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19 novembre 2021

Clôture des campagnes présidentielles au Chili

Gabriel Boric promet de « faire de la politique depuis la rue » au Chile

 

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Le candidat du Frente Amplio-Parti Communiste parie sur une décentralisation territoriale avec des politiques inclusives.

Trois jours après les élections présidentielles les plus incertaines de l’histoire chilienne récente, sans favoris clairs, au milieu d’un processus constituant et de forte méfiance des citoyens à l’égard des scrutins, en raison d’échecs méthodologiques successifs et d’irrégularités, les candidats ont clos la campagne électorale, marquée par la distanciation sociale qui s’est relâchée dans le pays malgré la légère augmentation des infections de Covid-19 dues au variant Delta.

Pourtant, il y a un candidat qui a surpris, d’autant plus qu’il y a moins d’un an il déclarait dans une interview qu’il n’était pas encore préparé à la responsabilité : Gabriel Boric (35 ans, Convergence Sociale) du conglomérat Apruebo Dignidad [J’Approuver la Dignité], qui regroupe les partis du Frente Amplio, issu des grandes manifestations étudiantes de 2011 et du Parti Communiste. Boric a triomphé lors des primaires de juin sur Daniel Jadue, le grand favori avant même de se porter candidat, par pas moins de 1 058 027 voix contre 692 000 pour son rival.

Boric, ancien président de la Fédération des Etudiants de l’Université du Chili, député depuis 2014 représentant l’extrême sud du pays d’où sont originaires ses ancêtres croates, est issu du mouvement étudiant. Il appartient à une génération qui a remis en question dans la rue le pays construit par la Concertación [en esp] - qui comprenait alors la puissante démocratie chrétienne, le Parti Socialiste et le Parti pour la Démocratie - et qui a régné pendant plus de 20 années consécutives après le retour à la démocratie, alors que pour ces jeunes, dans sa tendance vers le centre-droit, Concertation a négocié plus que souhaité avec la droite héritée de la Dictature.

« Nous sommes une génération qui est descendue dans la rue pour dire que nous ne voulions pas qu’ils continuent à profiter de nos droits », a-t-il déclaré dans un bref discours sur la Plaza de Armas de Casablanca dans la région de Valparaíso. Un geste de décentralisation qui est lié à un programme où les régions, le souci de l’environnement et le féminisme ont un espace central, sans pour autant négliger l’aspect économique, ce que ses rivaux avaient initialement remis en cause, mais lors du dernier débat télévisé a été fructueux. « On va faire de la politique depuis la rue, depuis les territoires », a-t-il ajouté lors d’une réunion où des personnalités telles que Constanza Schonhaut et Beatriz Sanchez étaient invitées., candidate du Frente Amplio qui, aux élections de 2017, a obtenu la troisième place (20,27 %), seulement dépassée par Alejandro Guillier et Sebastián Piñera. Des artisites musicaux tels que Inti Illimani, Isabel Parra (fille de Violeta Parra), l’auteur-compositeur-interprète Nano Stern et le groupe de cumbia et pop Moral Distraída ont également participé.

DISCOURS DE BORIC

Mais le véritable test décisif pour Boric a été les plaintes sur le site Ciper au sujet de la candidate au sénat de son secteur Karina Oliva (Comunes) qui, dans sa campagne infructueuse en tant que gouverneur de Santiago, sept conseillers et membres de son parti ont présenté des factures pour leurs services de près de 165 000 dollars au Service Electoral, un chiffre inhabituel. « La plainte de Ciper concernant la campagne de Karina Oliva est sérieuse et doit être clarifiée par tous les instances concernées . Notre projet de changements repose justement sur la non-répétition des pratiques qui discréditent et vident la politique de sens et jamais en faveur des entreprises », a-t-il déclaré sur ses réseaux sociaux.

Le garçon aux fleurs

Sebastián Sichel, avocat et ancien ministre de Sebastián Piñera, opte pour le parti au pouvoir qui, bien qu’il se présente comme « indépendant », est soutenu par la plupart des figures de l’UDI, de la Rénovation Nationale et d’Evópoli, c’est-à-dire le parti au pouvoir dans son intégralité. Bien que sa campagne ait été menacée par la figure de José Antonio Kast, un ultra-droitier qui a accommodé son discours où il revendique à la fois le dictateur Augusto Pinochet et le néolibéralisme et qui selon les sondages serait le favori des élections, a terminé sa campagne presque en secret, « semant » des fleurs en papier presque à l’aube sur la Plaza Baquedano, rebaptisée Plaza de la Dignidad lorsqu’elle est devenue l’épicentre des protestations de l’explosion sociale d’octobre 2019.

