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La direction du Congrès du Nicaragua a été destituée hier après s’être opposée à la levée de l’immunité de son président, l’ex-chef de l’État Arnoldo Aleman poursuivi pour corruption, et des milliers de sandinistes ont manifesté leur soutien à ce vote devant le parlement.
Au cours de la session, à laquelle ne participaient que 48 des 92 députés, le libéral Jaime Cuadra, dont la formation est opposée à M. Aleman et favorable à la lutte contre la corruption lancée par l’actuel président Enrique Bolanos, a été désigné nouveau président du Congrès monocaméral.
La destitution de la direction, composée de sept membres, a été votée par 47 des 48 présents lors de cette session convoquée par une minorité de députés libéraux proches du pouvoir et 38 du Front sandiniste de libération nationale (FLSN-gauche, opposition).
Sur les sept membres, seul le sandiniste René Nunez a conservé son poste de troisième vice-président.
Arnoldo Aleman, qui a dirigé le pays de 1997 à janvier 2002, ainsi que ses 44 députés n’ont pas assisté à la session, au cours de laquelle les parlementaires ont formé une commission de quatre membres pour organiser l’élection de la nouvelle direction.
Le président destitué, réuni avec ses députés au siège du Parti libéral constitutionaliste (PLC, droite), a qualifié la destitution de « coup d’État ». Il l’a jugée « totalement nulle » et « illégale », en annonçant son intention de faire appel devant la Cour suprême.
Le député sandiniste et ex-président Daniel Ortega, chef de la deuxième force parlementaire, a rejeté cette position, estimant que la décision du Congrès est « souveraine » car votée par une majorité composée de 38 sandinistes, neuf dissidents libéraux et un conservateur.
L’une des filles de M. Aleman, la députée suppléante Maria Dolores Aleman, également sous le coup d’une demande de levée d’immunité pour corruption, s’est réfugiée au Costa Rica avec ses deux filles, selon le sous-directeur des services de migrations, Jesus Castillo.
« Ma fille est partie. Elle bénéficie de l’immunité et on ne l’en privera pas », a affirmé M. Aleman.
Selon les autorités, l’ex-chef de l’État et sa fille sont des associés de la Fondation démocratique nicaraguayenne (FDN). La FDN est mentionnée parmi les entités ayant encaissé près de 100 millions de dollars de fonds publics détournés sous l’administration Aleman, et transférés sur des comptes privés de l’ancien président et de ses proches.
Le climat était tendu hier à Managua et un impressionnant dispositif de policiers antiémeute et de troupes spéciales avait été déployé.
Quelque 20 000 sandinistes ont manifesté devant le Congrès pour exprimer leur soutien à la décision des députés et réclamer la levée de l’immunité de M. Aleman.
Selon Carlos Tunermann, juriste et membre du groupe d’observateurs Éthique et Transparence, « M. Aleman a le droit d’intenter un recours s’il croit qu’il y a nullité ou une quelconque irrégularité (...) En conséquence, il faut attendre de voir ce que dit la Cour à ce sujet ».
Il a toutefois souligné que « la direction destituée s’était mise en marge de la loi en refusant de répondre à une demande de la justice » et d’organiser un débat sur la levée ou non de l’immunité d’Arnoldo Aleman
Agence France-Presse, Managua. Le jeudi 19 septembre 2002