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23 septembre 2004

Mariano Moreno (1778-1811)

par Federico Corbière

 

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Peu de personnalités de l’histoire argentine ont réalisé des actions tangibles et donné corps à des conceptions idéologiques à forts contenus en un temps météorique, comme ce fut le cas de la tranche de vie de Mariano Moreno, entamée le 25 mai de 1810 et qui s’est terminée par son curieux décès en haute mer dix mois plus tard (4 mars de 1811).

Par Federico Corbière

Deux siècles après la croisée libératrice, les mêmes vieux débats continuent à serivr de toile de fond à l’apparemment non terminée organisation nationale. Voila un portrait de Mariano Moreno, appelé de manière juste le "numen" de la Révolution de mai.

C’était un avocat soucieux des nouvelles idées, mais qui vivait attaché à une vie traditionnelle bourgeoise. Personne ne pourrait imaginé que cet avocat silencieux, pour rien grandiloquent, allait en adhérant au mouvement de mai et en participant comme secrétaire de l’Assemblée de gouvernement, délier toutes les passions politiques, transformé en acceptant son engagement, en un révolutionnaire jacobin, caractérisé par une forte implantation culturelle et idéologique.

Ceci ne fut pas spontané, il avait étudié avec d’autres personnes illustres dans l’Université Royale et Pontificale de Chuquisaca (Bolivie), un des rares centres culturels de l’époque, dirigé par des jésuites et des professeurs laïques, où on avait accès aux livres interdits de l’Encyclopédie de Denis Diderot et d’autres, aux oeuvres Jean-Jacques Rousseau et Voltaire, outre les manifestes, pamphlets et déclarations de droits de la Révolution française de 1789. Les documents de l’abbé Sieyés et l’oeuvre rebelle des jésuites Mariana et Suárez, qui avaient théorisé, sur la ’Résistance à l’oppression ’et au ’Tyrannicide (la mort du tyran pour éviter des plus grands maux), parallèlement à John Locke.

Ce fut à Chuquisaca que Moreno connaîtra un autre homme de la haute bourgeoisie coloniale, Julian Álvarez, « l’illustre inconnu » de la Révolution de mai, qui sera ensuite son bras droit dans la fondation et le développement du périodique "La Gazette Buenos Ayres."

Projections politiques et économiques

Selon les recherches de Dardo Corvalán Villardo et Milciades Pena, le document sur « la représentation des Propriétaires fonciers »(1810), d’orientation libre-échangiste fut réalisé au sein de l’étude de Mariano, pas sous sa directions mais celle d’autres avocats qui appartenaient à son étude.

La théorie sur le libre commerce que défendaient quelques révolutionnaires porteños comme Manuel Belgrano, était opportune pour combattre le monopole espagnol anachronique qui noyait les petits commerçants et la bourgeoisie portegna naissante.

Toutefois, les idées politiques et économiques de Mariano Moreno ont été exposées à travers les documents de la Gazette, les décrets de la Première Assemblée et dans le ’Plan d’Opérations’, où il défendait le protectionnisme économique, l’expropriation obligatoire des intérêts espagnols et réalistes, et le développement d’un processus naissant industriel.

La formation culturelle de Mariano Moreno, comme celle de Julian Álvarez, Juan Jose Castelli et Juan Jose Paso, entre autres, avait un fort biais marqué par le siècle des lumières, c’est-à-dire francisé. Dans le cas de Moreno, de toute manière, il n’était pas anti-catholique puisque quand il a traduit ’le Contrat Social ou les principes du Droit Politique ’écrit par Jean Jacques Rousseau, il a préféré ne pas incorporer le chapitre contre la religion, le considérant erroné.
Mais il y a une autre explication, Moreno a combiné l’action et la pratique avec l’idéologie et a agi sur le cours des événements. Il n’a pas voulu faire face à l’Église Catholique, déjà profondément divisée du fait que la hiérarchie espagnole et créole soutenait les royalistes et l’Empire espagnol, en suivant des instructions du Vatican. Tandis que nombre de prêtres de campagne défendaient la révolution comme Deán Funes, Santa María oro et Fray Luis Beltrán, appelé l’artilleur de la Révolution ’.

Le décret sur la ’Suppression des honneurs ’qui l’a opposé à Cornelio Saavedra, ses documents sur la liberté de presse et de conscience, sur la liberté de culte, ses directives soutenues par tous les membres de l’Assemblée en ordonnant l’exécution de royalistes conduits par Virrey Liniers, jugés à Cordoue, et ses idées protectionnistes ont affecté des secteurs de la révolution elle-même, dont le président de l’Assemblée, sur qui il existe un mythe de personnalité militaire mais qui en réalité protégeait son intérêt de commerçant porteño qui voyait dans Moreno des complications pour ses intérêts patrimoniaux.

