Accueil > Les Cousins > Cuba > Cuba n’a pas besoin de l’Union Européenne, affirme Castro
« Cuba n’a pas besoin de l’Europe », a affirmé le président cubain Fidel Castro au lendemain de l’annonce de la levée temporaire des sanctions européennes, augurant mal des nouvelles relations attendues entre le régime cubain et l’Union européenne, pourtant son premier partenaire commercial.
Par Patrick Lescot
AFP. La Havane, le mercredi 2 février 2005
« Messieurs, je dois le dire en toute honnêteté, Cuba n’a pas besoin des États-Unis, Cuba n’a pas besoin de l’Europe. C’est tellement agréable de pouvoir le dire, (Cuba) a appris à se passer d’eux », a déclaré le chef de l’État cubain mardi soir dans un discours de cinq heures (bien : cinq heures) au Congrès mondial d’alphabétisation à La Havane.
Les pays de l’UE « vont nous pardonner, mais quel crime, quel péché ? », s’est demandé Fidel Castro, vêtu de son uniforme militaire vert olive.
« Maintenant certains veulent nous pardonner pendant quelques petits mois, jusqu’en juin », a-t-il ajouté, en référence à l’annonce la veille à Bruxelles de la suspension pour six mois des sanctions européennes adoptées en juin 2003 dans la foulée de la vague de répression de la dissidence.
Le régime cubain avait fait condamner en avril, au terme de procès sommaires, 75 opposants, dont une trentaine de journalistes indépendants, à des peines de six à 28 ans de prison, et fait exécuter trois Cubains qui cherchaient à fuir aux États-Unis.
Quatorze de ces dissidents ont été remis en liberté conditionnelle l’an dernier, la plupart pour des raisons de santé.
L’UE, qui a depuis 1996 une position commune sur Cuba, consistant à demander des changements démocratiques et une amélioration de la situation des droits de l’homme, décidera avant juillet de proroger ou non la suspension des sanctions.
« Je dois me taire parce que je ne veux pas aider les +vers de terre+ (ndlr : les exilés anticastristes), à l’heure où ils disent que l’Europe a trahi, que l’Europe a abandonné les combattants de la liberté, que l’Europe fait le jeu, s’est vendue et s’est rendue au tyran Castro », a ajouté le chef de l’État.
« Il n’y a pas de doute que certains en Europe ont agi de bonne foi, mais dans quel monde vivons-nous, où, pour effectuer de petits pas en avant et rectifier de grandes erreurs, il faille maintenir au purgatoire un pays et lui pardonner ? », s’est interrogé Fidel Castro.
Réagissant au discours du chef de l’État, une source proche de l’exécutif européen a déclaré mercredi à Bruxelles qu’avec la suspension des sanctions européennes, « il ne s’agit pas de pardonner, mais de dialoguer » avec les autorités cubaines sur « les progrès dans les domaines de l’économie, de la politique et des droits de l’homme ».
Le chef de la diplomatie luxembourgeoise, Jean Asselborn, dont le pays préside l’UE, a souligné mardi que « si Cuba ne saisissait pas la perche que nous lui tendons, nous avons l’obligation de revenir » à la situation antérieure.
Le chef de l’État cubain n’a pas fait référence à la décision de l’UE, parallèlement à la suspension des sanctions, d’« intensifier » les contacts avec la dissidence.
Fidel Castro, qui se remet d’une chute accidentelle en octobre ayant provoqué une fracture de son genoux droit, a parlé assis pendant deux heures et demie avant de se lever et de poursuivre debout son discours, sans note, jusqu’à la fin.