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10 janvier 2006

Adeus, adiós FMI !

 

Por Benito Perez
Le Courrier
. Suisse, Jeudi 22 Décembre 2005

On parle décidément beaucoup d’Amérique latine ces jours à Washington. L’ombre d’Evo Morales n’est pas la seule à planer dans les couloirs du Fonds monétaire international (FMI) ou de la Maison Blanche. La décision, coup sur coup, du Brésil et de l’Argentine de couper le cordon financier qui les reliait au FMI résonne comme un désaveu majeur pour l’institution financière internationale.

C’est le Brésil de Lula qui a ouvert les feux, mardi 13 décembre, en soldant d’une traite les 15,5milliards de dollars qu’il devait encore à l’institution de Bretton Woods. Deux jours plus tard, Nestor Kirchner lui emboîtait le pas, annonçant que, dès le 2 janvier 2006, il ne devrait plus un centavo aux bureaucrates de Washington. Le coup d’éclat se chiffre à 9,81milliards.

Dans un continent où l’omniprésent fardeau de la dette sert de corset, depuis vingt-cinq ans, à toutes les politiques publiques, cette double annonce a frappé les esprits. Certes, Brasilia et Buenos Aires ne font pas la même lecture publique de leur décision. Le premier chercherait surtout à poursuivre son désendettement structurel -il vient également de solder ses créances auprès du Club de Paris- afin de limer les taux d’emprunt usuraires qui lui sont imposés sur les marchés financiers. Au vu de la « popularité » du FMI au Brésil, on imagine bien qu’à dix mois de la présidentielle, Lula doit aussi se frotter les mains.

Pour le second, en revanche, l’acte est ouvertement politique. « L’Argentine commence à construire son indépendance », proclame Nestor Kirchner, habituel pourfendeur du FMI, à qui il attribue une lourde responsabilité dans la crise traversée par son pays au début de la décennie.

Reste que, le 2 janvier prochain, l’Etat argentin (comme le brésilien) demeurera encore lourdement endetté. Les 9,81milliards versés au FMI ne représentent que 8% du montant de ses créances internationales. Et il n’est pas évident que ce remboursement anticipé soit forcément une bonne affaire économique. En puisant dans les réserves monétaires de sa Banque centrale pour payer le FMI, M.Kirchner réduit -de 40%- sa capacité d’intervention sur le marché des changes. Or c’est en bonne partie sa politique du « peso faible » qui explique aujourd’hui la bonne santé macroéconomique du pays. De plus, en coupant les ponts avec le FMI, l’Argentine s’oblige désormais à emprunter sur les marchés financiers à des taux d’intérêt nettement supérieurs...

A long terme, en revanche, le coup paraît autrement intéressant pour les deux géants sud-américains. La cible de ce remboursement anticipé est éclairante ; le FMI n’est pas une simple institution financière, c’est une machine de guerre idéologique au service d’intérêts particuliers. Ses crédits à taux cassés, Washington les fait payer en nature : privatisations forcées et politiques antisociales.

Malgré le désastre argentin de 2001, causé en partie par sa potion néolibérale, le FMI n’a jamais renoncé à peser sur le gouvernement Kirchner. Il n’a eu de cesse de réclamer l’augmentation des tarifs des ex-services publics aujourd’hui en mains des multinationales et de s’opposer à toute velléité de reprise de ces secteurs par l’Etat. Le Fonds entendait également obliger l’Argentine à rembourser rubis sur l’ongle sa petite minorité de créanciers qui avait refusé la renégociation de la dette nationale début 2005. Enfin, l’organisme financier s’est systématiquement opposé à une réforme progressiste de la fiscalité et à l’instauration d’une sécurité sociale.
Désormais, privé de ses créances, le FMI n’aura plus rien à dire. L’Argentine et le Brésil ont recouvré une part de leur souveraineté. Ils n’ont plus d’excuses non plus.

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