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11 septembre 2003

OMC, un état des lieux (2)

 

Par Gérard Surdez

II - Accord Général sur le Commerce dans les Services (AGCS).

Les débats sur l’AGCS ont été principalement axés sur l’accès au marché soutenu par les pays développés. Par contraste, on a peu porté attention aux discussions sur les sujets horizontaux (évaluation de l’AGCS et modalités pour les Pays les Moins Avancés) et sur
l’établissement de règles (mesure de sauvegarde d’urgence, subventions, marchés publics et règlements intérieurs), qui intéressent tout particulièrement les PED.

En particulier il faudra que la Conférence clarifie le mandat de l’AGCS pour mener une évaluation du processus de libéralisation, les PED ne se sentant pas d’humeur à engager la libéralisation de nouveaux services sans avoir d’abord une parfaite compréhension des effets de
ceux déjà engagés. Dans les derniers jours, les PED ont proposé que le projet de texte de la Conférence rétablisse l’équilibre entre l’encouragement à finaliser la phase des Demandes et Offres et la
négociation pour l’établissement de règles.

L’importance des offres initiales des pays développés faites aux PED s’est révélée très limitée.

On peut dire qu’aucun pays développé ne s’est engagé sur le mode 4 (mouvement transfrontalier des personnes physiques). Les PED ont récemment proposé de faire référence dans le projet ministériel à la nécessité de faire des concessions sur les modes de services qui sont
d’un intérêt particulier pour eux, le mode 4 en particulier.

Si on a pu noter que certains aspects des négociations sur l’AGCS ont progressé, d’autres points cruciaux, comme les négociations sur l’agriculture ou l’accès au marché pour les produits industriels, sont restés très en retrait sur le planning prévu., ce qui mécontente ceux des PED qui ne voient pas d’avantages particuliers aux négociations actuelles sur les services.

Evaluation :

Un désaccord a vu le jour entre les pays développés et certains PED (Cuba, Kenya, Nigeria, Pakistan, Sénégal et Thaïlande) pour savoir si c’était au Conseil des Services de l’OMC de mener une évaluation sur
la libéralisation ou si chacun des Membres pouvait mener sa propre évaluation au plan national ou régional. Les Lignes de conduite et Procédures adoptées en 2001 établissent que procéder à une évaluation
est du "ressort permanent du Conseil des Services et que les négociations devront évoluer en fonction des résultats de l’évaluation". Les PED ont plaidé de longue date pour qu’une évaluation globale soit menée avant le démarrage de nouvelles négociations sur l’accès au marché ; Certains pays développés
soutiennent que les Lignes de conduite permettent aux Etats de mener leur évaluation sur le plan interne. Ils prétendent aussi que les
données disponibles sont insuffisantes pour permettre une évaluation
globale. Jusqu’ici, rien n’a bougé au sujet de l’évaluation globale
des services sur le plan multilatéral. Aussi certains considèrent que
l’absence de résultats dans ce domaine est une violation directe du
mandat des Lignes de Conduite adoptées et de l’Art.XIX.3 de l’AGCS qui
dit que " le Conseil du commerce des services procédera à une
évaluation du commerce des services d’une manière globale".

La phase de demandes et offres :

Concernant la phase bilatérale de demandes et offres, pratiquement
tous les pays ont reçu des demandes de 62 d’entre eux (principalement
des pays développés) ; 30 pays, dont les USA et l’UE, ont déjà fait
leurs offres. Un grand nombre de PED, l’Inde en particulier, ont
souligné l’échec des pays développés à présenter des offres
substantielles en mode 4 et leur ont demandé d’accorder un meilleur
accès aux personnes physiques pourvoyeuses de services.

Les PMA n’ont pas encore remis leurs demandes.

Dans plusieurs demandes, ont aussi été abordés des sujets horizontaux, tels que le retrait d’obstacles aux investissements (tests de nécessité économique) en mode 3 (présence commerciale à l’étranger).

Les USA et l’UE ont demandé des engagements supplémentaires concernant
les réglementations intérieurs sur les services (notification et demande de nécessité).

Des PED s’inquiètent du manque de transparence du processus et de l’importante expérience requise pour tenir des négociations bilatérales sur l’accès au marché tout autant que des inégalités en pouvoir de marchandage et de la tendance au bilatéralisme en matières horizontales. Beaucoup de PED continuent de se demander s’ils ont quelque chose à gagner d’une libéralisation multilatérale des services plus poussée.

Les sujets horizontaux :

Le crédit pour une libéralisation autonome :

Parmi les sujets horizontaux, le crédit pour une libéralisation autonome fait référence aux mesures unilatérales prises par les Membres dans ce sens, conséquence de leur propre processus interne de
libéralisation ou des programmes d’ajustement structurel imposés par la Banque Mondiale ou le FMI depuis 1995. Ce crédit sera déterminé lors de négociations bilatérales mais ses modalités ne créent pas d’obligations légales ni n’accordent automatiquement de droits.

Traitement spécial et différencié (S&D) :

L’AGCS contient des dispositions sur le traitement spécial et
différencié à accorder aux PED, aux PMA en particulier. En Mars 2003,
la Zambie, au nom de ces derniers, a présenté une proposition sur les
modalités de négociations pour le traitement S&D des PMA, au terme de
laquelle ces pays ne seraient pas obligés d’offrir le traitement
national aux fournisseurs de services étrangers, ni de prendre des
"engagements supplémentaires" en matière de réglementation allant "au
delà de leurs capacités institutionnelles sur le plan administratif et
réglementaire". Elle a demandé aussi que des mécanismes préférentiels
d’accès au marché soient créés en faveur des PMA. Une contre
proposition du Secrétariat de l’OMC et des USA altère cette
proposition ne la rendant plus contraignante mais se contentant de
"meilleurs efforts" entrepris dans ce sens. On n’est pas encore
parvenu à ce jour à une décision finale sur les modalités à accorder
aux PMA

Mécanisme de sauvegarde d’urgence (MSU) :

La plus grande partie des PED, emmenés par les pays de l’ASEAN
(Nations du Sud-Est Asiatique) appuient l’établissement d’un tel
mécanisme dans le secteur des services.( Un tel système existe déjà
dans l’accord sur l’Agriculture ou dans le GATT). La plupart des pays
développés et certains PED d’Amérique Latine restent plutôt sceptiques
à ce sujet, les USA et l’UE s’interrogeant sur sa faisabilité. Les
Etats restent divisés sur la nécessité de ce mécanisme et s’il devrait
s’appliquer horizontalement ou sur une base sectorielle. Il ne semble
pas certain que les négociations sur le MSU puissent être finalisées
d’ici Mars 2004comme initialement prévu. Un échec dans ce domaine
aurait des répercussions sur les autres règles à établir portant sur
les subventions et les marchés publics. 15 PED ont proposé l’inclusion
d’un texte sur le MSU dans le projet de Cancun.

