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17 septembre 2003

Les médias communautaires, symboles de la révolution bolivarienne

 

CAMUNARE ROJO TV, Première télévision paysanne du Continent Américain

Par Thierry Deronne
Risal

IMPRIMERLes mots du vieux paysan sont nets, clairs. « Une télévision communautaire, c’est un instrument de lutte sociale..." Il sèche ses larmes, reprend le souffle. "... un outil de développement culturel, si important pour nos peuples." Beaucoup se souviennent de cette entrevue d’un paysan aveugle par les participantes d’un atelier de télévision communautaire dans l’État de Yaracuy, Venezuela, diffusée par la chaîne publique vénézuélienne en mai 2003. En dix jours, douze habitantes de Camunare Rojo ont appris à manier la caméra et le son documentaires, à monter un programme, a enseigner ces techniques au reste de la communauté.

Redécouvrir Camunare Rojo. Ici fut Prudencio Vásquez, par ici est passé Zamora, ici nous parlons avec la déesse María Lionza avant de prendre la terre. Ici les montagnes vertes et bleues sont quelque chose de plus que des cartes postales - combien de luttes, de déroutes, de terres prises, perdues, reprises. Quelques semaines plus tôt une équipe de la Commission nationale des télécommunications (CONATEL)dirigée par l’ingénieur Alvin Lezama est allée a la rencontre de la communauté. Lezama avait promis cet atelier de formation audiovisuelle. Dans ses derniers discours comme directeur de CONATEL, Jesse Chacon [1] au mois de juillet avait été très clair face aux fonctionnaires : "Il est temps de faire tomber les murs de nos bureaux pour devenir instruments de la communauté ». Et dans l’assemblée, les visages attentifs sculptés par la faim, la pauvreté, ont exprimé leur concept de l’État : des terres, des coopératives, des fermes, des tracteurs et pourquoi pas a présent, une télévision communautaire.

30 août 2003. Face à la chapelle qui porte encore les traces des tirs de la police du gouverneur Lapi, les paysans de Camunare Rojo ont dressé une podium. A quelques mètres un mur fraîchement repeint rappelle les noms des paysans assassinés par les grands propriétaires et les polices de l’opposition. « Envahisseurs !, guérilleros ! » martèlent les grands médias vénézuéliens, qui ne se préoccupent même plus d’occulter leur complicité active avec le massacre. C’est un acte émouvant, les paysans ont attendu sous le soleil les délégués indiens et paysans de Bolivie, d’Équateur, du Honduras, du Guatemala et du Brésil. Ceux-ci marquent leur solidarité avec la réforme agraire vénézuélienne au moment ou celle-ci accélère le pas et se lance dans la remise d’un million d’hectares de plus que prévu en 2003. "Comment osent-ils nous apprendre à gouverner, ceux qui n’ont produit que la guerre et la mort ?" - la voix de Blanca Chancoso, dirigeante indienne de la CONAIE (Équateur) résonne dans la nuit pour dénoncer les manoeuvres de l’Empire. L’abrazo se resserre. Ce sont les mêmes visages fatigués mais le village de Camunare Rojo semble un peu plus joyeux à présent. Bientôt il recevra les terres, Ricaurte Leonett, nouveau président de l’Institut national des terres (INTI) le répète avec force au micro.

Au pied de l’estrade, les femmes de l’atelier de télévision communautaire, sereines, joyeuses, commentent les premières démarches réussies. Elles ont réuni un pot commun pour voyager à Caracas et remettre chacune des pièces légales requises par la Commission nationale des télécommunications. Déjà l’organisme a mesuré sur place la fréquence disponible. Elles tendent fièrement le dépliant où elles définissent les objectifs de Camunare Rojo TV : "redécouvrir le potentiel créateur de chacun des membres de notre communauté", "fortifier l’organisation comme base fondamentale de nos espoirs" et "promouvoir l’agriculture comme activité productive principale de notre municipalité".

"Dans ces actes nous sommes toujours ceux qui parlent d’en-haut, poursuit Leonett, mais dés que je suis arrivé ici beaucoup de personnes m’ont parlé, la prochaine fois ce sera notre tour de vous écouter ». De la nuit chaude montent des cris, des plaintes : les paysans parlent de terres qui ne leur ont pas été remises. En descendant du podium Leonett les écoute et leur répond au cas par cas, improvisant un bureau en pleine rue. INTI signifie soleil en quichua lui dit Chancoso, comme pour l’encourager. Elle a rapporté une chicha andine pour le président Chávez.

Créer ici la première télévision paysanne du continent : une belle avancée pour le mouvement paysan qui chaque jour davantage fait entendre sa voix et veut sortir de l’invisibilité, en Amérique latine et dans le monde. C’est pourquoi la communauté de Camunare, avec CONATEL, veut inaugurer Camunare Rojo TV dans le cadre de la première rencontre indienne-paysanne qui se réalisera à partir du 12 octobre au Venezuela.


NOTES :

[1]

Notes

[1Jesse Chacon a été nommé cet été ministre de la Communication et de l’Information.

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