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2 février 2009

Foro Social Mondial
« Globalisons l’espoir »

 

Le bilan du huitième Forum Social Mondial qui a atteint son point d’orgue hier contient quelques claires lignes et beaucoup de signes d’alerte. La crise globale, occasion inespérée de rassembler les luttes populaires. L’éducation et l’organisation. Le travail qui en découle.

Par Sandra Russo
Página 12
. Depuis le Belem do Pará, le 2 février 2009.

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Un autre monde est possible et cet autre monde a déjà montré la tête dans l’accouchement de cette planète qui pousse pour survivre. Dans cet autre monde néonatal, couvé pendant des décennies dans les entrailles de l’Amérique Latine, c’est, dans l’obscurité de ses masses, dans l’organisation de ses enfants les plus faibles,qu’ il faudra repousser les expressions figées bien que venant du vocabulaire de la gauche. Comment séparer l’important de l’anecdotique ? Comment éviter que les recettes, les manuels, les formules brouille le chemin que chaque peuple doit ouvrir ? Le bilan de ce huitième Forum Social Mondial (FSM) a dégagé quelques lignes claires et beaucoup de signes d’alerte qui ne sont vraiment pas mineurs. Les claires lignes ébauchées de façon coïncidente par les cinq présidents de la région qui ont participé et par les participants par milliers aux débats et aux tables-rondes, disent que le néolibéralisme a échoué, qu’il a laissé un monde non seulement globalisé mais aussi au stade terminal. Que la crise globale est une occasion inespérée et fabuleuse de rassembler les luttes qui ont derrière une histoire, une identité, un peuple et des principes. Que l’idée des États nationaux invisibles et politiquement serviles a été le paillasson sur lequel se sont nettoyés les chaussures du capital transnational déjà devenu indépendant de leurs bourgeoisies respectives. Que l’Amérique Latine n’est pas une simple scène exotique où peuvent encore débarquer bien intentionnés des idéologues du monde central et des puissantes organisations non gouvernementales pour remplacer par leurs propositions le dessin d’une émancipation qui doit être de la responsabilité de ses protagonistes réels. Et que pour cela, il y a deux mots qui doivent être beaucoup plus que des mots répétés, qui doivent être le point de départ pour que cette fois l’Amérique Latine acquiert la forme que les Latinoaméricains lui veulent donner : éducation et organisation.

Ce huitième FSM a été peut-être le plus encourageant de tous. "Globalisons l’espoir", y a-t-on crié. L’espoir est en effet ce qui a encouragé des milliers et des milliers de mouvements sociaux et d’organisations communautaires pour continuer à travailler jour après jour et sans repos pendant une longue décennie à contre-courant. Mais maintenant le courant est favorable, et l’autre cri, "le peuple uni ne jamais sera vaincu", ouvre la première des questions que laisse ce FSM : ni nos peuples ni la gauche se caractérisent en général par l’union ou par leur habileté à trouver des consensus, mais par leur inquiétante fascination des nuances. Là est le premier des grands défis qui est ouvert : être capables de subordonner quelques critères et objectifs derrière les grands consensus qui permettent à la région de se mettre valeur face au monde grâce à ses incroyables richesses et ressources naturelles.

Des présidents qui ont assisté au FSM (jamais aucun n’avait participé et cette fois ils étaient cinq), Evo Morales a été celui qui l’a le mieux dit : « Si je suis à la présidence de la Bolivie, c’est grâce à vous, mes compagnons ». Il l’a dit devant les mouvements sociaux et il ne s’adressait pas à un mouvement particulier, mais aux bases comme moteur et cœur de son travail comme président. Le leader du MST, les Sans la Terre brésiliens, Joao Pierre Stedile, a affirmé que seules en Bolivie les masses se sont élevées au pouvoir, tandis que dans les autres pays la politique des gouvernements progressistes prend d’autres directions et oscille entre répondre à la bases et tranquilliser la bourgeoisie. Dans ce sens, cet autre monde possible se trouvera obligé de reconsidérer la politique et de se débarrasser des pratiques clientélistes qui obstruent la construction d’une citoyenneté. Seuls des hommes et des femmes convaincus de ce qu’ils défendent et en condition d’agir en conséquence selon leurs idées, seront capables de soutenir les gouvernements qui aspirent à des changements structuraux. Les montages super structuraux appartiennent au Vieux Monde, dans lequel le pouvoir n’est pas fruit de la somme de volontés mais d’accords qui ne sont pas toujours avouables.

La revendication unanime de l’État comme agent de contrôle, de supervision, d’intervention et d’équité requiert aussi de penser profondément quel rôle incombe aux organisations non gouvernementales, surgies dans un temps où les États étaient des maquettes scénographiques et la société civile ne pouvait pas se défendre ni s’exprimer autrement. Plusieurs d’entre elles, en général européennes, ont fait un travail magnifique et ont financé les programmes qui ont amélioré la situation de millions de personnes dans tout le continent. Mais dans ce nouveau contexte il est nécessaire de réviser le rôle à tenir, puisque dans cet autre monde possible les peuples et leurs gouvernements peuvent déjà s’entendre sans intermédiaires, et sans « non gouvernemental », ce qui dans un autre temps impliquait une autonomie de la gestion néolibérale d’une génération politique, aujourd’hui requiert une nouvelle lecture.

Le marché a fait faillite. Cela suffit d’obéir à ceux qui ont échoué. Ne sauvons pas les banques, sauvons les gens. L’économie et l’environnement se tiennent par la main. Une souveraineté latinoaméricaine sur les ressources latinoaméricaines. Une monnaie commune. Un changement d’éthique. Le collectif par dessus l’individuel. Tolérance zéro à l’analphabétisme. Alerte rouge devant le nouveau déguisement du capital transnational, spécialement celui lié aux monocultures et semences transgéniques. Le socialisme du XXIe siècle. Politiques des États régionaux. Une coopération dans des aires stratégiques. Une formation de cadres politiques et sociaux comme la réassurance d’un projet démocratique et populaire de longue portée. Ce sont seulement quelques unes des certitudes que laisse ce FSM. Des bornes dans un chemin semé d’obstacles. Le travail qui nous attend.

Traduit de l’espagnol pour El Correo de  : Estelle et Carlos Debiasi.

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