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26 de diciembre de 2002

Crimes de guerres et relations publiques.

 

« Oh come on... Who gives a shit ? » [1]

Par Jacques Bouchard
Mardi 24 décembre 2002

La guerre menée par les États-Unis contre les citoyens des pays les plus pauvres de la planète pour s’emparer de leur pétrole et autres richesses naturelles, se déroule sur deux fronts. Sur le terrain en Amérique du Sud, en Afrique, en Asie Centrale et au Moyen-Orient, mais plus encore sur le front intérieur des pays appelés à former une coalition militaire, à coups de mensonges, de propagande et de désinformation. Les stratèges du Pentagone n’ont pas oublié qu’ils ont perdu la guerre du Vietnam dans les médias, surtout à la télévision. Depuis cette humiliante défaite, ils ont concentré leur efforts à la fabrication d’images virtuelles pour alimenter notre société téléphage, et travailler l’opinion publique selon leurs ambitions.

Devant la menace d’attaque de plus en plus imminente pesant contre l’Irak, le Christian Science Monitor (6-9-02) rappelait à ses lecteurs les mensonges de la propagande guerrière utilisés pour faire accepter la Guerre du Golfe de 1991 par l’opinion publique (Opération Tempête du Désert). À la mi-septembre 1990, le Pentagone estimait, grâce à des photos satellites top-secrets, à 250 000 hommes et 1 500 tanks les forces armées irakiennes stationnées le long de la frontière commune avec l’Arabie Saoudite, et sur le point d’envahir celle-ci. Le St-Petersburg Times de Floride avait alors réussi à obtenir d’autres photos prises au même moment de la même région par un satellite privé soviétique. Pas l’ombre des troupes irakiennes annoncées en vue, seulement le sable du désert. Le Times tenta sans succès à trois reprises de confronter le Secrétaire de la Défense d’alors, et vice-président d’aujourd’hui Dick Cheney, obtenant pour toute réponse : « Fiez-vous à nous ». Cette prétendue accumulation des troupes menaçant l’Arabie Saoudite a servi de « justification » à l’attaque de l’Irak. Les photos satellites sont encore classées top-secret aujourd’hui. Voilà sans doute pourquoi le Pentagone a acquis l’exclusivité des images de la totalité des satellites privés survolant l’Afghanistan avant d’attaquer ce pays.

L’armée irakienne a envahi le Koweït en août 1990. Une semaine seulement avant, Amnesty International accusait le gouvernement koweïtien (la famille royale) d’avoir emprisonné sans procès et torturé les dissidents politiques. Embarassant, au moment où le gouvernement en exil devait vendre sa guerre aux citoyens des pays industrialisés, surtout aux États-Unis. Comment convaincre l’opinion publique que Saddam Hussein, cet ancien allié lors de la guerre contre l’Iran de Komeïny qu’on avait armé jusqu’aux dents en échange de pétrodollars, était soudainement devenu le diable incarné ? Et les tortionnaires de la monarchie pétrolière koweïtienne un gouvernement démocratique qu’il fallait défendre ? Comment transformer une sale guerre pour défendre le monopole pétrolier d’un gouvernement antidémocratique, en cause humanitaire ?

Une fondation ad hoc fut créée : Citizen for a Free Kuwait...Ça sonne quand même mieux que Reinstate Monarchy in Kuwait, n’est-ce pas ? La monarchie pétrolière koweïtienne y injecta plus de 10 $ millions. La noble cause fut confiée Hill & Knowlton, la plus grosse multinationale de relations publiques au monde. Craig Fuller, alors président et directeur exécutif de la firme, avait été chef de cabinet de George Bush père au moment où ce dernier était le vice-président de Ronald Reagan et trafiquant d’armes et de drogues (voir Irangate). Thomas Ross, le vice-président de la boîte avait été porte-parole du Pentagone sous Jimmy Carter. La tâche de vendre cette guerre pétrolière fut confiée à Lauri Fitz-Pegado, ex-agente de renseignement du département d’État devenue spécialiste des dossiers délicats auprès des gouvernements étrangers désirant jouir des bonnes grâce$ de Washington. Fitz-Pegado a défendu entre autres, les intérêts de Bebé Doc Duvalier, l’ex-dictateur de Haïti, et ceux du trafiquant d’armes Adnan Khashoggi. Au dernières nouvelles, elle travaille pour les Îles Caïman, un paradis fiscal réputé (www.odweyerpr.com 28-5-02).

Hill & Knowlton lança une vaste campagne de propagande, fit signer des pétitions, distribua des milliers d’autocollants et de T-shirts Free Kuwait gratuits sur les campus universitaires. Des comités « d’experts indépendants » furent mis sur pied, multipliant les conférences et les communiqués de presse, publiant The Rape of Kuwait un livre de 154 pages sur les prétendues horreurs du régime de Saddam Hussein, etc. Malgré tout ces efforts, l’appui à la guerre demeurait assez mitigé. Le 5 septembre 1990, le London Daily Telegraph prétendait qu’un ministre koweïtien en exil aurait déclaré avoir vu des bébés prématurés sortis des incubateurs dans les hôpitaux. L’histoire fut reprise sans vérification par Reuters et par les médias autour du monde. Fitz-Pegado sauta sur l’histoire et décida d’en faire « l’hameçon » (the hook) de sa campagne de propagande.

