Portada del sitio > Nuestra América > Hermano Indígena > Ile de Pâques:les Rapa Nui revendiquent leurs terres face au Chili
L’île de Pâques, connue du monde entier pour ses statues monolithiques, est depuis plusieurs mois le théâtre d’affrontements entre les autorités chiliennes et la population indigène des Rapa Nui. Ces derniers estiment que l’Etat chilien les a dépossédés de leurs terres ancestrales.
Les Rapa Nui menacent de prendre leur indépendance et de déposer un recours devant la Cour internationale de justice de La Haye contre l’Etat chilien.
– A l’origine du conflit, un traité signé le 9 septembre 1888 par les natifs de l’île et le Chili, rédigé en deux exemplaires, l’un en espagnol et l’autre en tahitien et rapa nui. Le texte en espagnol parle de cession de terres au Chili. Le texte en rapa nui n’en parle pas. Aujourd’hui, l’Etat chilien dispose de plus de 90% de l’île aux 900 Moais, classés au Patrimoine mondial de l’UNESCO.
Le 27 juillet 2010, les Rapa Nui, ont commencé à occuper plusieurs installations de l’administration chilienne pour protester contre l’occupation et l’exploitation illégale de leurs terres. Pourquoi à cette période précisément? Parce que le gouverneur de l’île, Pedro Edmunds Paoa, récemment nommé par le Chili, faisait apparemment partie d’un groupe d’investisseurs qui avait l’intention d’acquérir les terrains sur lesquels sont construits les édifices publics afin de les privatiser. Pedro Edmunds Paoa a finalement remis sa démission le 10 août.
Dans un même temps, le président du Parlement Rapa Nui, Leviante Araki Araki, a prévenu que si le gouvernement chilien n’accédait pas à leurs requêtes, les Rapa Nui se rattacheraient à la Polynésie. "Nous avons déjà signé un traité avec l’Union Polynésienne. Nous nous tournons vers eux parce que le gouvernement en vigueur n’a pas rempli ses obligations envers les Rapa Nui" a indiqué le leader de l’île de 163 km², située à 3500 km du Chili.
– En plus de récupérer leurs terres, les Rapa Nui, un peu moins de 1500 personnes, voudraient freiner le tourisme, contrôler l’immigration et obtenir un investissement plus conséquent dans la santé, l’éducation et le commerce.
La situation a brutalement empiré le 3 décembre 2010, lorsque le Chili a envoyé d’importantes forces policières pour déloger une trentaine de manifestants occupant un bâtiment administratif qui doit être transformé prochainement en hôtel de grand luxe par des investisseurs chiliens et américains. Six Pascuans ont été arrêtés et 33 personnes ont été blessées. "Ce qui s’est passé ce vendredi est une violation des droits de l’Homme" a signalé à la radio Cooperativa Mario Tuki, membre du Parlement Rapa Nui. Les policiers, eux, affirment avoir riposté après avoir reçu des cocktails Molotov et des coups de bâton et de machette.
– "Tout ceci est la faute du gouvernement, qui ne souhaite pas résoudre les problèmes en dialoguant directement avec les familles. C’est un conflit entre le peuple Rapa Nui et l’Etat du Chili" a expliqué Muta Hey Tuki, porte-parole du clan Tuko Tuki.
– Le président du Chili, Sebastián Piñera, a quant à lui assuré qu’il espérait que la situation se débloque pacifiquement : "nous sommes pleinement conscients du fait que l’Ile de Pâques fait partie du Chili (...), nous devons respecter, protéger et préserver cette culture parce que c’est une partie fondamentale de la culture du Chili." Cependant, il a aussi prévenu que le gouvernement doit remplir ses fonctions : "Nous devons maintenir l’ordre public ; quand un tribunal de la République ordonne une expulsion, le gouvernement doit fournir les moyens qui permettent de protéger la sécurité des citoyens, particulièrement lorsque la demande provient la plus grande majorité des habitants de l’Ile de Pâques."
Le 29 décembre, un autre affrontement a eu lieu au cours de l’expulsion de manifestants de la place principale de la seule ville de l’île, Hanga Roa. 9 personnes ont été arrêtées et plusieurs autres ont été blessées. Cet événement survient après la fin du délai de 60 jours annoncé par le Ministre de l’Intérieur, Rodrigo Hinzpeter, pour résoudre le conflit. Quelques terrains avaient été rendus et d’autres étaient en cours de restitution. Le gouvernement avait ensuite demandé un délai supplémentaire de trois mois et avait dépêché plus de 200 soldats sur place.
– Les Pascuans ont lancé un appel de détresse et réclament l’intervention de plusieurs pays polynésiens, européens et américains et d’institutions internationales telles que la Croix Rouge ou la Commission interaméricaine sur les Droits de l’Homme pour faire pression sur l’Etat chilien et l’obliger à adopter un comportement civilisé respectueux des Droits de l’Homme.
© Nicolas Simoncini. Janvier 2011
Sources :
La Nación, La Tercera, El Mercurio, Rapa Nui, El Ciudadano.
El Correo, 6 janvier 2011.
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