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10 juin 2018

Empires combattants

Le cercle se ferme autour de Julian Assange

par Rafael Poch de Feliu*

 

Toutes les versions de cet article : [Español] [français]

Après six ans d’assignation à résidence, sans communication et isolé, maintenant, l’empire veut sa peau.

Début d’avril, Joseph Di Salvo, le sous-commandant du Commando Sud (Southcom) de l’armée des États-Unis, s’est rendu à Quito. Le sujet de sa visite était la négociation de la réouverture d’une base militaire usaméricaine en Équateur. Le président précédent, Rafael Correa, l’avait fermée et son successeur, Lenine Moreno, voulait rétablir la vassalité traditionnelle à Washington : « serrer les relations de sécurité entre les deux pays ».

En 2012 le gouvernement de Correa a été très courageux en offrant l’asile politique à Julian Assange dans son ambassade de Londres. Le fondateur de Wikileaks a commis le délit de faire connaitre certains crimes de guerre des États-Unis en Afghanistan et en Irak. Plus tard il a révélé les tricheries du Comité National du Parti Démocrate des États-Unis pour faire échouer la campagne de Bernie Sanders lors des primaires présidentielles de 2016.

Assange, qui avec Snowden a favorisé l’un du plus grand discrédit mondial des États-Unis après avoir revelé l’existence de big brother et identifier son fonctionnement criminel mondial, est immédiatement devenu un ennemi de l’empire à éliminer.

Depuis le commencement même du scandale, les documents du Pentagone révèlent l’intention de discréditer ces héros de notre temps et de les transformer en voyous. Ils ont obtenu que Snowden eût à se réfugier en Russie, ils ont présenté Assange comme violeur dans un dossier suédois fabriqué qui s’est définitivement écroulé en mai 2017, et ils ont affirmé que la Russie était la grande fournisseuse de rapports pour Wikileaks, avec comme but de replacer toute cette brave dissidence dans le cadre idéologique bien rodé de la guerre froide après que les États européens lui aient sèchement refusé l’asile.

Comme si tout cela n’était pas assez dur, le jour même de la visite du Général Di Salvo à Quito, l’Équateur a annoncé qu’il coupait toutes les communications d’Internet et de téléphone d’Assange, ainsi que toutes ses visites sauf celles de ses avocats et celles de ravitaillement en nourriture. Le danger dans lequel se trouve Assange est extrême.

Poursuivi pendant huit ans, Assange se trouve depuis six dans une petite pièce de l’étage de l’ambassade équatorienne à Londres, dépourvue de lumière solaire, avec un grave préjudice pour sa santé, guetté par les services d’intelligence qui contrôlent tous ses mouvements et visites, et connaissent même le détail le plus intime de son existence là-bas à l’intérieur.

Le procureur général des États-Unis, Jeff Sessions, dit que son châtiment est une « priorité », le directeur de la CIA, Mike Pompeo qualifie Wikileaks de « service d’intelligence non gouvernemental hostile », l’ex-vice-président Joe Biden l’a qualifié de « cyberterroriste » et en mémoire reste l’exclamation de l’ex-secrétaire de l’État Hilary Clinton : « ne pourrions-nous pas simplement le tuer avec un drone ? » (« Can´t we just drone this guy ? »).

En mai Correa a déjà avancé que les jours d’Assange étaient comptés car le nouveau président, « le jettera dehors de l’ambassade à la moindre pression des États-Unis ». Lundi le ministre équatorien des Relations Extérieures, Maria Fernanda Espinosa, a confirmé à New York que le blocage des communications à Assange sera maintenu. Le jour suivant Espinosa elle était élue président de l’Assemblée générale des Nations Unies avec la bénédiction des États-Unis.

Les mêmes médias qui ont commencé par publier les révélations d’Assange et son réseau, depuis The Guardian, jusqu’à El Pais, et Le Monde, en passant par Der Spiegel, participent aujourd’hui au harcèlement et au dénigrement du personnage. L’assujettissement à l’ordre de l’empire est général et total. Que pourra faire contre cela la manifestation convoquée à Londres le 19 de ce mois pour marquer le sixième anniversaire de son cruel asile étroit ? Malgré toute la rhétorique sur la « société civile », rarement la disproportion de moyens et de forces entre David et Goliat avait été si gigantesque.

Rafael Poch* pour ctxt

Revista Contexto (ctxt), le 6 juin 2018.

Traduit de l’espagnol pour El Correo de la Diaspora par : Estelle et Carlos Debiasi

* Rafael Poch, Rafael Poch-de-Feliu (Barcelone, 1956) a été vingt ans correspondant de « La Vanguardia » à Moscou et à Pékin. Avant il a étudié l’Histoire contemporaine à Barcelone et à Berlin-Ouest, il a été correspondant en Espagne du « Die Tageszeitung », rédacteur de l’agence allemande de presse « DPA » à Hambourg et correspondant itinérant en Europe de l’Est (1983 à 1987). Actuellement correspondant de « La Vanguardia » à Paris.

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