En 10 mois Moreno a transformé des idées, des conceptions et a produit une polarisation politique. Il ne l’a pas fait seul, il a eu le soutien de la Société Patriotique, qui était un centre de conspiration, le Club de Marco (café situé face à l’actuel Collège National Buenos Aires) et fondamentalement la loge Indépendance, organisme maçonnique révolutionnaire, présidée accidentellement par son ami et maître vénérable Julian Alvarez, qui recevrait en 1812 les conjurés de la frégate Canning, de Londres, qui avaient échappé aux griffes de l’inquisition espagnole continentale.

Il est bon de rappeler que à l’ombre de la loge Indépendance et de la Société Patriotique se sont créés des groupes de choc civico-militaires semblables aux Patricios de Cornelio Saavedra. Ces activistes ont été encouragés par French et Beruti, qui ont rempli diverses tâches révolutionnaires, comme fusiller les contre-révolutionaires, actes d’action directe ou comme distribuer des tracs les 24 et 25 mai dans la place face au Conseil municipal.

Son travail journalistique

Moreno comme tous les hommes illustres a eu vision prospective claire sur l’importance de la presse dans la diffusion des idées. C’étaient des temps où la profession journalistique n’existait pas comme activité, mais les textes étaient adressés généralement à la diffusion d’idées. Pour de tels motifs beaucoup de leurs rédacteurs étaient considérés des ’publicistes ’. La Révolution française a rendu populaire les gazettes qui avaient déjà fait leur apparition en 1776 pendant l’indépendance américaine.

Le secteur le plus radicalisé de la colonie avait connaissance de l’importance des publications de gazettes et de ce qui est connu aujourd’hui comme des journaux.

Moreno, avec Álvarez et une autre personnalité intellectuelle, Bernardino de Monteagudo a commencé immédiatement par la diffusion de nouvelles doctrines avec la ’Gazette de Buenos Ayres ’, qui lui a survécue plusieurs années.

Creolisation et Universalité en Mariano Moreno a su conjuguer ce qui est national latino-américain avec les idées universelles et le siècle des lumières et l’Encyclopédie. L’historien polonais Boleslao Lewin a développé en profondeur ces questions dans ses travaux sur Moreno et Rousseau. De fait, les idées morenistes en économie, sur le protectionnisme et l’industrialisation ont été menées à bien par José de San Martín à Cuyo. Et probablement transmises par Julian Álvarez quand il a travaillé avec lui. Dans cette zone, San Martín a exproprié les familles riches en animaux et en biens pour la cause de l’Armée libertador et a établi une seule douane, entre d’autres mesures.

Le même plan économique du ’Plan d’Opérations ’de Moreno et l’étatisation de Cuyo par San Martín, des années plus tard auront une réalisation concrète au Paraguay des López, mis à sang et feu en 1861, en suivant les instructions de l’Empire britannique, par les armées du Brésil esclavagiste et de l’Argentine mitriste (portegna).

Cependant, les drapeaux morenistes ont été levés par des fédéraux doctrinaires, comme Felipe Varela, Manuel Dorrego, Dimango French et son frère Manuel Moreno, contre l’ambition centralisatrice propre des commerçants porteños du Parti rivadaviano.

Ces idées pour l’union latino-américaine ressurgirent avec l’yrigoyenisme, les socialistes, et jusque dans le peronisme, ils se revendiqueraient de Moreno, contre le nationalisme catholique. Le député Albrieu, le dira au Parlement de la première époque peroniste, cherchant les racines du justicialisme dans la trilogie : Moreno - San Martín - Perón.

Évidemment, la singulière histoire argentine se réserve le droit de répéter ses erreurs et de choisir les chemins d’intérêts mesquins, en laissant à la dérive les observations et les propositions de figures comme celle de Mariano Moreno, mort dans un bateau à Londres, dans des circonstances peu de claires.

Traduction pour El Correo : Estelle et Carlos Debiasi

Bibliographie

 Bagú, Sergio, « Mariano Moreno ; passion et vie de l’homme de Mai », Buenos Aires, 1939
 Corbiere, Emilio P, « Le Terrorisme dans la Révolution de Mai », Buenos Aires, Librairie et Éditorial ’la Faculté’, 1937
 Corbiere, Emilio J, "La Maçonnerie. Politique et Sociétés Secrètes", Buenos Aires, Éditorial sud-américaine, 1998
 Corbiere, Emilio J, « La Maçonnerie II. Tradition et Révolution », Buenos Aires, Éditorial sud-américaine, 2001
 Lewin, Boleslao, "Mariano Moreno son idéologie et sa passion », Buenos Aires, éditions Libère, 1971
 Galet, Milcíades, « la classe dirigeante argentine face à l’impérialisme », Bs. As, Fiches, 1973
 Scenna, Miguel Angel, Plan d’Opérations de mai, dans « tout est Histoire », Buenos Aires, 1970

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