Subventions :

Bien que les Lignes de conduite prévoient de compléter "les
négociations sur les réglementations multilatérales sur les
subventions avant la conclusion des négociations sur l’accès au
marché" fin 2004, la discussion n’avance que très lentement. 4 pays
seulement ont répondu à un questionnaire sur leur programme de soutien
à leurs services intérieurs. Il n’y a pas encore eu de débat sur la
définition des subventions dans les services, leur rôle dans la
poursuite des objectifs de politique publique ou sur la nécessité du
traitement S&D pour les PED. L’absence de règles multilatérales sur
les subventions a commencé à travailler contre les pays les plus
faibles dans le processus des demandes et offres, dans la mesure où
beaucoup de fournisseurs nationaux dans les PED se trouvent
désavantagés vis-à-vis de leurs concurrents étrangers à qui des
subventions peuvent être accordées. La situation est si confuse
qu’aucune information valable n’existe aujourd’hui sur les plans
d’incitations des pays de l’OCDE ou des autres pour promouvoir leurs f
ournisseurs de services.

Marchés publics :

Contrairement aux pays développés, la plupart des PED considèrent que
la non discrimination, le traitement national et l’accès au marché
sont exclus dans ce domaine du mandat de l’AGCS. On devra attendre les
résultats de Cancun pour savoir si des négociations plus étendues
doivent être ou non lancées sur la transparence en matière de marchés
publics.

Réglementations internes :

Les négociations pour réglementer les mesures internes sur les
services ont principalement été initiées par l’UE et le Japon.
Celui-ci a présenté en mars 2003 une proposition cherchant à s’assurer
que les règlements nationaux relatifs aux licences, aux exigences de
qualification et aux normes techniques ne constituent pas des
obstacles inutiles au commerce des services. L’UE en juillet a
également présenté une proposition sur les procédures de licence.

Si les PED s’y sont de plus en plus intéressés face aux demandes des
USA et de l’UE pour des "engagements supplémentaires" dans le cadre de
l’accès au marché, ils ne se satisfont pas de la façon dont les
propositions japonaise et européenne ont été formulées sur le "test de
nécessité", sur l’existence de procédures compliquées et sur le fait
que les mesures proposées ne s’appliqueraient pas au mode 4 et aux
visas.

Application de l’accord :

18 PED ont récemment présenté un communiqué conjoint dans lequel ils
indiquent que la meilleure manière de répondre au mandat de l’AGCS
était de remplir une série de questions qui faciliterait l’analyse des
offres initiales portant entre autres sur leur qualité et l’analyse
technique de ces offres ainsi que sur l’évaluation de l’importance
économique et commerciale des engagements proposés. A ce jour aucune
décision n’a encore été prise sur cette proposition.

III - Agriculture

Comme beaucoup l’avait prédit, les membres de l’OMC ont été
incapables d’adopter les modalités sur l’agriculture avant l’échéance
fixée à Doha de fin mars 2003.

Comme ce chapitre sera le catalyseur du Round de Doha ou en marquera
l’échec, les efforts pour parvenir à aplanir les nombreuses
divergences existantes n’ont pas manqué depuis cette date. Deux des
principaux acteurs, l’UE et les USA, sont parvenus à se mettre
d’accord sur un "texte conjoint" le 13 août.

Le texte conjoint USA-UE :

Ce document bien qu’il n’offre pourtant pas de données chiffrées sur
les engagements de réduction, montre que les choses commencent à
bouger pour la première fois depuis trois ans et demie. Il reste à
voir si un texte qui s’en inspirerait serait acceptable pour tous les
participants. Il n’est pas non plus certain que les PED veuillent
prendre de nouveaux engagements sur des sujets comme les produits
industriels ou les "sujets de Singapour" sans savoir exactement ce
qu’ils gagneront des négociations sur l’agriculture. Il semble en
particulier douteux que les 4 PMA d’Afrique (Bénin, Burkina Faso,
Tchad et Mali) continueront à soutenir le round actuel sans obtenir à
Cancun d’engagements contraignants des principaux pays subventionnant
le coton (USA, UE et Chine) afin d’éliminer à moyen terme (2006)
toutes les subventions s’y rapportant et recevoir une compensation
pendant la période transitoire.

La question demeure de savoir si les grands pays exportateurs
agricoles s’aligneront sur la proposition conjointe USA-UE, qui
permettrait aux pays plus faibles de bénéficier davantage que les
autres de l’ouverture de nouveaux marchés. En particulier il n’est pas
certain que les PED exportateurs nets de produits alimentaires
(Argentine, Brésil, Chili et Thaïlande) accepteraient d’obtenir un
traitement spécial et différencié inférieur à celui accordé à d’autres
pays du Sud, comme les USA et l’UE l’ont proposé. Mais si des PED,
comme le Sri Lanka et le Pakistan ou les pays ACP acceptaient la
proposition US-UE, il deviendrait politiquement difficile aux pays du
groupe de Cairns de s’opposer à une telle approche différenciée.

Les principales questions à résoudre :

 Subventions à l’exportation (essentiellement utilisées par l’UE).

 Crédits à l’exportation et aide alimentaire (largement utilisés par les USA).

Subventions internes de la" boite verte".

Pour l’UE et le Japon, les subventions de la boite verte, qui ne doivent avoir "aucun effet de distorsion commerciale", sortent explicitement du mandat de Doha. Mais pour le groupe de Cairns comme pour certains PED, le montant de leurs coûts (78 Milliards $ par an)
en font des éléments de distorsion, vu leur importance.

