Accueil > Empire et Résistance > Cette mondialisation qui inquiète
Par Dante Sanjurjo
Face à la mondialisation, sept Français sur dix se déclarent inquiets ou hostiles. Pour 60 % des personnes interrogées, elle renvoie d’abord aux inégalités Nord-Sud. Parallèlement, les Français reconnaissent que le mouvement antimondialisation libérale, ses réseaux et ses militants permettent de créer un débat que refusent les institutions internationales ou étatiques.
Quelle image ! Ce week-end, comme à l’accoutumée, c’est dans des bâtiments transformés en bunkers que le Fonds monétaire international, la Banque mondiale et les ministres des Finances du G-7 se sont réunis, à Washington. Selon un scénario immuable, des milliers de manifestants ont défilé et des forces anti-émeutes ont « fait le ménage » aux alentours du périmètre de sécurité. Comme d’habitude, les délégations n’ont pu gagner leur centre de conférence que sous forte escorte policière. Et évidemment, ces institutions qui mènent l’économie du monde n’ont eu qu’un objectif : mener plus avant la mondialisation libérale. Cette fois, elles tentaient de redonner confiance aux marchés et aux consommateurs à l’heure où les Bourses perdent pied et où la croissance marque le pas. Mais l’urgence ne serait-elle pas plutôt de rassurer les populations ? Car, cette fois encore, c’est l’image d’un pouvoir invisible, reclus, étranger au monde qu’il prétend gouverner qui est apparue sur tous les écrans de télévision. Cette image qui, depuis trois ans, revient de sommet en sommet n’est évidemment pas pour rien dans le résultat du sondage que nous publions cette semaine.
Les Français sont inquiets de la tournure que prend la mondialisation. C’est ce que révèle notre enquête exclusive Politis-CSA. 69 % d’entre eux sont soit inquiets, soit franchement hostiles à la mondialisation telle qu’elle se déroule actuellement. Ils n’étaient que 61 % il y a trois ans. Élément intéressant : l’inquiétude, à 63 %, est bien plus répandue que l’hostilité (6 %). Les mécanismes de la mondialisation, parce qu’ils sont obscurs, inspirent la méfiance et la crainte (mais s’ils étaient mieux connus, ils déclencheraient sans doute l’hostilité). Et lorsqu’on leur demande à quel développement correspond pour eux le mot mondialisation, ils sont 60 % à mentionner les inégalités Nord-Sud, 27 % la pollution et 19 % les inégalités au sein des pays développés. Additionnés, les aspects négatifs de cette mondialisation recueillent deux fois plus de suffrages que les aspects que l’on peut considérer comme positifs, à savoir les échanges économiques, la libre circulation des personnes et les échanges culturels. Édifiant.