Accueil > Les Cousins > Colombie > Les FARC défient les États-Unis pendant la visite de Powell
Agence France-Presse
Bogota
La guérilla des FARC a défié les États-Unis en pleine visite du secrétaire d’État Colin Powell à Bogota avec l’exigence de « retrait immédiat de la mission militaire américaine en Colombie », accusée de « violer sa souveraineté », dans un texte proposé mardi soir sur son site Internet.
Signé par Raul Reyes, porte-parole des Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC, marxistes), principale guérilla avec 17.000 hommes, ce texte est soumis à l’approbation du XIe forum de Sao Paulo, réuni de lundi à mercredi à Antigua (Guatemala).
Cette exigence a été rendue publique au moment où arrivait Colin Powell à Bogota, pour un séjour de moins de 24 heures, afin d’apporter le soutien de Washington au président Alvaro Uribe dans sa lutte contre la guérilla et le trafic de drogue.
Les FARC accusent dans le même texte le Haut commissaire à la paix, Luis Carlos Restrepo, de « mentir à la Colombie », dans « un accord contre nature avec l’ONU », à propos de la recherche d’un dialogue avec les rebelles. Dans un précédent communiqué publié lundi, les FARC avaient taxé le gouvernement « paramilitaire » du président Alvaro Uribe de « désintérêt total » face à un possible échange de prisonniers ».
800 civils, 23 politiques dont Ingrid Betancourt, ancienne candidate des Verts à la présidence, et 47 officiers de l’armée sont otages des FARC. Trois cents rebelles purgent des peines de prison.
Lors de son voyage à Bogota vendredi, Dominique de Villepin, ministre français des Affaires étrangères, avait déclaré, après un entretien avec le président Alvaro Uribe, que les autorités colombiennes « voulaient procéder à cet échange le plus rapidement possible ». « Nous sommes prêts à aider, à faciliter un échange humanitaire » de prisonniers, avait annoncé M. de Villepin, « mais (...) nous attendons un signal des FARC pour avancer », avait-il souligné.
La Colombie a reconnu le 15 novembre l’existence d’un projet sur l’envoi de guérilleros à l’étranger, y compris en France, dans le cadre d’un échange éventuel de prisonniers.
Le nouveau document des FARC réitère leur ancienne exigence d’une zone démilitarisée de quelque 115 000 km2, soit l’équivalent de l’Angleterre, dans les départements du Putumayo et du Narino, pour y entamer un nouveau dialogue de paix. Le document critique l’Union européenne (UE) pour les avoir incluses, « sous la pression du gouvernement américain », dans la liste des organisations terroristes.
Susceptible de retarder tout accord sur ce projet de libérations mutuelles, la mise au point des FARC survient au moment où Alvaro Uribe a obtenu un cessez-le-feu, effectif depuis dimanche, des paramilitaires d’extrême droite (10 500 hommes), et une poursuite des contacts avec l’autre guérilla de l’Armée de libération nationale (ELN, extrême gauche - 4500 hommes).
La visite de Colin Powell en Colombie coïncide avec le feu vert récent de Washington à l’utilisation, contre les rebelles du pays andin, du matériel militaire américain jusqu’ici réservé à la lutte anti-drogue. Dans le cadre du Plan Colombie, les États-Unis ont fourni à Bogota une aide de deux milliards de dollars pour éradiquer, par fumigations aériennes d’herbicides, 144 000 hectares de coca, matière première de la cocaïne.
Troisième destinataire de l’appui américain dans le monde, après Israël et l’Égypte, la Colombie a déjà reçu 79 hélicoptères, dont 16 Black Hawk, et pourra disposer de 500 conseillers militaires, dont certains sont déjà sur place et 300 civils.
La Colombie reste le premier producteur mondial de cocaïne, avec 580 tonnes par an, et fabrique également 7 tonnes d’héroïne chaque année. 80% de ces stupéfiants sont exportés vers les États-Unis.
La guerre civile en Colombie a fait plus de 200 000 morts depuis 1964, avec une moyenne de 3000 enlèvements de civils par an.