A Doha, on a aussi parlé d’une "boite du développement" qui donnerait aux PED plus de latitude pour adopter des mesures de soutien à leur agriculture. Mais on est resté particulièrement muet ces 12 derniers mois sur cette boite ou sur une boite de sécurité alimentaire. Car ceux qui soutiennent ces concepts savent que ce serait payé fort cher pour un instrument considéré sans doute comme une victoire politique mais qui n’aurait guère de valeur économique. C’est pourquoi ils ont
tourné plutôt leur attention vers d’autres instruments comme les produits stratégiques et sur un nouveau mécanisme de sauvegarde spéciale.

Les aspects non commerciaux de l’agriculture auxquels se réfère la Déclaration de Doha (que le texte US-UE considère comme des "sujets intéressants mais sur lesquels il n’y a pas d’accord") ont été soutenus par les partisans de la "multifonctionnalité" agricole (UE,
Norvège, Suisse, Japon, Corée, île Maurice) qui recherchent de la souplesse pour répondre aux problèmes environnementaux, de développement rural ou de sécurité alimentaire. La Suisse et l’UE tentent de faire reconnaître dans les négociations le principe de
précaution, l’étiquetage normalisé, les mesure de bien-être animal et l’extension des origines géographiques. aspects

Les modalités pour de nouveaux engagements (dont l’échéance était fixée au 31 mars 2003) n’ayant pu donner lieu à un accord, le projet de Cancun prévoit de fixer une nouvelle échéance à la Conférence. La
conclusion des négociations était prévue au 1er janvier 2005.

Accès au marché :

Concernant les réductions tarifaires (droits de douane), elles s’opéreraient en fractions égales sur 5 ans (10 ans pour les PED). Une alliance de 16 PED ont réaffirmé leur droit à déterminer et à déclarer
leur traitement Spécial et Différencié (qu’il est prévu d’accorder à des "produits spéciaux") de façon indépendante ; seul leur nombre serait négociable. Le texte conjoint US-UE ne mentionne pas ces produits spéciaux. Mais le concept de produits d’importation
"sensibles" qu’il introduit fournirait effectivement aux PED une souplesse équivalente à celle des produits spéciaux. Néanmoins le groupe de Cairns et d’autres PED voudraient que soit maintenu formellement ce dernier concept.

L’alliance des 16 PED a aussi demandé que le nouveau mécanisme de sauvegarde spécial couvre un champ plus large que le mécanisme de sauvegarde actuel et que ce mécanisme et le concept de produits spéciaux soient dissociés, alors qu’ils sont liés dans la proposition
US-UE..

Les quotas tarifaires pourraient s’étendre jusqu’à 10 % de la consommation intérieure courante. Cette proposition pose problème au Japon et à la Corée qui cherchent plutôt à réduire certains quotas (en particulier sur le riz) afin qu’ils correspondent davantage à leurs niveaux de consommation les plus récents.

Pour contrebalancer l’érosion des préférences commerciales, les modalités dans le projet de texte offriraient une période d’application plus longue et un moratoire de deux ans "pour les réductions tarifaires qui affecteraient les préférences tarifaires portant sur les produits dont l’exportation est d’importance vitale pour les PED en bénéficiant". De plus, les droits s’appliquant sur les quotas de ces produits seraient totalement éliminés.

Le texte US-UE propose que les pays développés fournissent un accès sans droits à un certain pourcentage d’importations des PED, combinaison du principe de la Nation la Plus Favorisée et de préférences.

Concurrence à l’exportation :

Le projet demande l’élimination de 50 % des subventions en 5 ans (10 pour les PED), les 50 % restants devant l’être en 9 ans (12 pour les PED). Dans son texte conjoint avec les USA, l’UE a proposé d’éliminer
les subventions à l’exportation sur certains produits (à déterminer) qui sont d’un intérêt particulier pour les PED ; les subventions sur les autres produits ne seraient que réduites.

Le texte US-UE propose, pour que l’équilibre soit maintenu entre eux, que les crédits à l’exportation soient éliminés ou réduits parallèlement à la réalisation du démantèlement des subventions à
l’exportation.

Soutiens intérieurs :

Boite verte :

Le projet ne répond pas totalement à la demande du Groupe de Cairns et d’un grand nombre de PED de fixer un seuil maximum de dépenses pour la boite verte ou d’en retirer quelques programmes de soutiens aux
revenus agricoles.

Boite ambre (soutiens donnant lieu à des distorsions commerciales) :

Ils devraient diminuer de 60 % en 5 ans pour les pays développés (40 % en 10 ans pour les PED). Le texte US-UE n’avance aucun chiffre pour la réduction de cette boite. Il signale simplement qu’elle devrait être
supérieure à celle de l’Uruguay Round (20 % pour les pays développés).

Boite bleue (subventions partiellement découplées d’après des programmes de limitation de la production) :

Elles seraient maintenues mais diminuées de moitié. Alors que le Groupe de Cairns, les USA et d’autres PED voudraient son élimination totale, l’UE, le Japon et la
Suisse veulent son maintien. L’accord US-UE prévoit que les dépenses seront réduites à 5 % de la valeur totale de la production agricole, mais cette "nouvelle" boite n’exigerait plus des limitations de production. Les USA pourraient ainsi plus facilement exempter ses
versements contra cycliques prévus dans la Farm Act de 2002 de ses engagements de réduction.

Le projet accorderait également plus de souplesse aux PED pour exempter d’engagements de réduction certaines de leurs subventions accordées pour la poursuite d’objectifs de développement rural.

Alors qu’un grand nombre de pays africains, mais aussi le Pakistan et la Norvège, soutenaient la demande des 4 PMA du coton (voir ci-dessus) afin d’éliminer les subventions sur ce produit, USA et UE semblaient
circonspects sur le fait d’avoir à établir un précédent en matière d’engagements sur les subventions de produits spécifiques, qui viendrait contredire l’approche qu’ils ont prise sur les réductions de la boite ambre.

