Accueil > Empire et Résistance > « Gringoland » (USA) > Le Pentagone reconnaît la profanation du Coran
En Jordanie, des centaines de manifestants ont tenu bien haut leurs exemplaires du Coran pour protester contre sa profanation.
Par Jérôme Bernard
Agence France-Presse. Washington, le vendredi 27 mai 2005
Soucieux de calmer la colère du monde musulman, le Pentagone a reconnu que le Coran a été traité avec « irrespect » à cinq reprises par des soldats américains à Guantanamo mais a vigoureusement démenti qu’un exemplaire du Livre saint ait été jeté dans les toilettes.
Le commandant du centre de détention de Guantanamo (Cuba), le général Jay Hood, a précisé jeudi à Washington que sur treize accusations de profanation, l’enquête de l’armée américaine a confirmé cinq cas qui « pourraient être considérés comme un traitement irrespectueux d’un Coran ».
Parmi ces cinq incidents, le Coran a été « très probablement » traité délibérément avec irrespect dans trois d’entre eux, alors que pour les deux autres, l’acte n’était « très probablement » pas délibéré, a indiqué le général.
Deux employés de la prison ont été sanctionnés pour l’instant, a-t-il ajouté, en précisant que les incidents ont eu lieu avant que des consignes strictes sur la manière de traiter le Coran n’aient été données à Guantanamo en janvier 2003.
Le Pentagone a ouvert cette enquête, qui n’est pas encore achevée, après la publication le 2 mai d’un article du magazine Newsweek qui rapportait, sur la foi d’un responsable américain anonyme, qu’un Coran a été jeté dans les toilettes. Sous la pression du gouvernement américain, le magazine avait désavoué son article, après que sa source eût reconnu ne pouvoir maintenir ses affirmations.
L’article de Newsweek a entraîné des émeutes en Afghanistan causant la mort d’une quinzaine de personnes et renforcé l’anti-américanisme dans le monde musulman.
Selon des documents du FBI (police fédérale) dévoilés mercredi par l’American Civil Liberties Union (ACLU), principale organisation américaine de défense des droits civiques, des détenus de Guantanamo se sont plaints de manière répétée de l’attitude irrespectueuse de leurs gardiens envers le Coran, l’un d’entre eux affirmant que le Livre sacré de l’islam avait été jeté dans les toilettes.
Dans un résumé d’entretiens datant du 1er août 2002, ce détenu raconte à un enquêteur du FBI avoir été maltraité par ses gardiens. « Leur comportement est irrespectueux. Il y a environ cinq mois les gardiens ont battu des détenus. Ils ont jeté dans les toilettes le Coran. Les gardiens dansent autour des détenus quand ils essaient de prier », relatent les documents.
Cette accusation n’avait à l’époque pas fait l’objet d’une enquête car elle n’était pas jugée crédible par le Pentagone.
Les premières conclusions de l’enquête ne montrent « aucune preuve crédible » confirmant cette accusation, a déclaré jeudi le général Hood. Les enquêteurs sont allés interroger le détenu qui a affirmé cela et il a déclaré qu’il « n’a pas vu mais entendu dire que des gardiens ont commis » des profanations, a affirmé le général. Ce détenu « a dit que cela ne s’était pas passé », a insisté le porte-parole du Pentagone, Lawrence DiRita.
Le général Hood a également affirmé que l’enquête avait identifié « 15 incidents où des détenus ont traité irrespectueusement ou de manière inappropriée leur propre Coran ». Dans un des cas, un détenu a « déchiré » des pages du Livre sacré, a-t-il dit.
Vendredi, au Pakistan, allié-clé des États-Unis, plusieurs dizaines de milliers de personnes ont manifesté dans toutes les grandes villes réclamant des excuses publiques des autorités américaines et des sanctions exemplaires contre ceux qui sont impliqués dans ces incidents.
Des manifestations ont aussi été organisées en Égypte et en Jordanie à l’appel des Frères musulmans.