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6 juin 2005

L’administration du président George W. Bush multiplie les attaques contre Amnistie internationale

 

L’administration du président George W. Bush multiplie les attaques contre Amnistie internationale en réaction au rapport annuel de l’organisation de défense des droits de l’homme, qui dressait un parallèle entre la prison militaire de Guantanamo et le goulag soviétique.

Par Marc Thibodeau
La Presse, le 4 juin 2005

Amnistie internationale dans la mire de la Maison-Blanche

Le rapport 2004, diffusé il y a 10 jours, met l’accent en introduction sur les États-Unis en soulignant que les mesures employées dans le cadre de la « guerre au terrorisme » (détention à long terme et sans procès de présumés terroristes à Guantanamo et ailleurs, transfert de détenus vers des pays pratiquant la torture, pratiques d’interrogatoire abusives et humiliantes, etc.) favorisaient les atteintes aux droits de la personne et confortaient les régimes répressifs de la planète.

Plusieurs ténors de l’administration, y compris le président lui-même, le vice-président Richard Cheney et la secrétaire d’État, Condoleezza Rice, ont indiqué lors d’interventions distinctes que le rapport était « absurde ».

Les médias et les blogues conservateurs se sont aussi mis de la partie en cherchant à ridiculiser l’organisation internationale, souvent en insistant sur le parallèle qu’il fait avec le goulag.

Le Wall Street Journal, dont la page éditoriale est habituellement en phase avec les tenants de la ligne dure de l’administration Bush, a affirmé que les accusations d’Amnistie internationale étaient similaires à « de la propagande d’Al-Qaeda ». « Un groupe de défense des droits de l’homme incapable de faire la différence entre les camps de la mort de Staline et les camps de détention pour des terroristes qui tuent des gens ne peut pas être pris au sérieux », a indiqué le journal.

Le Washington Post, qui a dénoncé à plusieurs reprises les abus dans les prisons militaires américaines, a aussi critiqué l’organisation pour sa référence au goulag : « Faire d’un rapport sur la détention des prisonniers un prétexte pour fustiger Bush ou les États-Unis mine les critiques légitimes d’Amnistie sur la politique américaine. »

La secrétaire générale d’Amnistie internationale, Irene Khan, a réagi jeudi à la polémique en mettant au défi le gouvernement américain « d’ouvrir » Guantanamo pour permettre aux groupes de défense des droits de l’homme de s’y rendre. Seule la Croix-Rouge internationale, dont les rapports d’inspection sont confidentiels, a pu inspecter jusqu’à maintenant la prison. Plusieurs détenus relâchés par les autorités américaines et libérés sans contrainte dans leur pays d’origine ont dit avoir subi des abus.

Selon Mme Khan, le gouvernement américain a offert au rapport d’Amnistie internationale une réponse « défensive et dédaigneuse » qui ne dit rien des préoccupations soulevées.

La porte-parole de la section canadienne francophone d’Amnistie internationale, Anne Sainte-Marie, estime dans la même veine que Washington concentre ses attaques sur le « talon d’Achille » du rapport, à savoir la référence au goulag, plutôt que de se concentrer sur les faits importants.

Elle fait peu de cas des accusations de partialité lancée contre son organisation dans les cercles conservateurs américains. « Quand il est question d’un autre pays, Amnistie internationale est décrite comme une organisation crédible, sérieuse et neutre, mais quand il s’agit des États-Unis, alors on devient incompétent », ironise Mme Sainte-Marie.

Il y a, convient-elle, plusieurs pays, comme la Chine ou la Corée du Nord, qui chapeautent des systèmes carcéraux s’apparentant beaucoup plus au goulag soviétique que Guantanamo. « Mais aucun de ces pays n’a été construit sur des valeurs de liberté et de dignité humaine. Quand la Corée du Nord commet des abus, on essaie de les faire cesser, mais c’est presque dans l’ordre des choses, on s’y attend. Si même les États-Unis commettent des abus, alors vers qui va-t-on pouvoir se tourner ? » souligne la porte-parole.

Reed Brody, conseiller juridique de l’organisation new-yorkaise Human Rights Watch, estime que l’administration Bush a lancé une action « concertée » contre Amnistie internationale en cherchant à tirer profit de la référence au goulag pour l’attaquer sans avoir à discuter des faits.

Le procédé, selon lui, est similaire à celui utilisé contre la revue Newsweek après la publication d’un article indiquant que des exemplaires du Coran avaient été placés dans des toilettes à Guantanamo. La publication s’était rétractée mais le Pentagone a par la suite admis que plusieurs cas de profanation étaient survenus.

« Tant que l’administration refusera de répondre aux vraies questions sur l’usage de la torture, la remise de présumés terroristes à des pays qui la pratiquent, les disparitions, l’humiliation à grande échelle de détenus musulmans, l’image des États-Unis dans le monde va continuer à se détériorer », dit-il.

Par ailleurs, un juge vient d’ordonner que soient rendues publiques des vidéos et des douzaines de photos des sévices commis à la prison d’Abou Ghraïb, chose que le Pentagone refuse de faire. « Ces images sont peut-être laides et choquantes... mais le public américain a le droit de savoir ce qui se fait en notre nom », a déclaré le directeur de l’organisation, Anthony Romero.

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