Pour donner du poids à ces mensonges un comité comprenant des sénateurs fut créé pour enquêter sur le sujet, le Congressionnal Human Rights Caucus. Le moment décisif des auditions eût lieu le 10 octobre 1990 alors que Nariyah, une jeune koweïtienne de 15 ans livra en sanglotant un témoignage poignant devant les caméras de ce comité bidon aux apparences officielles. Témoignant uniquement sous son prénom, sous prétexte de protéger des représailles sa famille demeurée au Koweït, Nariyah jura avoir vu des soldats irakiens sortir les bébés des incubateurs de l’hôpital de Koweït City pour « les laisser mourir de froid sur le plancher glacé ». Hill & Knowlton inonda immédiatement les salles de rédaction des médias du monde entier de communiqués de presse et de bandes vidéos de cet émouvant témoignage. Ceux-ci avalèrent l’hameçon et la ligne avec.

Fitz-Pegado répéta la performance le 27 novembre devant le Conseil de sécurité des États-Unis, et fit comparaître des témoins sous de fausses identités devant l’ONU. La fraude des bébés sortis des incubateurs prit une ampleur démesurée. Aucune autre allégation trompeuse contre Saddam Hussein n’eût autant d’impact sur l’opinion publique. De 15 le nombre de bébés monta jusqu’à 312. Le président Bush père évoqua le mensonge cinq fois dans ses discours, en parlant de « Hitler revisité ». Sept sénateurs reprirent l’histoire au cours du débat sur la déclaration de guerre à l’Irak, approuvée avec seulement cinq voix de majorité.

Il fut démontré par la suite que Nariyah était membre de la famille royale, et fille de l’ambassadeur du Koweït au Canada et aux États-Unis. Lauri Fitz-Pegado lui a fait répéter personnellement le faux témoignage qu’elle devait livrer devant la commission bidon, en présence des médias. Le Congressionnal Human Rights Caucus, bénéficiait de bureaux et de service téléphoniques gratuits dans les locaux de Washington de Hill & Knowlton. La fondation avait reçu 50 000 $ de Citizen for Free Kuwait. Hill & Knowlton a aussi produit pour plus d’un demi million de dollars, des douzaines de vidéos de « nouvelles ». Une somme judicieusement investie ayant rapporté des millions en publicité gratuite. Les vidéos ont été diffusés aux bulletins de nouvelles du monde entier. Les téléspectateurs n’ont jamais su qu’ils regardaient des films de propagande-fiction. Les médias n’ont jamais identifié la firme de relations publiques comme source des « nouvelles ». Autre fait sans précédent, les vidéos de propagande tournés par Hill & Knowlton ont été présentés au conseil national de sécurité comme des documents authentiques.

L’Histoire semble vouloir se répéter. Les fameuses armes de destruction massive dont disposerait l’Irak ressemblent de plus en plus aux troupes et aux tanks inexistants de 1991. Et les propagandistes ressortent l’histoire des bébés. Le 7 décembre, HBO, la chaîne cablée de AOL Time Warner, aussi propriétaire de CNN, diffusait un documentaire romancé sur la couverture de la guerre du Golfe par CNN, reprenant l’histoire des bébés sans la démentir. Live from Bagdad (En direct de Bagdad), mettant en vedette Michael Keaton et Helena Bonham Carter dans le rôle des reporters de CNN, est une oeuvre révisionniste mélangeant scènes de fiction et d’archives. Non seulement l’épisode des bébés n’est pas démenti, mais la scène est présentée comme une tentative calculée de l’Irak pour manipuler les médias occidentaux. Dès qu’ils sont mis au courant de l’histoire, les glorieux reporters de fiction de CNN se précipitent pour interroger un directeur d’hôpital koweïtien en présence de leur escorte irakienne. Le directeur visiblement appeuré par la présence de l’officiel irakien assure qu’aucun bébé n’a été retiré des incubateurs. Puis, l’irakien met brusquement fin à la rencontre, laissant supposer que le directeur sous pression et menacé de représailles n’aurait pas dit la vérité.

La plupart des membres influents du gouvernement de Bush junior, ont joué un rôle important dans l’administration de Bush senior pendant la guerre du Golfe. Raison de plus pour être vigilants. « Ils sont prêts à tout pour arriver à leurs fins. » selon l’éditeur du Harper’s Magazine John MacArthur [2]. Victoria Clarke, l’actuelle sous-secrétaire chargée des affaires publiques au Département de la Défense (directrice de la propagande), était chargée du bureau de Hill & Knowlton à Washington avant sa nomination. En février dernier, le New York Times (19-2-02) rendait publique l’existence du Office of Strategic Influence (Bureau d’influence stratégique) chargé de lancer des campagnes de désinformation dans la presse internationale. Aussitôt l’affaire rendue publique, le Pentagone annonçait la fermeture du bureau. Un autre pieux mensonge !

