décennies.

Combiner l’humiliation et la torture avec de pervers recours psychologiques, cela eut lieu dans le Kentucky avec la création de l’euphémiquement appelé « High Security Unit » (HSU), « Unité de haute sécurité » expérimentale pour des femmes, située dans le « Fédéral Correctional Institution » de Lexington.

L’HSU a été inaugurée en 1986 sous l’administration de Ronald Reagan. Cette unité était composée de 16 cellules souterraines d’isolement où les prisonnières perdaient la notion du temps, puisqu’elles vivaient sous des lumières artificielles 24 heures de la journée, surveillées par des caméras qui enregistraient absolument toutes leurs activités. La propriété personnelle était interdite. On les soumettait fréquemment à un régime de privation de sommeil, en les réveillant par intervalles quand elles essayaient de dormir. Elles étaient souvent soumises à des humiliations comme des « fouilles des cavités corporelles » qui devenait un harcèlement sexuel étant réalisé par des hommes.

Déjà à cette époque étaient expérimentées des méthodes connues comme « sensory deprivation » (privation sensorielle) ou « perceptual isolation » (isolement perceptuel) qui consistent à réduire ou à éliminer une ou plusieurs stimulations sensorielles, ce qui provoque des effets dévastateurs chez les prisonniers, comme l’anxiété, les hallucinations et la dépression. Des effets similaires sont provoqués le dit «  Protocole Ganzfeld  » dans lequel, au contraire, est utilisé une stimulation (lumière, son, etc.) de manière constante et pendant de longues périodes.

Dans l’HSU ont été internés plusieurs portoricaines célèbres, militantes d’organisations indépendantistes, classées officiellement comme « high risk » (haut risque) bien qu’aucune ne se fût comportée de manière violente avant d’être transférée à Lexington.

Alejandrina Torres, liée avec les Forces armées de Libération Nationale (FALN), a été arrêtée en juin 1983. Comme ses compagnes, Alejandrina a assumé elle-même sa défense et a informé la Cour du district qu’elle considérait comme illégal son procès et qu’elle réclamait d’être jugée par une Cour internationale. Sous la charge de « conspiration séditieuse », pour essayer de renverser le gouvernement des États-Unis d’Amérique à Porto Rico, elle a été condamnée à 35 ans de prison.

Alejandrina a été arbitrairement placée dans une prison pour hommes où, comme il fallait s’y attendre, elle a subi des violences sexuelles répétées. Ensuite elle a eu à subir pendant deux ans les horreurs de la SHU jusqu’à ce que, finalement, elle fût transférée à la prison de femmes du Danbury, dans le Connecticut, d’où elle a été libérée en septembre 1999 par le président Bill Clinton grâce à l’intervention du Révérend Desmond Tutu et de l’ex-président Jimmy Carter.

Silvia Baraldini née en Italie mais elle a activement participé avec le « Black Power » et avec le mouvement indépendantiste portoricain pendant beaucoup de temps. Silvia a refusé de déclarer devant le Grand Jury qui enquêtait sur les activités des indépendantistes et a été condamnée à 43 ans de prison en 1982. Transférée en Italie en 1999 pour qu’elle y finisse le reste de sa peine, elle a été libérée le 26 septembre 2006 grâce à une loi de pardon promulguée par le parlement italien.

Susan Rosenberg, poète, une femme de lettres et vétérane des luttes pour la justice sociale, a appartenu à beaucoup de mouvements radicaux et a été une militante active du mouvement pour l’indépendance du Porto Rico et du « Mai 19th Communist Organization ». Arrêtée en 1984, elle est accusée, entre d’autres charges, de complicité dans l’évasion d’Assata Shakur. Elle a été condamnée à 58 ans de prison, dont elle a accompli 16. Le 20 janvier 2001, dernier jour de son mandat, Bill Clinton lui a octroyé la grâce présidentielle.

Après sa libération, Susan Rosenberg a travaillé comme professeur adjoint de littérature au sein du John Jay College de Manhattan mais, après quatre semestres, des pressions politiques ont obligé le centre universitaire à résilier son contrat. En 2011, Susan a publié ses mémoires de prison sous le titre « An American Radical : À Political Prisoner in my Own Country » (Une américaine radicale : une prisonnière politique dans mon propre pays).

Le mouvement indépendantiste portoricain a vigoureusement dénoncé le traitement inhumain de ses camarades. L’ «  American Civil Liberties Union » (ACLU), après une visite d’inspection, a classé la SHU de « living tomb » (tombe vivante). Le Dr. Richard Kom, psychologue clinique, au nom de l’ACLU a conclu dans son rapport que l’objectif de l’HSU était « … réduire les prisonnières à un état de soumission essentiel pour sa transformation idéologique. Si cela échoue, l’objectif suivant est de les transformer en leurs propres et efficients antagonistes. Si cela échoue aussi, l’alternative qui reste est de les détruire en obtenant qu’elles mêmes se détruisent ». Un rapport de 38 pages d’Amnisty International a conclu que l’HSU violait les standards internationaux de traitement de prisonniers [1]. D’autres organisations se sont prononcées de la même façon.

Après une vive campagne de dénonciation des atrocités commises dans l’HSU, un juge a déterminé « que les prisonnières avaient été illégalement classées sur la base de leurs affiliations politiques, déclarations et crédos politiques. » [2]. Le Bureau Fédéral des Prisons s’est trouvé obligé de fermer l’unité en 1988, seulement deux ans après son inauguration, et de transférer les femmes dans d’autres prisons.

Salvador Capote pour Alai-Amlatina.

Traduit de l’espagnol pour El Correo par : Estelle et Carlos Debiasi

El Correo. Paris, le 3 octobre 2013.

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[2]

Notes

[1Rosenblatt, Elihu : « Criminal Injustice : Confronting the Prison Crisis », South End Press, 1996, p.328.

[2McGowan, Daniel : « Tales from inside the U.S. Gitmo », Huff Post Politics, Sept. 12, 2013.

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