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14 mars 2009

La doctrine
de la "légitime défense" que promeut Santos pour la Colombie, n’est pas de lui mais d’Hitler.

par Antonio Caballero

 

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La doctrine de la "légitime défense" de Santos n’est pas de lui, ni d’Uribe, ni de Bush et ni même d’Israël. Son vrai inventeur est Adolphe Hitler

Au gouvernement d’Alvaro Uribe seul importe ce qu’on appelle « sécurité démocratique », et cela se réduit à la guerre d’anéantissement contre les Farc. C’est pour cela que le Président a été choisi et réélu et qu’au cours de ces six années, il n’a pas encore réussi, après avoir annoncé, et sans doute cru qu’il l’obtiendrait en dix-huit mois. Par aveuglement. Pour ne pas vouloir voir, pour ne pas pouvoir voir (son idéologie l’en empêche) que le problème n’est pas exclusivement militaire, mais social, économique et politique. À cause de cette cécité volontaire et obsédante importe seulement à Uribe, je le dis, la « sécurité démocratique », et il lui consacre toutes ressources et en fait dépendre toutes les autres fonctions de l’État : la justice, l’économie, et, bien sûr, la diplomatie.

C’est pourquoi, sauf dans de rares occasions où il s’est trouvé forcé d’accepter la collaboration d’un gouvernement étranger pour quelque chose en relation au conflit armé - l’aide du vénézuélien ou du français dans les libérations d’otages, par exemple - la diplomatie d’Uribe n’a eu qu’un seul point d’attention : les États-Unis. Plus précisément encore, le gouvernement que présidait George W. Bush. Il ignore le Congrès étasunien, et le parti démocrate, quand celui-ci était dans l’opposition, il le méprisait. Il ne s’est pas encore remis - et il doit être le seul et unique qui n’avait jamais prévu cette possibilité - de l’élection de Barack Obama. Le reste n’existe même pas : les voisins - le Venezuela et l’Équateur - ni l’OEA, ni l’ONU : des organisations gênantes, comme il le croyait avec Bush, "insignifiants". Ni la Suisse, ni la Chine : personne. C’est pourquoi il utilise la Chancellerie (ministère des affaires étrangères) et le service extérieur comme un éboueur. Seuls les Etats-Unis comptent, qui financent en grande partie la guerre ; et, pour l’encouragement, Israël, qui lui donne le ton. La doctrine.

Le ministre de la Défense Juan Manuel Santos a dit, il y a quelques jours, que poursuivre le groupe de guérilleros hors des frontières « est un acte de légitime défense et une doctrine de plus en plus acceptée par la communauté et le droit international ». Il n’en est pas ainsi. Au contraire : de moins en moins. Cette doctrine ne l’accepte même plus celui qui l’a le plus utilisée, qui est le gouvernement des États-Unis : elle a été explicitement repoussée par Obama quand il a remplacé Bush, ce qui est arrivé en grande partie à cause de l’extrême solitude et discrédit dans lesquels cette doctrine avait plongé son pays. Seul Israël la pratique, mais sans l’acceptation mais la réprobation presque universelle ; et il peut se permettre ce luxe seulement parce que les États-Unis lui donnent son appui indéfectible, comme une mère à son fils viveur. La pratique d’Israël, criminel et irresponsable, aujourd’hui en Palestine, hier au Liban, peut-être demain en Iran, et dans tous les cas avec des résultats contreproductif : augmentation du terrorisme arabe, sentiment anti-israélien et anti-étasunien.

Quand Uribe a aussi voulu la pratiquer à travers son ministre Santos, il y a un an dans le bombardement du campement de « Raul Reyes » en territoire équatorien, et qu’il l’a fait défendre par bouche de son chancelier (ministre des affaires étrangères) de l’époque Fernando Araujo, tous les pays américains (sauf les États-Unis de Bush) l’ont censurée unanimement. Jusqu’au point où le Président s’est trouvé obligé de signer à Saint-Domingue, en rang avec tous ses collèges d’Amérique Latine avalant sa rage, une condamnation explicite de la violation des frontières d’autrui.

La doctrine discréditée que Santos propose maintenant, n’est pas seulement sienne. C’est aussi celle d’Uribe. Qui feint de désavouer son Ministre et de « lui tirer les oreilles », comme dit la presse, et l’oblige à rencontrer le Chancelier pour qu’ils fassent les paix. (Une digression : ils n’ont pas honte ces ministres d’Uribe que leur patron les traite comme des enfants, ou parfois comme des chiens ? N’ont-ils pas de dignité ? Mais cela oui : ils ne démissionnent pas jusqu’à ce qu’il les jette dehors). Il lui tire les oreilles ce que le Ministre accepte avec soumission, reconnaissant : on dirait ministre cubain. Mais ensuite il le confirme à son poste et le prie instamment à continuer d’accomplir son « travail réussi », d’imposer la « sécurité démocratique » faite des bombardements à la frontière et de « faux positifs » à l’intérieur, des récompenses et des pots-de-vin, de mains coupées et d’opérations « Échec » montées, des disparitions et des exécutions extrajudiciaires, d’espionnage des adversaires et même des partisans, y compris Santos lui même : auto écoutes téléphoniques.

Ainsi la doctrine Santos de la « légitime défense » n’est pas de Santos. Mais bien qu’elle soit d’Uribe, ce n’est pas non plus une invention d’Uribe. Ni de Bush. Et ni même d’Israël. Tous l’ont pratiquée, résumée dans une formule brutale et sans scrupules : tout est permis. Mais son vrai inventeur est autre : Adolphe Hitler.

Et même pas Hitler cela ne lui a pas réussi.

Traduction de l’espagnol pour El Correo de : Estelle et Carlos Debiasi.

Semana . Colombie, le 7 Mars 2009.

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