Fairness & Accuracy in Reporting (FAIR www.fair.org 27-11-02) se surprenait de l’occultation par les médias corporatifs d’une déclaration de Donald Rumsfeld, secrétaire à la Défense (ministre de la guerre), au cours d’une conférence de presse avant un voyage au Chili. La voici : « Et puis il y a eu le bureau d’influences stratégiques. Vous vous souvenez peut-être. Les "Oh bonté divine n’est-ce pas effroyable, le ciel va nous tomber sur la tête." Le lendemain, j’ai déclaré c’est bon, vous voulez vous attaquer à l’affaire, voici son cadavre. Prenez le nom. Vous pouvez avoir le nom, mais je continuerai à faire tout ce qui est nécessaire, et je l’ai fait ». À qui peut-on se fier [3] ?

Le mensonge de l’accumulation de troupes à la frontière de l’Irak a servi de « justification » à l’agression, et celui des bébés sortis des incubateurs de caution morale. Les relationnistes qui fabriquent des films de propagande et entraînent de faux témoins à se parjurer pour provoquer la guerre sont-ils des criminels ? Goebbels, était-il moins criminel que Hitler, Goering ou Himmler ? Encore une bonne raison pour les États-Unis de refuser de reconnaître l’autorité d’un tribunal international. Après la guerre du Golfe, le Center for Studies in Communication de l’Université du Massachusetts a publié une étude concluant que : plus les gens regardaient la télévision, et moins ils étaient informés. Moins ils étaient informés, et plus ils appuyaient la guerre. Alors, un p’tit conseil, ne croyez pas trop ce que les « experts » de la télévision vous disent.

Si t’es pas sage, Saddam va te couper les oreilles

Avez-vous remarqué dans les médias la présence assidue d’histoires d’horreur venant des pays musulmans ? La presque totalité des éditorialistes et des chroniqueurs des grands médias y sont allés d’un coup de gueule bien senti pour les dénoncer. Une journée, c’est une jeune institutrice pakistanaise de 18 ans qui se fait violer par les membres d’un tribunal islamique parce que son frère a osé fréquenter une fille d’une caste supérieure. Le lendemain c’est une nigérienne qui sera lapidée à mort pour adultère. Un autre jour, c’est l’exploitation des enfants jockeys en Arabie Saoudite, ou Saddam Hussein qui ordonne personnellement qu’on coupe les oreilles des déserteurs, etc.
Brian Whitaker, journaliste du Guardian (12-8-2) s’est demandé qui leur fournissait gracieusement à lui et à ses confrères, ces articles traduits des journaux arabes qu’ils recevaient tous avec une si belle régularité. L’organisation s’appelle MEMRI (The Middle East Media Research Institute www.memri.org), et se spécialise dans la traduction hors contexte des pires horreurs possibles trouvées dans les journaux du Moyen Orient. Le co-fondateur, président et propriétaire se nomme Yargal Carmon. Le colonel Carmon a passé 22 ans dans les services secrets israéliens avant d’être conseiller pour la lutte antiterroriste auprès des présidents Yitzak Shamir et Ytzak Rabin. Trois des six employés, y compris le colonel sont d’ex- agents du Mossad. Une source objective et désintéressée en quelque sorte.

G.I., Bart Simpson baise ta femme !

Selon une « nouvelle » publiée en page éditoriale du New York Times pendant la guerre du Golfe (1-14-1991), Bagdad Betty, la station de propagande destinée aux soldats étatsuniens, aurait diffusé le message suivant : « G.I., tu aurais dû rester chez-toi. Pendant que vous êtes au loin, les vedettes de cinéma séduisent vos femmes. Robert Redford fréquente ta petite amie. Tom Selleck embrasse ta fiancée. Bart Simpson fait l’amour à ta femme. » La « nouvelle » a été reprise par CNN, Entertainment Tonight, NBC, Time magazine. Le président Bush 1er a personnellement qualifié la propagande de Bagdad de « ridicule ». Si le ridicule tuait, il nous aurait débarrassé des éditorialeux de droite qui réclament encore aujourd’hui le bombardement de l’Irak. Ceux-ci avaient pris une blague de Johnny Carson (The Tonight Show 8-22-1990) pour une nouvelle. À la différence que Carson parlait de Homer Simpson, le père ; ce qui rendait la chose plus... plausible... Bart a huit ans. (Source : Fairness & Accuracy in Reporting )

Notes:

[1] « Voyons donc... Tout le monde s’en fout. » (littéralement...Qui donnerait une merde ? ...pour connaître la vérité) : Lauri Fitz-Pegado a un sénateur lui demandant d’expliquer ce qu’elle savait sur le faux témoignage de Nayirah. Senate Record Vote Analysis, (16-6-1994 www.senate.gov)

[2] Second Front : Censorship and Propaganda in the Gulf War, par John MacArthur, cité abondamment par le Christian Science Monitor, voir aussi www.prwatch.org et www.odwyerpr.com

[3] traduction libre. Le texte original anglais est disponible à l’adresse suivante

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