Pays les Moins Avancés :

Ils continueraient à être exemptés des engagements de réduction, mais seraient "encouragés [à en faire] sur une base volontaire en rapport avec leurs besoins de développement". La question d’un traitement spécial pour les PMA ne se retrouve pas dans le texte commun US-UE.

Les nouveaux membres (tels que la Chine) auraient la possibilité de reculer de deux ans l’application des nouveaux engagements

On est parvenu à aucun accord sur les mesures ayant trait aux éventuels effets négatifs du programme de réforme sur les PMA ou sur les PED importateurs nets de produits alimentaires.

Il convient de noter que durant ces trois dernières années la plupart des propositions de négociations avancées l’ont été dans des notes
informelles (qui ne figurent donc pas sur le site de l’OMC).

4 - Application des accords.

L’importance que les PED donnent à ce sujet nous assure qu’il jouera un rôle important dans le prochain marchandage dans le cadre du système commercial multilatéral., qu’on retrouvera certainement à
Cancun. Considérant les blocages qu’on y a rencontrés bien avant Doha (la prise de conscience des PED date de la Conférence de Seattle) confirme que ce chapitre va constituer une partie intégrale des nouvelles négociations.

Le rôle de Cancun dans le traitement de ces déséquilibres systématiques et pour limiter l’introduction de nouveaux, reste inconnu à ce jour. Selon la Déclaration de Doha sur le sujet,
(http:www.france.attac.org/site/page...) il est simplement demandé aux membres de "redoubler d’efforts". Un rapport
devrait aussi être adressé à la 6e Conférence. Si les PED étaient obligés d’accepter une nouvelle date butoir, il semble évident que son
coût dépasserait aujourd’hui les gains qu’ils peuvent attendre des négociations. En grande partie le maintien de l’équilibre dépend de
l’agenda du développement (prévu à Doha). Nombreux sont ceux qui craignent qu’un marchandage de dernière minute sur la poursuite de la libéralisation en matière agricole fasse une fois de plus passer au
second plan l’importance critique de ce sujet et retarde la prise en compte des déséquilibres au sein de l’OMC, ce qui pourrait entraîner de dangereuses conséquences pour le système tout entier.

Les déséquilibres portent sur certains engagements que les pays développés se sont révélés incapables de tenir (notamment sur le traitement spécial et différencié). Les pays développés avancent que les changements souhaités modifieraient les droits et obligations des
membres, entraînant la renégociation de certains des Accords et que des concessions compensatoires seraient donc indispensables. Cependant beaucoup d’experts affirment que la rectification des déséquilibres
devrait être considérée comme le traitement de défauts intrinsèques et non une modification de droits ou obligations spécifiques et ne devrait donc pas être soumis à la règle de réciprocité (l’échange de
concessions équivalentes). Et néanmoins Doha a démontré que les PED auraient probablement à faire des concessions en retour.

Le mandat sur l’application permet diverses interprétations. Pour l’une, toutes les mises en ouvre sont sujettes à négociations (§12 de
la Déclaration) et traitées en priorité par les organes de l’OMC, un
rapport devant être adressé au Comité de Négociations Commerciales,
qui supervise les négociations, d’ici la fin 2002 ; une seconde,
moins favorable au développement, maintient au contraire que ce ne
peut être le cas que sur les questions pour lesquelles la Déclaration
de Doha donne mandat spécifique et cherche à réduire l’importance de
certains sujets. Le débat continue de refléter d’importantes
divergences d’opinion entre les membres.

La plupart des échéances prévues à fin 2002 ont été dépassées par
manque de consensus. En août 2003, pas plus qu’alors, on a constaté
d’avancées touchant aux problèmes devant être résolus dans la période
post-Doha. Sur les textiles, les membres étaient si divisés qu’ils
n’ont même pas pu se mettre d’accord sur un rapport qui décrivait les
différences les séparant.

Les principaux problèmes liés à la mise en ouvre :

Règles d’origine :

Ce sujet est d’actualité depuis l’Uruguay Round et devait aboutir
d’ici fin 1998. La Décision de Doha en a demandé la réalisation
d’urgence d’ici 2001., puis repoussé à fin 2002 et à nouveau différé
jusqu’à juillet 2004.

Textiles :

Les discussions ont mis en lumière de profondes divergences dans
l’interprétation de l’Accord sur les Textiles entraînant un blocage en
juillet 2002 (elles ont repris depuis).

Elles mettent aux prises les principaux PED exportateurs (H-K, Inde,
Pakistan, Brésil) qui font partie du Bureau International des Textiles
et de l’Habillement [BITH] aux principaux importateurs (Canada, UE,
USA). Les principales propositions de l’après-Doha portaient sur
l’usage de la méthode la plus favorable pour calculer la prolongation
des quotas. (aussi bien des PMA que des PED en général). Les adhérents
au BITH font valoir que les pays développés n’ont pas été capables de
faire évoluer progressivement l’augmentation des quotas en leur
permettant un accès raisonnable à leurs marchés. Les pays développés
maintiennent qu’ils ont adhéré au processus transitoire de l’Accord,
visant à conserver ce commerce sous les règles normales du GATT
jusqu’au 1er janvier 2005.

Traitement spécial et différencié :

Bien qu’explicitement traité à Doha, on notera qu’au 31 juillet 2002,
le Comité sur le Commerce et le Développement a été incapable de faire
des "recommandations claires pour une prise de décision". L’échéance a
été d’abord reportée au 31 décembre 2002 puis de nouveau à février
2003. Depuis, peu de chemin a été parcouru. A fin juillet 2003, les 88
propositions ont été réparties en 3 catégories : celles où un accord
était possible avant ou à Cancun ; celles qui devaient retourner aux
organes subsidiaires et ceux qui étaient soumis à de profondes
divergences.

Subventions et contre mesures :

Les 2 documents de Doha (la Décision sur la mise en ouvre et le
document de Compilation) leur fait une place considérable (26
paragraphes leur sont consacrés) plus que n’importe quel autre sujet.

Contre-mesures : Dès avant Doha, le Brésil et l’Inde en avaient demandé la réforme. Le débat a opposé ces pays à l’UE et aux USA Le Président de son Comité avait annoncé au Conseil Général, fin juillet
2002, qu’il n’avait pas pu mettre à jour une base de consensus, laissant entendre que le sujet reviendrait au groupe de négociations sur les règlements.

