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28 octobre 2005

Colombie : "La patrie est sauve !"

 

Je crois qu’Uribe ne va pas gagner parce qu’il n’a pas été choisi pour être réélu mais pour accomplir un programme que l’immense majorité a cru possible : gagner la guerre et nettoyer la corruption politique

Par Antonio Caballero
Semana
. Colombie, jeudi 27 octobre 2005

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La Cour vient d’approuver la réforme constitutionnelle qui permet au président Álvaro Uribe de se présenter à sa réélection, malgré qu’il s’agisse d’une réforme anticonstitutionnelle : toutes les réformes constitutionnelles le sont. Elle est infestée de vices de forme et de fond, de procédure et d’origine, comme l’est toute réforme, toute loi, toute disposition ou norme qui est dictée en Colombie, où il y a des avocats spécialisés pour les exiger toutes, et gagner les demandes. Tout est illégal ici, sauf ce qui falsifié. Nous sommes un pays de tricheurs.

La réforme approuvée par la Cour, le président Uribe déclara que la possibilité qu’il soit réélu est un "approfondissement de la démocratie", et annonce que oui, il se lance.

Comme tous. Tous nos présidents veulent renouveler leur mandat, en arguant qu’il leur reste à terminer leur œuvre (souvent, même pas commencée). Mais au siècle dernier, un seul y est arrivé : Lopez Pumarejo, qui après avoir été réélu, a dû renoncer à la moitié de son mandat et avec comme conséquence que le Parti Libéral a perdu le pouvoir. Deux autres n’ont pas gagné les secondes élections, mais ont prétendu prolonger leur présidence par la force : Rafael Reyes - qui a du renoncer et quitter le pays, et par conséquent le Parti Conservateur a perdu le pouvoir - ; et le général Rojas Pinilla - qui aussi a du renoncer ensuite et sortir du pays, en faisant que les Forces Armées perdent le pouvoir.

Tous nos présidents veulent rempiler, et leurs poignées respectives de l’entourage veulent qu’ils rempilent. Mais les gens ne supportent pas que les choses se répètent en Colombie.

Todos nuestros presidentes quieren repetir, y su respectivo puñado de áulicos quiere que repitan. Pero la gente no aguanta repeticiones en Colombia.

Mais le cas est que la Cour a approuvé la possibilité d’une réélection d’Uribe, et Uribe a dit que oui, qu’il va se représenter. Et les uribistes clament en chœur : "La patrie est sauve !". Les uribistes : des gens comme l’ex ministre Londono qui prévenait dans colonnes de presse de méritante réprobation que la Cour prétendait s’opposer à la volonté des majorités ; des gens comme le cousin Mario qui incitait à la désobéissance civile si les magistrats ne donnaient pas leur bras à tordre ; des gens comme ceux intègrent les infinis partis uribistes (plus d’ un parti par habitant) ; des gens comme les paramilitaires qui annoncent leur intention de prendre part aux élections ; des gens comme l’ambassadeur Wood.

Et moi aussi, qui ne suis pas uribiste, je me joins au chœur uribiste et clame avec lui : la partie est sauve ! Parce que je crois que la Cour Constitutionnelle, dans sa prudence (probablement inconstitutionnelle), nous a sauvées de l’avalanche de la fureur uribiste qui aurait lâché son veto à la réélection : les l’uribistes ce sont des gens intimidants et dangereux. Uribe aurait été alors imposé par la force, et par conséquent nous aurions eu une seconde période tumultueuse, bien que probablement brève. Ou aussi, probablement, interminable : donc pourquoi ne pas approfondir encore plus la démocratie en réélisant Uribe non seulement une fois, mais cinq ou six ?

Avec l’approbation de la réélection, le panorama se dégage : il n’y aura pas de soulèvement de l’uribisme. Et, en revanche, je crois aussi (la foi, c’est croire ce que nous ne voyons pas) qu’Uribe ne gagnera pas les élections. Ce n’est pas facile à croire, je le sais déjà : Il a pour gagner toutes les ressources du gouvernement, tout le soutien des moyens de communication, tout l’appui des paramilitaires, et tout l’argent du monde. Et les enquêtes d’opinion sont en sa faveur : c’est-à-dire, l’avis des personnes enquêtées (moi, personnellement, je n’en connais aucune). Mais je crois qu’il ne va pas gagner dans au premier tour - et dans le bordel qui va suivre, il lui sera impossible de se récupérer au deuxième.

Je crois qu’il ne va pas gagner, pour ce qu’ on a déjà dit : dans ce pays les gens ne supportent pas les seconds tours. Mais surtout parce qu’Uribe n’a pas été choisi pour sortir être réélu, mais pour accomplir un programme qu’une majorité écrasante des électeurs a cru possible, et qui consistait à gagner la guerre interne et à nettoyer la corruption politique.

Il la oublié très vite cette mission : c’est pourquoi, il a aujourd’hui avec lui la totalité de la classe politique (à l’exception des ex présidents : bien sûr, parce qu’il s’agit des seuls politiciens qui n’ont pas d’élections à perdre). Et quant aux deux aspects plus importants de sa politique, ils ont été premièrement contre-indiqués : le Traité de libre Commerce avec les Etats-Unis, qui ruine l’agriculture ; et la loi du pardon et d’oublie (ou de justice et de paix, c’est la même chose : une autre loi illégale), qui livre la terre et la politique aux narco- paramilitaires. Les deux choses contribuent, non mettre fin à la guerre interne, mais à l’aggraver.

Ils n’ont pas choisi Uribe pour cela. Je ne crois pas, donc, qu’ils le réélisent pour qu’il fasse la même chose.

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