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16 janvier 2004

Ces armes qui mènent le monde
Pierre Chavance et Pierre Bouvier

 

L’ouvrage est nourri de bonnes intentions (contre la guerre, pour la paix, contre l’hégémonie américaine, pour une Europe paisible, etc.). Le plan est clair et la construction cohérente. Pourtant, peu à peu un doute s’installe : le titre de l’ ouvrage n’est pas une simple accroche commerciale, mais exprime bien la thèse centrale du volume : l’état du monde, après 90, s’explique par le fait que "le monde de la guerre et des affaires /…/ n’avait aucune envie de voir fondre les marchés lucratifs de l’armement" (p. 11-12). Une telle surdétermination des relations internationales et des politiques des différents pays par la "dynamique propre" (p. 14) de l’industrie d’armement demande démonstration. Or au fil des pages s’accumulent erreurs, approximations, affirmations incongrues.

Les erreurs sont loin d’être mineures : Le siège de l’Otan n’est pas en G. B. (p. 111) mais à Bruxelles, ce n’est pas le F-16 de Lockheed-Martin qui l’a emporté en Corée face au Rafale (p. 69, 128) mais le F-15 de Boeing. Eurocopter n’a pas été créée en 1961 (p. 91) mais trente ans plus tard. Le missile franco-allemand Roland n’est pas un produit de Boeing (p. 74). Dassault aviation n’est pas dans les huit plus grands constructeurs mondiaux d’ armement (p. 65), mais au trentième rang. Quand on lit que les "données manquent" sur les effectifs de l’armée américaine depuis 1995 (p. 57), on se dit que la parution annuelle du Military Balance pallie ce manque…

Les affirmations hasardeuses ne manquent pas : les rapports annuels des firmes seraient une source peu exploitée (p. 47) : une bibliographie sommaire de travaux montre le contraire. Personne ne s’intéresse aux armes légères (p. 49) : la consultation de l’édition 2003 du Small Arms Survey aurait évité une telle simplification. L’essentiel du trafic des armes légères dans le monde serait assuré par les "triades" chinoises. (p. 31).

Des approximations parsèment le texte : pourquoi inventer "ventes agréées" (p. 125) au lieu de "commandes" ? qu’est-ce que les "matériaux de destruction massive" (p. 32) et les "bombes à l’uranium" (p. 38) ? Quelle est cette "guérilla" censée avoir permis l’élimination de Salvador Allende (p. 29) ? le budget américain de la défense serait "stable "en structure (p. 57). Le Japon envisagerait de s’équiper de l’avion F-22 (p. 96). Les auteurs confondent les avions mystère et mercure (p. 100), assurent que la société Dassault aviation a changé plusieurs fois de nom (p. 100), (en réalité une fois), affirment qu’elle n’est que "modestement" bénéficiaire en 2001 (p. 120) (en réalité 8 %), paraissent confondre GEC (groupe britannique) et General Electric (groupe américain) (p. 86), parlent du JSF et du F-35 comme de deux programmes distincts (p. 69) ; leur exposé des sources ne comprend ni le Sipri, ni le registre des nations unies sur le commerces des armes classiques, ni l’IISS, ni le rapport du ministère sur les exportations, ni les rapports du service de recherche du congrès américain.

Il est dommage que les matériaux utilisés soient si peu maîtrisés, car d’ approximation en approximation, la démonstration s’évanouit. L’objectif d’ écrire "pour ceux qui cherchent à savoir et à comprendre" (p. 8) n’est pas atteint.

Par J.-P. H.
Débat Stratégiques, n°71 décembre 2003

Références :
Ces armes qui mènent le monde
Pierre Chavance et Pierre Bouvier
Editions du Lieu restauré, Paris, 2003.

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