Ce résultat a désappointé le Brésil et l’Inde tandis que l’UE et les USA considèrent le mandat de Doha comme ainsi rempli.

Les principaux éléments de désaccord portent sur l’usage du principe de minimis (les droits de contre-mensures ne sont pas levés si le niveau des subventions se situe au-dessous d’un certain plancher) et sur la définition de l’industrie nationale et l’analyse des dommages.

Périodes transitoires :

21 des 29 demandes pour étendre la période transitoire des programmes
de subventions tel que définis par l’art. 27.4 de l’Accord sur les
Subventions, ont été acceptées. Cet article prévoit que les PMA et les
pays ayant moins de 1.000 $ par tête, disposaient automatiquement de 8
ans après l’entrée en vigueur de la phase d’élimination des
subventions à l’exportation. A Doha on a donné au Comité jusqu’au 15
décembre 2002 pour accorder les extensions aux programmes retenus.

Anti-dumping :

Bien que soumis aux règles générales de l’OMC et en conséquence traité
d’abord dans le groupe de travail sur les règles, les PED ont voulu qu
certains de ses articles soient discutés au sein du groupe de Travail
du Comité anti-dumping afin d’éviter qu’ils ne soient l’objet de
tractations dans un contexte élargi de négociations.

Evaluation de la douane :

Le comité devait rendre un rapport au Conseil Général sur l’exactitude
de la valeur déclarée des marchandises importées, d’ici fin 2002. Il a
été reporté au 15 mai 2003 en raison du temps pour permettre
l’intervention du Comité technique. La réponse de ce dernier fut
discutée fin mai ce qui n’a pas empêché qu’on suspende les discussions
afin de permettre au Président de tenir des consultations sur la façon
de procéder. En 2003,les discussions n’ont pu déboucher.

Accès au marché :

Son Comité a essayé d’achever son mandat en fournissant un rapport au
Conseil Général d’ici fin 2002 sur la signification qu’on devrait
donner à la formule "intérêts substantiels" de l’Art.XIII du GATT
1994, qui établit comment un quota pourrait être alloué à ceux des
pays ayant un "intérêt substantiel" à fournir une marchandise sous
quota. Ce qui a donné lieu à 8 réunions en 2002. En décembre 2002, le
rapport du Comité a reconnu le manque de consensus au sujet des
recommandations à faire et qu’il fallait en référer au Conseil
Général. Depuis lors, on n’est parvenu à aucun nouveau progrès. Les
principaux opposants demandant une clarification de la formule sont
essentiellement de petits pays, qui en raison de leur forte dépendance
à l’égard de ce genre de produits estiment qu’ils y ont un intérêt
substantiel (Pour Ste Lucie, par exemple, on devrait s’orienter vers
une définition prenant en compte l’importance du produit pour le
membre exportateur, ce qui est différent de sa part en pourcentage sur
le marché importateur. Un travail intéressant sur ce sujet est synthétisé dans :
http.www.france.attac.org/site/page....

Beaucoup ont reconnu que les économies petites et moyennes font face à des difficultés en cette matière. Certains d’entre eux, comme
l’Equateur, font remarquer que la jurisprudence de l’OMC, dans le cas
de la banane, a déjà interprété le §2 (d) d’une manière qui laisse les
petites économies sans droits de quota.

L’Adpics : (droits sur la propriété intellectuelle)

Un de ses articles (66.2) traite des obligations des pays développés pour inciter au transfert de technologie aux PED. Le mandat était que les pays développés devaient fournir des rapports tous les 3 ans,
remis à jour annuellement, sur le fonctionnement pratique de ces incitations. En février 2003, le Conseil de l’Adpics a adopté une décision visant à mettre en place un mécanisme de contrôle et la
totale mise en ouvre des obligations découlant de l’Art.66.2. Ceux qui, à fin 2002, avaient déposé leurs rapports étaient le Canada, la Norvège, l’Australie, le Japon, la Nouvelle-Zélande, la Suisse, les USA et l’UE auxquels la République tchèque est venue s’adjoindre en
août 2003.

L’Art.64 de l’Adpics porte sur les plaintes en "non-violation" (un membre se plaint qu’une décision d’un autre a pour lui des
conséquences négatives même si aucune règle de l’OMC n’a été violée).
D’après les consultations de 2002 et du début 2003 il semblerait que
la non-violation ne devrait pas s’appliquer à l’Adpics. La Suisse et
les USA ont cependant bloqué l’accord.

Article XVIII - Comité du Commerce et du Développement :

Cet article intitulé "Assistance gouvernementale au développement
économique" reconnaît qu’il peut être nécessaire et avantageux aux
membres dont les économies sont au premier stade du développement et
ne peuvent maintenir que de faibles niveaux de vie, de prendre des
mesures sur les importations qui leur permettent d’adopter des
programmes poussant à l’élévation de ce niveau de vie. (modification
ou retrait de concessions ; limitation des importations en raison de
difficultés avec la balance des paiements ainsi que l’aide
gouvernementale pour l’installation d’une industrie locale). Alors que
certains pensaient que cet article fonctionnait correctement, d’autres
pensaient qu’on avait besoin de s’assurer qu’il servirait bien le
développement économique. Un autre problème posé dans le débat était
le rôle du FMI, certains s’inquiétant que le FMI ne s’immisce dans les
travaux du Comité en lui offrant plus de prescriptions que d’analyses.

Obstacles techniques au Commerce : (OTC)

Les deux sujets OTC liés à la mise en ouvre n’ont pas beaucoup
progressé en 2002. Des travaux sont en cours devant son Comité. 2
propositions sont présentées : que mandat soit donné pour
l’assistance technique et la coopération pour que les PED appliquent
les règles OTC ; Adhésion volontaire aux normes OTC dans les marchés
d’exportation des pays développés.