« Notre cérémonie de clôture de campagne commence par se remplir de petits moulins à vent jaunes, qui sont le symbole de l’espoir pour le Chili, c’est la place de tous les Chiliens, c’est le lieu de rencontre et nous voulons fêter qu’une campagne est une question d’espoir, où nous pouvons être ensemble », a déclaré Sichel lors de son intervention dans la zone la plus touchée par l’explosion sociale.

SIchel a triomphé lors des primaires de droite au même titre que Boric, renversant le candidat favori et éternel à la présidence, Joaquín Lavín, économiste et pinochetiste historique actuellement « à la retraite » en Espagne. Cependant, quantitativement, son succès n’est pas comparable à celui de Boric : il n’a remporté que 659 570 voix contre 420 691 de l’expatrié Lavín et les autres anciens ministres de Sebastián Piñera qui concouraient ce jour-là : Evópoli Ignacio Briones (131 957) et RN Mario Desbordes (131 674).

Le même président chilien, qui a échappé cette semaine à une accusation constitutionnelle devant le Sénat transandin pour des irrégularités dans la vente de la société minière Dominga, une affaire conclue en 2010 et rendue publique dans les Pandora Papers , a déclaré il y a quatre mois « Il y a trois choses qui sont nécessaires pour être président : venir du centre, s’appeler Sebastián et être indépendant ».

Rendre Amérique encore plus belle

Yasna Provoste (DC), qui incarne la tradition centriste du pays et qui a qualifié Boric d’ « extrême gauche », a clos sa campagne devant un millier de personnes sur la Plaza de Armas de Concepción. Bien qu’elle ne figure pas parmi les favorites, elle a le soutien politique de représenter l’Unité Constituante, un conglomérat de partis de l’ancienne Concertation qui comprend le PPD, le PS et le Parti radical.

Un autre candidat progressiste du centre, Marco Enriquez Ominami (PRO), s’est connecté à Internet pour répondre à ses abonnés et a ensuite organisé un événement privé

Eduardo Artés de Unión Patrótica —située dans l’authentique extrême gauche— a terminé sa campagne sur la Plaza de Armas au centre de Santiago attaquant Boric : « El Frente Amplio n’est pas une alternative à la vieille politique, il fait partie de la vieille politique corrompue qui existe dans le pays ».

Et José Antonio Kast (Parti Républicain), le favori, qui allait défier Boric pour le poste et qui dans le débat ne se souvenait pas de son propre programme, le feuilletant désespérément pour répondre, a terminé sa campagne dans le secteur haut de Santiago, bien qu’à d’abord on n’attendait pas un grand evenement : 500 personnes portant des chapeaux avec « Make America Great Again  » pour un événement intitulé « La fête des audacieux » (en relation avec son slogan « Osé-vous ») avec des groupes de cumbia et de comédiens dans le Parque Araucano de Las Condes.

Une curiosité : l’économiste Franco Parisi, libertaire dans la lignée de Javier Milei, n’a même pas fait campagne au Chili puisqu’il a un mandat de saisie pour non-paiement de pension alimentaire (ce qu’il nie) et dont la candidature est peut-être la plus representative de l’histoire récente du Chili.

Juan Carlos Ramírez Figueroa* pour Página 12

Página 12. Depuis Santiago de Chile, le 19 de noviembre de 2021.

* Juan Carlos Ramírez Figueroa. Journaliste, chercheur, consultant numérique indépendant et auteur. Quinze ans d’expérience dans la presse et les institutions liées aux économies créatives. Spécialisé dans le développement de contenu numérique, la culture, la gestion de crise et l’analyse de la parole.

Traduit de l’espagnol pour El Correo de la Diaspora par : Estelle et Carlos Debiasi

El Correo de la Diaspora. Depuis Santiago du Chili, le 19 novembre 2021.

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