Portada del sitio > Los Primos > Colombia > L’affaire Betancourt : Les «pressions» de Paris «exaspèrent» la Colombie
Por Jacques Thomet
Agence France-Presse. Bogota, Le jeudi 12 février 2004.
Les «pressions» de Paris dans l’affaire Betancourt «exaspèrent» la Colombie, qui a renoncé de justesse à rappeler son ambassadeur en France mercredi, a révélé une haute source diplomatique colombienne à l’AFP.
La tension entre les deux pays a atteint un niveau sans précédent dans un échange diplomatique épistolaire conclu par les excuses de la France, après les mises en cause du président Alvaro Uribe par un diplomate français, Fabrice Delloye, ex-mari d’Ingrid Betancourt.
«L’affaire Betancourt affecte les relations entre la France et la Colombie», a affirmé à l’AFP cette source, qui a requis l’anonymat. «Cette exaspération ne cesse de grandir, et nous étions à deux doigts de rappeler à Bogota Miguel Gomez, notre ambassadeur à Paris», a ajouté ce haut fonctionnaire avant de qualifier cette intention de «signal fort».
Une telle décision, d’une évidente gravité dans les relations diplomatiques, n’a finalement pas été prise «grâce à la rapide réponse de Dominique de Villepin», ministre français des Affaires étrangères, selon la même source.
«La France ne fait que nous mettre la pression, mais ne nous aide pas», a souligné le haut fonctionnaire colombien, avant d’inviter à nouveau Paris à dire s’il est «disposé à recevoir en France les guérilleros des Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC)», en cas d’échange entre les otages des rebelles et leurs militants détenus.
Depuis 2002, la Colombie a proposé à la France d’accueillir dans l’Hexagone les quelque 300 militants des FARC emprisonnés en Colombie, en échange de la libération par les rebelles de leurs quelque 900 otages, dont Ingrid Betancourt, 20 élus colombiens, 47 militaires, 3 Américains et 800 civils.
La prise en otage de la Franco-colombienne Ingrid Betancourt n’a que «trop duré», avait déclaré mardi le porte-parole du ministère français des Affaires étrangères, avant d’inviter Bogota à un «geste» humanitaire.
«Le France doit comprendre que les ravisseurs (d’Ingrid Betancourt), ce sont les FARC, et pas le gouvernement colombien, décidé à un tel accord humanitaire, mais à des conditions claires», a insisté ce haut fonctionnaire.
Alvaro Uribe exige la libération de tous les 900 otages, contre celle des 300 guérilleros en prison à condition qu’ils ne «reprennent pas les armes ou soient hébergés dans un pays ami», comme la France.
Les FARC limitent dans cette hypothèse leur concession à la libération des otages politiques, militaires et américains à l’exclusion des civils, contre celle de tous leurs 300 coreligionnaires détenus.
Le refroidissement des relations entre Paris et Bogota a été accéléré par les attaques de Fabrice Delloye contre le président colombien. Elles «ne sont pas acceptables», a écrit Dominique de Villepin dans une lettre mercredi à Miguel Gomez, dont l’AFP a obtenu une copie à Bogota.
Cette missive répondait à une lettre de Miguel Gomez la veille à M. de Villepin, dont l’AFP s’était également procuré une copie à Bogota, pour manifester à la France sa «plus énergique protestation au nom de son gouvernement», face aux déclarations «inacceptables» de Fabrice Delloye, qualifiées «d’offense à la personne du chef de l’État».
Les accusations de Fabrice Delloye faisaient allusion à l’affaire du Hercules C-130 de l’armée française, venu en vain le 9 juillet dernier à Manaus, capitale brésilienne de l’État d’Amazonie, pour récupérer la célèbre otage, après des informations fournies aux Betancourt par Bogota.
Deux ans après l’enlèvement de l’ex-candidate des Verts à la présidentielle colombienne, Alvaro Uribe avait été accusé mardi par son ex-mari, dans le quotidien français Le Monde, d’avoir «manipulé» la famille Betancourt, puis refusé de négocier avec les FARC sa libération.
Séquestrée par les FARC le 23 février 2002, Ingrid Betancourt, 42 ans, a eu deux enfants, Mélanie et Lorenzo, de son mariage avec Fabrice Delloye. Elle s’est remariée depuis avec un Colombien, Juan Carlos Lecompte.
Photo AP