Mesures sur l’Investissement :

Les réunions du Conseil du Commerce des Marchandises en 2002 et 2003
ont montré des divergences profondes. Une proposition de l’Inde et du
Brésil cherche à ré ouvrir des espaces aux PED en utilisant certaines
mesures sur l’investissement dans leurs stratégies de développement.
Le blocage tourne autour de l’interprétation à donner au mandat de
mise en ouvre. Les pays développés considèrent les propositions comme
impliquant une re négociation des Accords, allant ainsi bien au delà
du mandat de Doha sur le sujet Les PED voient au contraire tous les
sujets de mise en ouvre en phase de négociation et estiment donc
qu’un mandat pour rectifier les déséquilibres dans l’Accord existe.

Au coeur du débat se trouve la définition de "restriction commerciale"
et "distorsion commerciale". L’Inde et le Brésil disent qu’au lieu de
traiter directement les effets négatifs supposés sur le commerce de
l’accord sur les investissements, celui-ci a simplement interdit les
mesures réputées être en contradiction avec les principes du
Traitement National et de l’interdiction des Quotas

Sauvegarde :

Le rapport de son Comité en janvier 2003 fait état de son incapacité à suggérer une ligne d’action en raison de l’absence de consensus.

Une proposition changerait le niveau de minimis (celui sous lequel aucune action ne peut être entreprise) des mesures de sauvegarde appliquées sur les importations en provenance des PED qui passerait de 3 à 7 % des importations à titre individuel et de 9 à 15 % à titre
collectif.

Mesures Sanitaires et Phytosanitaires :

L’équivalence des différentes mesures en matière de sécurité alimentaire et de santé animale et végétale (acceptation mutuelle des mesures pour limiter les risques prises par un autre membre même si son procèdé est différent) est une des questions de mise en ouvre qui est généralement considérée comme réglée.

V - Commerce, Dette et Finance

"Nous soutenons l’examen, dans un Groupe de travail placé sous l’autorité du Conseil Général, de la relation entre commerce, dette et finance, et de toute recommandation sur les actions à entreprendre
dans le cadre du mandat et de la compétence de l’OMC, pour améliorer la capacité du système commercial multilatéral à contribuer à une solution durable au problème de l’endettement extérieur des PED et PMA
et pour renforcer la cohérence des politiques commerciales et financières internationales en vue de protéger le système commercial multilatéral des effets de l’instabilité financière et monétaire. Le Conseil Général fera un rapport à la 5e Conférence sur les progrès réalisés par l’examen." (§36 de la Déclaration de Doha)

Malgré son rapport évident avec l’avenir du système commercial multilatéral, les liens entre commerce, dette et finance pourraient
s’avérer un sujet qui ne serait pas considéré comme un sujet à Cancun.
Certains s’interrogent même sur l’utilité de poursuivre les discussions sur ce chapitre. A Doha les ministres ont reconnu que "les défis [auxquels les membres ont à faire face] ne peuvent être réduits à des décisions prises dans un cadre commercial uniquement". Ils ont décidé pour ce faire "de continuer à ouvrer avec les institutions de
Bretton Woods".

Les PED ont été ceux qui demandaient l’examen des liens entre ces
éléments, tentant de réduire la charge de la dette publique dans le
cadre multilatéral. Les pays développés le considèrent comme inutile
ou de peu d’intérêt en raison, avancent-ils, des limitations du
système commercial dans le traitement des problèmes de dette et de
finance nationales. Les discussions en sont restées jusqu’ici au
niveau théorique. Les 8 thèmes en ressortant, contenus dans le rapport
annuel du Groupe au Conseil Général à transmettre à Cancun, ne
devraient pas déboucher sur une prise de décision.
(http://www.france.attac.org/site/pa...)

Peu de propositions émanent de l’OMC. Par contre, le FMI, la Banque
Mondiale, l’OCDE, les banques régionales de développement en ont fait
de nombreuses. Si bien que certains ont pu se plaindre du peu de suivi
des délégués.

Relation entre Commerce et Finance :

L’argumentation de plusieurs PED est que le système multilatéral
devrait fournir suffisamment d’espaces politiques pour préserver leur
droit à adopter des politiques de développement leur permettant de
résoudre leur problème d’ajustement. Pour l’Indonésie, la
prépondérance du capital privé dans le système financier
international et sa forte influence sur les marchés financiers n’a pas
permis aux gouvernements de pouvoir se défendre contre les attaques
spéculatives. D’autres PED ont cité comme quelques unes des raisons de
l’instabilité financière des marchés internationaux, la fluctuation
des prix des produits de base, les taux de change et les taux
d’intérêt tout autant que des conditionnalités exagérées des
politiques commerciales imposées par les institutions financières. Les
pays développés ont invoqué une approche intérieure plus ouverte à la
libéralisation comme la meilleure solution pour résoudre les problèmes
financiers en temps de crise, estimant que cette libéralisation offre
une occasion (mais pas la garantie) pour une croissance économique
durable.

Cuba affirme que les principales préoccupations des PED portent sur
les fluctuations des taux de change, l’absence de ressource financière
pour développer le commerce et une réduction des incohérences entre
les politiques commerciales et celles macroéconomiques menées par le
FMI. (http://www.france.attac.org/site/pa...).

Relations entre Commerce et Dette :

Presque tous les PED admettent que l’accès au marché pour leurs
produits est l’instrument essentiel pour résoudre les problèmes
d’endettement externe. Le Venezuela, le Brésil, l’Inde et l’Egypte
ont appelé à une politique multilatérale sur les produits primaires,
soulignant que les avantages comparatifs et la compétitivité des PED
sont remis en question par des règlements portant sur les droits de
douane comme sur les obstacles non tarifaires.

Le groupe des pays africains a fait une proposition globale pour un
accès au marché des produits d’exportation les intéressant, un soutien
financier pour traiter les problèmes de distribution commerciale et
une politique de réduction des risques de taux de change et de
volatilité des prix des produits de base et pour que le groupe de
Travail s’engage à élaborer un calendrier de réduction de la dette
avec les Institutions de Bretton Woods.
(http://www.france.attac.org/site/pa...).

L’UE a répondu que si l’accès au marché était important, il était
nécessaire de le compléter par une réforme de l’offre et que le rôle
de l’OMC pour résoudre les problèmes de développement ne devait pas
être surestimé.

