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Sommer Gentry préfère désormais emprunter le train pour ses déplacements, plutôt que prendre l’avion. Et elle n’est pas la seule : les fouilles au corps effectuées par les agents des aéroports américains dans le cadre du renforcement des mesures de sécurité ont pris un tour « humiliant » et « profondément choquant » aux yeux de nombreuses voyageuses.
Par Erin McClam
Associated Press. New York, le 30 novembre 2004
Au total, l’Administration chargée de la sécurité dans les transports (TSA) a annoncé avoir reçu 250 plaintes depuis l’entrée en vigueur des nouvelles procédures le 22 septembre. Ces mesures exigeant des fouilles plus fréquentes et plus minutieuses font suite à la mort de 90 personnes tuées dans deux accidents d’avion en Russie, qui auraient été causés par l’explosion d’engins embarqués par des passagères tchétchènes.
Chaque plainte fait l’objet d’une enquête et « nous prendrons le cas échéant des mesures appropriées », a souligné Amy Von Walter, sans fournir de détails sur le sexe des plaignants.
En attendant, les pratiques consistant à palper les passagers avant leur montée dans l’avion indignent de nombreuses voyageuses. Sommer Gentry, une étudiante de l’Institut de technologie du Massachusetts, le fameux MIT, qui a été soumise plusieurs fois à des fouilles au corps, confie ainsi s’être sentie « sale et honteuse » : « Cela va chaque fois en empirant. Maintenant, j’ai peur ».
Rhonda Gaynier, une avocate new-yorkaise de 46 ans, a elle carrément porté plainte auprès de la TSA après avoir subi une fouille en présence des autres passagers à la mi-octobre. Un agent de sécurité, qui lui avait demandé de se mettre de côté pour une fouille plus approfondie, l’a touchée aux épaules, sous les bras, autour de la taille, au travers de son soutien-gorge et entre les seins. « J’étais pratiquement en larmes », raconte-t-elle. « Je n’ai jamais été autant humiliée de ma vie. C’est l’une des pires expériences que j’ai vécues ».
Conformément aux nouvelles règles, les agents peuvent sélectionner des passagers à partir « d’observations visuelles » même si les détecteurs d’objets métalliques ne se déclenchent pas à leur passage. D’autres voyageurs sont choisis au hasard par ordinateur, leurs cartes d’embarquement comportant la marque « SSSS » comme dans le cas de Rhonda Gaynier. Enfin, des passagers peuvent avoir une carte barrée des lettres « SSSS » en raison de leur « comportement », tel un paiement en liquide ou des achats fréquents de billets aller simple, explique un responsable de la TSA sous couvert de l’anonymat.
Il est stipulé que les passagers peuvent demander à être fouillés en privé et par un agent du même sexe qu’eux (Sommer Gentry et Rhonda Gaynier disent avoir eu affaire à des femmes) et que les agents doivent seulement utiliser le dos de la main quand ils touchent des zones sensibles. Mais des groupes de juristes affirment que ces règles ne sont jamais respectées.
Les palpations pourraient être rendues obsolètes par la mise en place de nouvelles machines actuellement testées dans six aéroports américains. Elles aspirent l’air autour des passagers et détectent rapidement des substances explosives. Mais ce projet a deux ans de retard, selon John Mica, président -républicain- de la sous-commission de l’aviation à la chambre des Représentants. Pour le moment, dit-il, « nous n’avons pas beaucoup d’autres options que de palper les gens pour détecter les explosifs ».
Rhonda Gaynier, elle, a appris que des Américaines refusent les fouilles mais que nombre disent être effrayées ou embarrassées à l’idée de se plaindre. « Après les attentats du 11 septembre 2001, nous en sommes tous venus à accepter un certain degré d’intrusion et de désagrément », observe-t-elle. « Mais quand on veut me tripoter, il vaut mieux avoir une sacrée bonne raison, et ils n’en ont pas ».