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Le nouveau chef de l’État haïtien, René Préval, n’a pas pris la parole comme prévu hier. Il s’est contenté de saluer les journalistes.
Par Marc Thibodeau
La Presse. Port-Au-Prince, Haïti.
Le samedi 18 février 2006
La communauté internationale sert les rangs derrière le nouveau chef de l’État haïtien, René Préval, qui est demeuré à l’écart hier tandis que ses opposants poussaient des hauts cris contre la décision du Conseil électoral provisoire (CEP) lui donnant la victoire au premier tour.
Le Conseil de sécurité des Nations unies a salué la victoire de M. Préval, tout en appelant le peuple haïtien " à redoubler d’efforts pour promouvoir le dialogue politique et la réconciliation nationale ".
La secrétaire d’État américaine, Condoleezza Rice, a souligné que les États-Unis étaient disposés à travailler avec le nouvel élu haïtien et pourraient réviser à la hausse l’aide versée au pays. La France a aussi salué l’élection de M. Préval, faisant écho aux interventions précédentes du Chili, du Brésil et du Canada.
La plupart de ces pays, soulagés qu’une crise ait été évitée, insistent sur l’importance de la réconciliation politique en Haïti, qui tenait ses premières élections présidentielle et législatives depuis le départ forcé de Jean-Bertrand Aristide, en février 2004.
Des partisans de M. Préval ont paralysé la capitale durant cinq jours pour réclamer la victoire au premier tour de leur candidat, qui a dénoncé une " fraude massive " l’empêchant d’atteindre le seuil des 50 %. Ils ont finalement eu gain de cause lorsque le CEP a décidé, dans la nuit de mercredi à jeudi, de changer la manière de comptabiliser les votes blancs.
Retour au calme
La ville était revenue au calme hier après une journée marquée par plusieurs manifestations- de joie, celles-là- des partisans du président. Une radio a néanmoins signalé trois enlèvements dans la capitale, un phénomène qui n’avait pas été observé depuis plusieurs semaines.
De nombreux candidats défaits n’avaient pas le coeur à la réconciliation malgré les appels répétés en ce sens en provenance de l’étranger.
L’industriel Charles Henri Baker, arrivé troisième au premier tour du scrutin, a indiqué à La Presse que la décision du CEP prive le gouvernement de René Préval de la légitimité qu’il aurait eue en remportant une victoire sans conteste au second tour. " C’est la pire chose qui pouvait arriver ", souligne M. Baker, qui doute de la possibilité de former un gouvernement d’unité nationale.
" On ne peut pas avoir de réconciliation en volant quelque chose ", indique le candidat défait, qui dit blâmer le CEP pour la situation et non M. Préval.
Le candidat social-démocrate Serge Gilles déplore pour sa part en entrevue que les " règles prévues " n’aient pas été respectées, mais précise qu’il ne fera rien pour " nuire " au nouveau président. " Le pays a trop besoin de stabilité, de sécurité. Il faut que les conditions de vie changent ", souligne-t-il.
Le sociologue Laennec Hurbon, opposant de M. Préval, estime que les manifestations de cette semaine constituaient une indication inquiétante du style de gestion qu’entend privilégier le nouveau président. " Si l’opposition descend dans la rue pour manifester, est-ce qu’on va lui donner un nouveau président aussi? " ironise-t-il.
Préval consulte
M. Préval, qui n’a pas pris la parole en public depuis l’annonce du CEP, avait prévu une conférence de presse hier mais elle a été annulée à la dernière minute.
Il s’est contenté de faire une brève apparition devant la maison de sa soeur, dans un quartier chic de Port-au-Prince, pour annoncer qu’il répondrait aux questions des médias mercredi prochain.
" Il veut sans doute laisser les esprits se calmer un peu ", a souligné un correspondant d’expérience.
L’ex-ministre Leslie Voltaire, qui devait se rendre en soirée à la résidence pour célébrer la victoire de son " ami ", a expliqué hier que M. Préval rencontrait ses partisans et menait de larges consultations.
M. Voltaire estime que le CEP a pris une décision " salutaire " pour le pays en désignant rapidement M. Préval comme le gagnant de l’élection présidentielle. Le nouveau chef d’État craignait, dit-il, qu’une vaste fraude le prive de la victoire au second tour.
Plusieurs des membres de l’opposition qui crient aujourd’hui au scandale étaient d’accord avec le " coup d’État " ayant mené en février 2004 au départ en exil de Jean-Bertrand Aristide, poursuit l’ex-ministre, qui s’attend à ce que M. Préval travaille activement à la réconciliation nationale.
" Il va tenter de convaincre les tièdes de se rallier à lui et isoler les jusqu’au-boutistes ", conclut-il.