L’Argentine a déclaré que le Groupe de Travail devrait analyser les
façons grâce auxquelles le système commercial multilatéral pourrait
permettre aux PPTE (Pays Pauvres Très Endettés) d’accroître leurs
exportations. Pour Cuba, un accès préférentiel devrait être accordé
aux PMA ayant adopté un Programme Stratégique de Réduction de la
Pauvreté de la Banque Mondiale
(http://www.france.attac.org/site/pa...).

Incohérence entre Commerce multilatéral et IFI :

La Corée a présenté un exemple de ce manque de cohérence tiré de sa
propre expérience. Bien qu’en théorie, les politiques du FMI
permettent l’intervention des gouvernements pour mettre à l’abri leurs
institutions financières en cas de crise, la Corée, soutenue par le
FMI, dût injecter 125 Milliards $US pour restaurer son système
financier, pendant que l’UE a pris l’initiative de déposer plainte
devant l’OMC, sous le prétexte que ce soutien valait subvention
pouvant faire l’objet de poursuites.

VI - Traitement Spécial & Différencié.

17 mois éprouvants et 3 dates butoirs prévues dans le mandat et non
respectées alors que le tout devait durer 9 mois seulement ! La
réforme des dispositions du traitement spécial et différencié (TS&D)
jouera à coup sûr l’aiguillon central à Cancun (au même titre que les
questions de mise en ouvre et sur l’agriculture).de révélateur à la
véracité de l’agenda du "développement" de Doha auquel il est si
souvent fait appel. Le Président du Conseil Général s’active pour
trouver un accord sur un premier "paquet" de mesures à prendre à
Cancun. Si un consensus avant Cancun ne peut être trouvé, ce sera de
la responsabilité des ministres d’y parvenir. Comment et selon quel
échéancier feront-ils progresser le mandat de Doha d’incorporer le
TS&D dans l’architectures des règles de l’OMC ? C’est une des
questions à laquelle les PED espèrent recevoir une réponse avant que
Cancun ne se soit achevé.

Si le projet de Déclaration ministérielle actuel peut fournir une
indication, la session spéciale du Comité sur le Commerce et le
Développement (CCD) devrait reprendre ses travaux sur toutes ces
questions, avec son mandat de présenter un rapport sur les progrès
accomplis à la 6e Conférence Ministérielle. La question essentielle
sur le TS&D est de savoir si les PED désirent ou seront obligés de
"payer" une troisième fois pour accorder un nouvel échéancier et un
mandat précis.

Pour beaucoup de délégués des PED, la question des tractations (TS&D
contre avancée en matière agricole par exemple) ne se pose même pas.
L’Afrique et les PMA, qui sont le plus intéressés au TS&D, l’ont
demandé de façon univoque et, pour l’heure, ne s’arrêteront
vraisemblablement pas en chemin. Pourront-ils soutenir les pressions
qui iront de pair avec les avancées sur le programme de travail ? A
cet égard un engagement effectif et réaliste de la part du plus grand
nombre possible de PED en faveur d’un traitement plus favorable sera
de la plus haute importance.

Les problèmes en jeu :

Bien qu’on accepte généralement d’accorder aux pays ayant un niveau de
développement faible un traitement plus favorable, la forme et le
contenu que ce traitement doit prendre demeurent fortement débattus.

Les 155 dispositions S&D éparpillées dans l’ensemble des accords de
l’OMC forment le cour de ce que l’on considère comme la dimension
"développementale" du système commercial multilatéral.. Sous l’Uruguay
Round, le concept a évolué : d’un système établissant des "espaces
autorisant une politique de développement" basé sur des critères
économiques, on est passé à un système de dérogations aux règles,
limité dans le temps, avec des engagements de réduction des droits de
douane et des subventions et de paliers plus généreux dans
l’application des règlements pour la défense du marché, tels les
droits de contre-mesures et d’anti-dumping. On peut dire en
conséquence que le TS&D a évolué passant d’un instrument de
libéralisation du commerce soutien du développement (dans le GATT) à
sa manifestation actuelle à l’OMC d’instrument aidant les PED à
développer leurs capacités légales et institutionnelles pour répondre
à leurs obligations dans la libéralisation du commerce.

Le marché en échange de l’acceptation de cette transformation du TS&D,
outre les mesures contraignantes prises dans des secteurs qui étaient
à l’origine sur option (subventions, droits anti-dumping, obstacles
techniques au commerce.), et les nouvelles obligations sur les droits
de propriété intellectuelle, les services et les investissements, a
combiné le plus grand accès au marché pour les produits alimentaires
et les textiles et des dispositions mûrement réfléchies sur le TS&D.
On s’attendait à ce que ceux-ci fournissent des dérogations
suffisantes aux nouveaux règlements et établissent des obligations
pour les pays développés en matière d’assistance technique et d’accès
préférentiel au marché afin que, théoriquement, les PED bénéficient
davantage des échanges commerciaux. Pour la grande majorité des PED,
cette expectative ne s’est pas matérialisée en pratique, car la
plupart des dispositions TS&D ne sont pas formulées selon le mandat et
ne sont donc pas applicables selon les procédures du règlement des
différends nouvellement renforcées.

Le Comité CCD devait remettre son rapport au Conseil Général le 31
juillet 2002 en donnant, sur les articles relevant de son mandat, des
recommandations très claires pour une prise de décision afin de
réformer "toutes les dispositions TS&D en vue de les renforcer et de
les rendre plus précises, efficaces et opérationnelles". (§ 44 de
Doha). Cette date butoir n’a pu être respectée à 3 reprises (juillet
et décembre 2002 ; février 2003). Depuis aucun autre échéancier n’a été
établi.

Bien que le mandat originel attribue le TS&D à la Session Spéciale
(SS) du CCD, le sujet est traité par le Conseil Général, l’organe de
décision à l’OMC le plus élevé. Face aux divergences d’opinions
fondamentales, le SS-CCD a, en février 2003, adopté par consensus un
rapport qui demandait notamment au Conseil Général de clarifier son
mandat et de fournir les moyens légaux et pratique de lui donner plein
effet. Mais les USA, l’UE et l’Australie ayant bloqué son adoption par
le Conseil Général, celui-ci a renvoyé le sujet à une date ultérieure
pour permettre à son nouveau Président d’entreprendre des
consultations pour savoir comment procéder. Après consultations,
celui-ci a suggéré que "la meilleure manière de permettre des avancées
était de traiter toutes les propositions (88) et de les répartir en
catégories. La clarification du mandat demandée n’interviendrait pas,
les principales puissances commerciales ayant dit au Président que
cela ne mènerait nulle part. Un certain nombre de PED ont émis de
sérieuses réserves face à l’abandon de cette requête. D’autant que le
procédé employé par le Président, similaire à celui qui avait été
rejeté fin 2002, posait problème concernant notamment les propositions
renvoyées aux organes subsidiaires et ainsi exposées à des
marchandages. Dans un esprit de conciliation pour sortir de l’impasse,
les PED ont accepté la proposition de leur présidence.

En Mai 2003, une liste répartissait les 88 propositions en 3 catégories : 38 sur lesquels un accord était possible avant ou au
moment de Cancun ("early harvest package") ; 38 autres qui étaient
renvoyées aux organes concernés avec dépôt d’un rapport juste avant
Cancun avec possibilité de leur inclusion éventuelle dans la première
catégorie ; enfin 15 propositions, sur lesquelles le consensus était le
plus difficile à atteindre et pour lesquelles on devrait examiner
comment les ré écrire sans en modifier le concept. Des différences
d’opinion dans la 1ere Catégorie demeurent et une "première récolte"
n’est pas encore en vue, malgré le soutien des "Amis du Président"
(Brésil, Kenya, Bengladesh, USA, UE et Norvège), qui ont fait circuler
différentes versions de modifications de forme.

Les problèmes soulevés par les PED proviennent du fait que les textes
ne reflètent pas fidèlement le contenu des discussions ni les
objectifs des propositions d’origine. Cela a aussi été à l’origine de
l’échec pour résoudre un des derniers blocages à lever, à savoir la
non automaticité des exceptions ou de l’assistance à accorder aux PED.
Dans un commentaire, un délégué africain à déclaré que les PED "ferait
mieux d’oublier" l’ "accord" obtenu sur 15 propositions qui
n’offraient aucun intérêt en termes économiques réalistes.

Au sujet des 38 propositions de la 2e Catégorie, un observateur a
résumé la situation en déclarant que jusqu’ici" rien de concret"
n’avait été réalisé.

Quant aux propositions sur la 3e Catégorie, un PED, début août,
indiquait que "pas une seule discussion.ne s’était tenue jusqu’ici".

L’impasse :

Les différences qui ont séparé les délégués et ont été au centre des
discussions portaient sur la signification exacte du mandat sur le
TS&D. Ce débat est lié à celui plus général de savoir si les
déséquilibres systémiques qui sont perçus doivent être traités en
prenant en compte la réciprocité (l’échange de concessions
similaires).

La plupart des PED affirment que le mandat donné à Doha est d’engager
des négociations préalables. Agir ainsi exige des modifications
réfléchies dans leur forme aux Accords de l’OMC et vraisemblablement
aux droits et obligations de ses membres. Ceci ne devrait pas être
considéré comme de nouvelles négociations, entraînant des marchandages
sur d’autres sujets sensibles (agriculture ou investissements).

Les pays développés, quant à eux, ont déclaré que le mandat sur le
TS&D n’engage pas de nouvelles négociations. De leur point de vue,
cela implique qu’aucun changement qui modifierait fondamentalement
l’équilibre entre les droits et obligations des membre ne peut
intervenir dans la réforme actuelle. Toute tentative dans ce sens
relève de la responsabilité de l’organe de négociation concerné.( pour
le TS&D en matière de règlements sur les subventions, par exemple,
c’est le Groupe de Négociations sur les Règlements de l’OMC) où des
tractations pourraient avoir lieu. La position de ces pays, quant à la
façon de procéder à l’intérieur du mandat sans accepter de
modifications importantes à la forme des textes, demeure floue. C’est
la réponse à cette question que les PED espéraient d’une clarification
émanant du Conseil Général. Les pays développés ayant décidés de faire
la sourde oreille à cette demande, au moins d’ici Cancun, il est peu
probable que le gouffre séparant les membres puissent être comblé
avant longtemps. On se sait pas jusqu’où les PED ont l’intention de
"payer" pour obtenir cette clarification.

Certains pays développés ont indiqué que le résultat de la réforme
restera limité en l’absence de critères d’éligibilité. Ils s’opposent
par exemple au fait que le Brésil et le Honduras (tous deux considérés
comme des PED) soient éligibles pour l’obtention des avantages du TS&D
sur le même pied (A l’OMC, les PED, pour lesquels n’existe aucune
définition explicite, sont auto-désignés, bien que la définition des
PMA suivent les critères de l’ONU). Ce débat est central quant à la
résolution des controverses les plus importantes sur le TS&D (Quel
assouplissement,, pour combien de temps pour quel pays ?). En résumé
la plupart des PED maintiennent que le renforcement des dispositions
spécifiques sur le TS&D est l’unique aspect du mandat de Doha et que
le programme de travail actuel ne devrait se limiter qu’à cela.

Un Mécanisme de contrôle ? :

La seule proposition acceptée dans le rapport de fin juillet 2002
porte sur la création d’un "mécanisme de surveillance et de contrôle".
Le rapport ne dit rien cependant sur son rôle et sur son début
d’application, un des points de divergence entre délégués. Pour les
PED, le mécanisme doit servir à contrôler la réalité de la réforme
actuelle et future du TS&D, opérant comme un organe subsidiaire du
Comité S&D qui doit fournir ses rapports au Comité Commerce et
Développement., et qui pourrait faire des recommandations directement
au Conseil Général.

Les pays développés considèrent que le mécanisme doit entrer en
vigueur immédiatement et contrôler la réalité du TS&D par
l’intégration des membres dans le système commercial multilatéral
ainsi que les éléments de propositions renvoyées dans les divers
organes. Les USA ajoutent que ce mécanimse devrait également assurer
une plus grande cohérence entre l’OMC et les institutions
internationales concernées.

Contact pour cet article : Omc.marseille@attac.org

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